Letouzey et Ané (p. 257--).

IX

LA PROPAGANDE DU MAL



organisation de la propagande. — la lanterne. — la petite république française. — deux bourreaux d’enfants. — les ouvriers du mal. — les défroqués. — les mystificateurs. — les exaltés. — désintéressement. — le pensionnat anti-clérical de montreuil-sous-bois.


Puisque j’ai été un des plus ardents à la diffusion du mal, j’ai le devoir de faire connaître l’organisation de cette propagande.

Dès le début de ma campagne contre la religion, j’avais pensé qu’il me fallait viser surtout à faire pénétrer mes écrits dans les petites villes et les villages.

Pour mettre ce projet à exécution, je résolus de me servir de l’intermédiaire des journaux les plus répandus de Paris et de la province, en leur donnant un fort intérêt dans l’entreprise.

J’allai trouver d’abord le directeur de la Lanterne, M. Eugène Mayer, et je lui fis la proposition suivante :

— Vous avez en province trois ou quatre cents correspondants, à qui vous expédiez chaque jour votre journal par quantités considérables d’exemplaires. En vertu des tarifs des chemins de fer, vous avez droit, pour chaque expédition, à un nombre fixe de kilogrammes, nombre que vous atteignez rarement. Eh bien, j’ai des brochures que vos marchands pourraient prendre en dépôt ; pourquoi ne vous en serviriez-vous pas pour compléter le poids de vos paquets de journaux ? Vous les enverriez ainsi d’office à vos correspondants. Les marchands, au bout d’un certain temps, vous renverraient de la même manière celles qu’ils n’auraient pas vendues. Cette combinaison, supprimant pour tout le monde les frais de port, serait extrêmement avantageuse aux uns et aux autres.

M. Mayer accepta, et, dès lors, il vendit à ses correspondants non seulement son journal, mais encore les brochures de la Bibliothèque Anti-Cléricale. La librairie de la rue des Écoles lui fournit ensuite, à son tour, des volumes, des livraisons, toutes les publications qu’elle éditait, et les expéditions de la Lanterne se transformèrent bientôt en véritables messageries.

De la sorte, l’administration du journal devenait « commissionnaire en librairie ».

Pour comprendre les avantages de la combinaison, il est bon que le lecteur soit mis au courant de certains détails du métier de libraire en province.

Le petit libraire de province ne s’adresse que très rarement d’une façon directe aux éditeurs de la capitale. La raison en est bien simple : en général, les éditeurs accordent à ces vendeurs de second ordre une remise très faible, 30 pour 100, souvent même 25 ou 20 seulement, attendu que l’importance de la remise est en rapport avec l’importance de la commande. Or, la vente de chacun de ces détaillants, en particulier, est des plus modestes. Aussi, si ces vendeurs s’adressaient directement à l’éditeur, les frais de transport de la marchandise dévoreraient le plus clair de leur bénéfice.

Ils ont donc intérêt à adresser leurs commandes diverses à un commissionnaire de Paris, lequel passe chez les différents éditeurs, achète tous les volumes dont son client a besoin et les lui expédie groupés, ce qui réduit les frais de port à une somme insignifiante.

D’autre part, comme le commissionnaire achète chez le même éditeur pour plusieurs clients de province à la fois, et comme les achats de ce genre se font au comptant, il obtient une remise plus forte que celle qui aurait été accordée à chaque client en particulier.

Libraire de province et commissionnaire de Paris sont donc indispensables l’un à l’autre ; chacun trouve son bénéfice dans cette sorte d’alliance.

J’avais étudié avec soin la question, et ma combinaison perfectionnait encore le système de la commission ordinaire : elle supprimait complètement les frais de transport.

En outre, elle offrait deux avantages considérables aux petits libraires des départements : 1° étant en compte avec le journal, ils n’avaient plus à payer d’avance les volumes et brochures ; 2° ils ne couraient plus aucun risque, puisque le journal, entrepositaire central des publications de l’éditeur, leur reprenait la marchandise invendue, sauf à la rendre à son tour audit éditeur ou à la réexpédier sans frais à d’autres marchands.

Avec ce procédé de vente en grand, personne ne perdait ; tout était bénéfice pour chacun.

Les moindres merciers de village, papetiers, débitants de tabac, etc., qui avaient jusqu’alors tenu seulement les journaux à titre supplémentaire, s’improvisaient marchands de brochures, volumes et livraisons illustrées, comme les libraires du chef-lieu. Cette absence de risques et cet accroissement de gain les attachait chaque jour davantage à celui des journaux qui leur rendait de plus en plus lucratif le métier de détaillant.

De son côté, le journal se fortifiait par le zèle toujours croissant de ses dépositaires, et lui-même opérait une ample moisson de billets de banque. En effet, la remise qui était octroyée par la Librairie Anti-Cléricale à la Lanterne, pour sa vente générale à ses correspondants, était d’une importance jusqu’alors inconnue chez les éditeurs : 40 pour 100.

Enfin, l’éditeur obtenait un débit de publications qui eût été dix fois moindre sans cette combinaison.

La Lanterne, organe radical, ne fut pas le seul journal républicain qui trouva le système ingénieux et répandit ainsi à profusion mes œuvres et celles de mes complices. La Petite République Française, organe opportuniste, imita son exemple, et, à son tour, fut enchantée des résultats pécuniaires de l’opération.

Sur le terrain irréligieux, intransigeants et modérés sont d’accord.

Et puis, — faut-il le dire ? — le côté financier de cette spéculation avait bien son charme pour la Lanterne et la Petite République.

On ne se doute pas des bénéfices que la Librairie Anti-Cléricale leur rapporta.

La Lanterne gagna, de ce chef, jusqu’à 3,000 et 4,000 francs, nets, par mois, sans compter les gains particuliers revenant à ses vendeurs dépositaires. La Petite République gagna à peu près autant.

Mais ce ne fut pas tout.

La même combinaison fut adoptée par les journaux républicains de province les plus répandus. Les conservateurs se sont demandés souvent comment les publications de la librairie de la rue des Écoles arrivaient à pénétrer dans les moindres hameaux. Je leur révèle volontiers aujourd’hui le secret de cette propagande sans précédente.

Tel journal ayant son siège dans une ville de 50,000 habitants avait, avec l’éditeur de ces impiétés, un compte annuel de 30,000 à 35,000 francs.

Les organes des grandes villes réalisaient, par le fait de la Librairie Anti-Cléricale, des bénéfices prodigieux.

Aussi, quand la nouvelle de ma conversion éclata comme la foudre et porta un coup mortel à la maison d’édition, les malédictions de la presse républicaine de Paris et de la province formèrent un concert aussi unanime que bruyant. J’avais tué la poule aux œufs d’or. Les crimes de ce genre ne se pardonnent pas.

Parmi les feuilles qui m’attaquèrent, la Lanterne se fit remarquer par sa violence et son acharnement. Sa colère extrême fut en proportion exacte des écus que j’avais fait pleuvoir dans sa caisse.

Quant à la Petite République, son directeur, M. de Roussen, ne manqua pas de donner ordre à ses valets de plume de me traîner quelque peu dans la boue. Ces gens-là n’ont même pas la reconnaissance du porte-monnaie.

Cette mesquine rancune ne porta pas bonheur à M. de Roussen. Il avait acheté l’île de Porquerolles, et une partie des bénéfices que je lui ai procurés servit sans doute à cette acquisition. Un collaborateur, M. Quentin, devenu directeur de l’Assistance Publique, lui obtint l’envoi de nombreux enfants abandonnés pour la colonisation de son île. M. de Roussen fit de cette colonie un véritable bagne, où la torture fut appliquée à ces pauvres petits êtres, indignement exploités, à tel point que la justice eut l’obligation d’intervenir et d’enlever les intéressantes victimes à leurs odieux tourmenteurs.

Qui le croirait ? la directrice de cet enfer était une femme, Mme Lapeyrère. Cette dame, auteur de quelques romans anti-cléricaux publiés sous le nom de Pierre Ninous, avait paru aimable au directeur de la Petite République, qui se montra galant avec elle et lui commanda des feuilletons. Elle rompit avec son mari et devint madame de Roussen, à la mode républicaine. C’est ce couple délicat qui a commis les méfaits honteux, que la presse entière, sans acception de parti, a stigmatisés en les appelant : « les scandales de Porquerolles. »

Mme Lapeyrère, — ou Mme de Roussen, comme on voudra, — disait naguère à qui voulait l’entendre que, pour être sûre d’écrire des romans attrayants, elle avait soin d’étudier ses sujets sur le vif. En vertu de ce principe, il y a donc lieu de croire que, si elle a secondé M. de Roussen dans son œuvre de torture à Porquerolles, c’est qu’elle avait en vue un nouveau roman qui paraîtra prochainement peut-être. Son titre est tout indiqué : les Bourreaux d’Enfants.

Je m’en voudrais d’insister davantage sur ce côté matériel de la propagande du mal. Il était cependant nécessaire de fournir des chiffres et de donner certains détails. Il serait à souhaiter que la presse conservatrice sût s’organiser de même pour la propagande du bien. Aujourd’hui, dans le camp libre-penseur, l’organisation que je viens de faire connaître est générale. Mais, hélas ! il a été dit que les enfants de ténèbres sont plus habiles que les enfants de lumière.

Ah ! qui secouera la torpeur des catholiques ? Si le peuple est saturé de publications malsaines, c’est parce que les corrupteurs savent déployer une activité étonnante dans toutes leurs entreprises. Les conservateurs se reposent trop sur la bonté de leur cause. Ils oublient le vieux proverbe : « Aide-toi, le ciel t’aidera. »

Je terminerai par quelques mots sur les ouvriers de la besogne impie.

Ils peuvent être répartis entre trois classes : les anciens prêtres, aigris par les mécomptes de leur apostasie ; les mystificateurs sceptiques, pour qui le blasphème est un amusement et qui se font un jeu d’inventer les contes les plus invraisemblables ; les exaltés, qui se montent la tête et finissent par croire de bonne foi aux fantaisies de leur propre imagination.

Les « défroqués », — on appelle ainsi les anciens prêtres dans le monde républicain, — se distinguent par une sorte d’ardeur de convention ; ils sont, pour ainsi dire, résignés à faire profession de violence. Quiconque les fréquente se rend facilement compte de leurs luttes intérieures. J’en ai connu quelques-uns, de ces déclassés du sacerdoce. J’ai été le confident de leurs souffrances et de leurs amertumes. Ils sont beaucoup à plaindre.

Les fidèles, instinctivement, les repoussent, et les impies ne les accueillent pas.

Ils sont les plus malheureux des hommes.

Si, au lieu d’être le dernier des indignes, j’étais un Vincent de Paul, je créerais une œuvre pour faciliter le retour de ces infortunés coupables. La tâche serait plus facile qu’on ne croit ; on ne s’imagine pas ce que les « défroqués » éprouvent de déceptions dans leur existence sans but. Je suis convaincu que, si la question était sérieusement étudiée, on les ramènerait presque tous. Au surplus, ils ne sont pas nombreux.

Les mystificateurs, eux, se comptent par centaines. Notre siècle est rongé par la lèpre du scepticisme. On ment par plaisir, et l’on appelle cela : « être drôle ».

C’est en se moquant du public pour lequel ils écrivaient, que mes collaborateurs travaillaient à ces mystifications effrontées qui étaient intitulées : le Secret de Tropmann, Marat ou les Héros de la Révolution, les Amours secrètes de Pie IX, Histoire scandaleuse des d’Orléans, etc.

— Qu’allons-nous donc raconter au bon peuple dans notre prochaine livraison ? se demandait-on quotidiennement.

Et l’on imaginait les aventures les plus extraordinaires.

Le « Secret de Tropmann », c’était que Napoléon III lui-même avait coopéré à l’assassinat de la famille Kinck dans le champ Langlois, à Pantin. Ce crime cachait de terribles mystères politiques, et Tropmann, sacrifié pour la forme, n’avait pas été guillotiné.

Toutes les idées saugrenues étaient accueillies par de joyeux éclats de gaîté, du moment qu’il s’agissait de mystifier le naïf lecteur.

J’ai assisté à des enfantements de « romans historiques », dont les auteurs se tenaient les côtes, quand ils rédigeaient le « canevas ».

Lorsqu’on traça le plan de Marat ou les Héros de la Révolution, nous portâmes, mon collaborateur et moi, de vrais défis à la crédulité publique. Nous en arrivâmes à présenter Marat comme le père de Théroigne de Méricourt.

L’Histoire scandaleuse des d’Orléans, à laquelle je fus étranger, mais dont j’ai suivi tous les incidents de fabrication, est le comble de la mystification extravagante.

L’idée première de cette élucubration ultra-fantaisiste est d’un de mes amis et confrères de ce temps-là, aujourd’hui député de Paris. Le principal rédacteur est un vaudevilliste en vogue sur les théâtres du boulevard.

On se tordait littéralement, à force de rire, lorsqu’on imaginait quelque bouffonne impossibilité, et l’on se demandait comment on pourrait la faire prendre au sérieux par le vulgaire.

C’est ainsi que la famille d’Orléans fut chargée des crimes les plus atroces, à la grande joie des auteurs, qui, constatant l’engouement du public pour leur œuvre, disaient en riant :

— Allons ! la bêtise humaine n’a pas de limites !

Mais, à côté de ces virtuoses de la mystification, il y a, — qu’on me permette d’accoupler deux mots qui jureront de se trouver ensemble, — il y a, dis-je, les « menteurs sincères ».

Eh ! oui, j’en ai connu, de ces étranges auteurs qui finissent par se convaincre de la vérité de leurs propres inventions. Ceux-là sont des exaltés du plus haut degré. C’est avec une gravité étonnante qu’ils affirment les faits les plus insensés, lesquels n’ont jamais existé que dans leur cervelle ; mais ils ne les croient pas moins vrais, ils en sont sûrs, et cela de très bonne foi.

Ces exaltés méritent d’être classés à part. Ce sont, en général, des hommes ayant beaucoup souffert dans les combats de la vie ; chez eux, le moral est affecté. On se les imagine méchants ; pas du tout, ils sont les meilleures gens du monde, d’une bonté excessive dans les relations privées, sensibles à la moindre prévenance, à la moindre marque d’amitié.

Un de ces égarés de la politique écrivait des livraisons pour la Librairie Anti-Cléricale. Il avait joué un rôle sous la Commune, et ses opinions violentes avaient eu sans doute pour cause la misère : mais, d’une probité extrême, il ne fut pas de ceux à qui l’insurrection donna la fortune. Il est toujours demeuré pauvre.

À la rue des Écoles, il venait me voir souvent et me soumettait son manuscrit.

Certain jour, il avait, dans un de ses « romans historiques », mis en scène le prince Napoléon Bonaparte, quelque temps avant le coup d’état. Il représentait le président conspirant contre la République, tout en menant joyeuse vie.

Un passage de sa narration était, à peu près, ainsi conçu :

« … Et, ce soir-là, le prince-président, pour faire trêve aux soucis de la politique, s’en fut souper chez Céline Montaland. »

— Etes-vous bien sûr de ce que vous avancez ? demandai-je à l’auteur.

— Parfaitement.

— Cependant, il me semble qu’en 1851 Céline Montaland était bien jeune pour recevoir Louis-Napoléon à souper chez elle.

Nous ouvrîmes le Dictionnaire des Contemporains. Céline Montaland y figurait avec sa date de naissance : août 1843. En 1851, elle avait donc huit ans.

Sans sourciller, mon homme prit une plume, biffa sur son manuscrit le nom de l’actrice et le remplaça incontinent par celui d’une autre, plus âgée de dix ans : Suzanne Lagier.

Quelques jours après, je demandai en plaisantant à l’auteur :

— Eh bien, et Suzanne Lagier ? dîne-t-elle souvent avec le prince Napoléon-Bonaparte, dans votre roman ?

Il me regarda, très étonné.

— Vous me dites cela d’un drôle d’air, fit-il. Est-ce que vous douteriez, par hasard, des rapports intimes qui existaient entre Suzanne Lagier et le prince, à l’époque du coup d’état ? Mais, mon cher monsieur, rien n’est pourtant plus authentique ! C’est le cri public, et, quant à moi, j’en suis absolument sûr.

Je n’insistai pas. Mon homme s’était habitué à sa trouvaille, et, maintenant, il était convaincu.

Toutefois, il est bon de dire que les tempéraments de ce genre sont assez rares.

Mes collaborateurs furent, en grande majorité, de profonds sceptiques.

Cette propagande du mal n’est pas, pour tous ceux qui s’y livrent, une source de bénéfices. Pour ma part, si j’ai combattu la religion, ce fut toujours avec un entier désintéressement.

Les sociétés de libre-pensée savent que je ne prélevais jamais un centime sur la recette de mes conférences, tandis que la plupart de nos orateurs anti-cléricaux font bel et bien argent de leur éloquence. Souvent même, pour aller discourir au profit d’une œuvre laïque, je me suis rendu dans des villes à 500 et 800 kilomètres de Paris, sans me faire rembourser mes frais de voyage.

Cette manière d’agir ne contribua pas peu à me susciter des ennemis parmi les gens en vedette dans le parti libre-penseur. Aussi, répétaient-ils partout que je n’avais aucun mérite à me çonduire de la sorte et que, ayant gagné des sommes folles, j’étais à la tête de 25 ou 30,000 francs de rente.

Rien n’était plus faux. Je n’ai jamais possédé un sou vaillant. Les bénéfices de la Librairie Anti-Cléricale eux-mêmes, — très considérables, il est vrai, — s’accumulèrent dans les magasins sous forme de marchandises, clichés, etc. L’argent liquide n’a jamais servi qu’à enrichir ceux qui, aujourd’hui, déblatèrent le plus violemment contre moi ; la caisse de cette maison d’édition fut toujours à la disposition des œuvres de propagande, et tels qui m’injurient puisèrent maintes fois dans ma bourse personnelle.

Un journal, par exemple, qui devrait avoir la pudeur de ne pas m’insulter, c’est la France. Lorsque son rédacteur en chef, M. Camille Farcy, posa sa candidature radicale dans le Ve arrondissement, la librairie de la rue des Écoles participa aux frais de l’élection pour 2.000 fr. environ. Le secrétaire de la rédaction profita même de l’occasion pour m’emprunter, à moi personnellement, 400 fr. qu’il me doit encore. On sait cela, à la France, et ce journal est un de ceux qui, en toute circonstance, me jettent de la boue.

Et cet exemple n’est pas unique. Ils s’appellent légion, ceux qui, parmi les politiciens du parti républicain, furent nos obligés.

Il me répugne d’entrer dans de pareilles explications ; et cependant, il faut bien que ces choses se sachent, non pour moi, qui en suis marri, mais pour faire connaître mes détracteurs.

Du reste, je n’ai pas la prétention d’être seul à avoir fait acte de désintéressement dans la lutte entreprise contre la religion.

Aujourd’hui que mes yeux sont ouverts, j’ai le devoir de dire aux catholiques :

— Si beaucoup vous combattent par intérêt personnel, il en est quelques-uns qui sont anti-cléricaux avec abnégation. Il faut beaucoup prier pour ces égarés que ne meut aucun instinct cupide. Le Christ nous a ordonné d’aimer nos ennemis. Eh bien, voilà les premiers qu’il faut aimer.

Il n’est personne, en France, qui n’ait entendu parler de ce pensionnat de Montreuil-sous-Bois, aux portes de Paris, où l’athéisme est enseigné aux jeunes filles.

Je vais étonner nombre de mes lecteurs, en leur apprenant que la directrice de cet établissement est le dévouement incarné. Je ne connais guère de personnes qui aient aussi bon cœur. C’est par pur aveuglement que cette dame se livre à sa propagande irréligieuse. Si Dieu lui faisait la grâce de l’éclairer, elle marcherait de pair avec nos admirables sœurs de charité.

C’est un véritable malheur que cette personne, si bien douée, emploie ses qualités à une œuvre impie entre toutes. Je la recommande instamment aux prières des âmes ferventes.

Luttons contre le mal, mais en priant avec ardeur pour nos adversaires. C’est à force de prières que nous triompherons de la propagande anti-cléricale ; ce sont nos supplications qui feront jaillir du ciel sur nos ennemis la lumière de la vérité.