Code de procédure civile 1806/Partie I, Livre II, Titre XXI

France
Partie I, Livre II, Titre XXI : De la Récusation.
(p. 68-72).

Titre XXI.
De la Récusation.

378. Tout juge peut être récusé pour les causes ci-après :

1.° S’il est parent ou allié des parties, ou de l’une d’elles jusqu’au degré de cousin issu de germain inclusivement ;

2.° Si la femme du juge est parente ou alliée de l’une des parties, ou si le juge est parent ou allié de la femme d'une des parties, au degré ci-dessus, lorsque la femme est vivante, ou qu’étant décédée, il en existe des enfans ; si elle est décédée et qu’il n’y ait point d’enfans, le beau-père, le gendre ni les beaux-frères ue pourront être juges.

La disposition relative à la femme décédée s’appliquera à la femme divorcée, s’il existe des enfans du mariage dissous ;

3.° Si le juge, sa femme, leurs ascendans et descendans, ou alliés dans la même ligne, ont un différent sur pareille question que celle dont il s’agit entre les parties ;

4.° S’ils ont un procès en leur nom dans un tribunal où l’une des parties sera juge ; s’ils sont créanciers ou débiteurs d’une des parties ;

5.° Si, dans les cinq ans qui ont précédé la récusation, il y a eu procès criminel entre eux et l’une des parties, ou son conjoint, ou ses parens ou alliés en ligne directe ;

6.° S’il y a procès civil entre le juge, sa femme, leurs ascendans et descendans, ou alliés dans la même ligne, et l’une des parties, et que ce procès, s’il a été intenté par la partie, l’ait été avant l’instance dans laquelle la récusation est proposée ; si ce procès étant terminé, il ne l’a été que dans les six mois précédant la récusation ;

7.° Si le juge est tuteur, subrogé tuteur ou curateur, héritier présomptif, ou donataire, maître ou commensal de l’une des parties ; s’il est administrateur de quelque établissement, société ou direction, partie dans la cause ; si l’une des parties est sa présomptive héritière ;

8.° Si le juge a donné conseil, plaidé ou écrit sur le différent ; s’il en a précédemment connu comme juge ou comme arbitre ; s’il a sollicité, recommandé ou fourni aux frais du procès ; s’il a déposé comme témoin ; si depuis le commencement du procès il a bu ou mangé avec l’une ou l’autre des parties dans leur maison, ou reçu d’elles des présens ;

S’il y a inimitié capitale entre lui et l’une des parties ;

S’il y a eu, de sa part, agressions, injures ou menaces, verbalement ou par écrit, depuis l’instance ou dans les six mois précédant la récusation proposée.

379. Il n’y aura pas lieu à récusation, dans le cas où le juge serait parent du tuteur ou du curateur de l’une des deux parties, ou des membres ou administrateurs d’un établissement, société, direction ou union, parties dans la cause, à moins que lesdits tuteurs, administrateurs ou intéressés, n’aient un intérêt distinct ou personnel.

380. Tout juge qui saura cause de récusation en sa personne, sera tenu de la déclarer à la chambre, qui décidera s’il doit s’abstenir.

381. Les causes de récusation relatives aux juges sont applicables au ministère public lorsqu’il est partie jointe ; mais il n’est pas récusable lorsqu’il est partie principale.

382. Celui qui voudra récuser, devra le faire avant le commencement de la plaidoirie ; et si l’affaire est en rapport, avant que l’instruction soit achevée ou que les délais soient expirés, à moins que les causes de la récusation ne soient survenues postérieurement.

383. La récusation contre les juges commis aux descentes, enquêtes et autres opérations, ne pourra être proposée que dans les trois jours qui courront, 1.° si le jugement est contradictoire, du jour du jugement ; 2.° si le jugement est par défaut et qu'il n’y ait pas d’opposition, du jour de l’expiration de la huitaine de l’opposition ; 3.° si le jugement a été rendu par défaut, et qu’il y ait eu opposition, du jour du débouté d’opposition, même par défaut.

384. La récusation sera proposée par un acte au greffe, qui en contiendra les moyens, et sera signée de la partie ou du fondé de sa procuration authentique et spéciale, laquelle sera annexée à l’acte.

385. Sur l’expédition de l’acte de récusation, remise dans les vingt-quatre heures par le greffier au président du tribunal, il sera, sur le rapport du président et les conclusions du ministère public, rendu jugement qui, si la récusation est inadmissible la rejetera ; et si elle est admissible, ordonnera, 1.° la communication au juge récusé, pour s'expliquer en termes précis sur les faits, dans le délai qui sera fixé par le jugement; 2.° la communication au ministère public, et indiquera le jour où le rapport sera fait par l'un des juges nommé par ledit jugement.

386. Le juge récusé fera sa déclaration au greffe, à la suite de la minute de l'acte de récusation.

387. À compter du jour du jugement qui ordonnera la communication, tous jugemens et opérations seront suspendus ; si cependant l’une des parties prétend que l’opération est urgente et qu’il y a péril dans le retard, l’incident sera porté à l’audience, sur un simple acte, et le tribunal pourra ordonner qu’il sera procédé par un autre juge.

388. Si le juge récusé convient des faits qui ont motivé sa récusation, ou si ces faits sont prouvés, il sera ordonné qu’il s’abstiendra.

589. Si le récusant n’apporte preuve par écrit, ou commencement de preuve des causes de la récusation, il est laissé à la prudence du tribunal de rejeter la récusation sur la simple déclaration du juge, ou d’ordonner la preuve testimoniale.

390. Celui dont la récusation aura été déclarée non admissible, ou non recevable, sera condamné à telle amende qu’il plaira au tribunal, laquelle ne pourra être moindre de cent francs, et sans préjudice, s’il y a lieu, de l’action du juge en réparation et dommages et intérêts, auquel cas il ne pourra demeurer juge.

391. Tout jugement sur récusation, même dans les matières où le tribunal de première instance juge en dernier ressort, sera susceptible d’appel : si néanmoins la partie soutient qu’attendu l’urgence, il est nécessaire de procéder à une opération sans attendre que l’appel soit jugé, l'incident sera porté à l'audience, sur un simple acte, et le tribunal qui aura rejeté la récusation, pourra ordonner qu’il sera procédé â l’opération par un autre juge.

392. Celui qui voudra appeler, sera tenu de le faire dans les cinq jours du jugement, par un acte au greffe, lequel sera motivé et contiendra énonciation du dépôt au greffe des pièces au soutien.

393. L’expédition de l’acte de récusation, de la déclaration du juge, du jugement, de l’appel et les pièces jointes, seront envoyés, sous trois jours, par le greffier, à la requête et aux frais de l’appelant, au greffier du tribunal d’appel.

394. Dans les trois jours de la remise au greffier du tribunal d’appel, celui-ci présentera lesdites pièces au tribunal, lequal indiquera le jour du jugement, et commettra l'un des juge ; sur son rapport et sur les conclusions du ministère public, il sera rendu à l'audience jugement, sans qu’il soit nécessaire d’appeler les parties.

395. Dans les vingt-quatre heures de l’expédition du jugement, le greffier du tribunal d’appel renverra les pièces à lui adressées, au greffier du tribunal de première instance.

396. L’appelant sera tenu, dans le mois du jour du jugement de première instance qui aura rejeté sa récusation, de signifier aux parties le jugement sur l’appel, ou certificat du greffier du tribunal d’appel, contenant que l’appel n’est pas jugé, et indication du jour déterminé par le tribunal ; sinon, le jugement qui aura rejeté la récusation sera exécuté par provision et ce qui sera fait en conséquence sera valable, encore que la récusation fût admise sur l’appel.