Chants populaires de la Basse-Bretagne/Jean Scolan

Édouard Corfmat (1p. 151-153).


JEAN SCOLAN.
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  Jean Scolan et son parrain
Sont venus tous les deux demander pardon ;
Demander le pardon de Dieu,
Et rémission pour leurs âmes.

  En arrivant chez sa mère,
Il lui a dit :
— Bonne nuit et joie à tous dans cette maison ;
Est-on allé se coucher ici ? —

  — Qui est là, à cette heure de la nuit.
Quand je repose dans mon lit ? —
— Levez-vous, ma mère, pour souffler le feu.
Et vous verrez deux, au lieu d’un. —

  Quand elle eut allumé la chandelle.
Elle tomba trois fois à terre.
— Calmez-vous, ma mère, ne vous effrayez points
En voyant le fils que vous avez mis au monde.

  Je viens du feu du purgatoire.
Et je vais au feu de l’enfer ;
Je vais brûler dans le feu de l’enfer,
Si vous ne voulez me pardonner.

  Je suis venu demander le pardon de Dieu,
Et la rédemption de mon âme —
— Et comment te pardonner, mon fils ?
Songe à tout le mal que tu m’as fait !.

  Tu as tué ton père, pendant qu’il dormait
Et violé trois de tes soeurs ! —
— Puisque Dieu m’a pardonné,
Ma mère, pardonne-moi aussi !

  Ma mère, je sais bien que je l’ai fait,
Hélas ! par malheur et par méchanceté ;
Mais puisque Dieu m’a pardonné.
Ma mère, pardonnez-moi aussi ! —

  — Et comment, mon fils, te pardonner ?
Songe à tout le mal que tu m’as fait !
Mettre le feu à neuf meules de blé,
Et me forcer à aller mendier mon pain ! —

  — Ma mère, je sais bien que je l’ai fait.
Hélas ! par malheur et par méchanceté ;
Mais puisque Dieu m’a pardonné.
Ma mère, pardonnez-moi aussi ! —


  — Et comment, mon fils, te pardonner ?
Songe à tout le mal que tu m’as fait :
Tu as mis le feu au fournil,
Et brûlé sept bêtes à cornes ! —

  — Ha mère, je sais bien que je l’ai fait,
Hélas ! par malheur et par méchanceté !
Mais puisque Dieu m’a pardonné,
Manière, pardonnez-moi aussi. —

  — Comment, mon fils, te pardonner ?
Songe à tout le mal que tu m’as fait :
Tu as volé la ceinture à Guingamp,
Le chapelet et la croix d’argent ! —

  — Ma mère, je sais bien que je l’ai fait.
Hélas ! par malheur et par méchanceté ;
Mais puisque Dieu m’a pardonné.
Ma mère, pardonnez-moi aussi ! —

  — Comment, mon fils, te pardonner ?
Songe à tout le mal que tu m’as fait :
Songe à tout le mal que tu m’as fait,
Tu m’as perdu mon petit livre !

  Ce n’est pas encore mon livre que je regrette le plus.
Mais mon chapelet, qui s’y trouvait ! —
— Consolez-vous, ma mère, ne pleurez pas.
Votre petit livre n’est pas perdu !

  Votre petit livre n’est pas perdu,
Ouvrez votre armoire et vous le verrez ;
Allez à votre armoire et vous le verrez,
Avec trois feuilles effacées ;

  Une par l’eau, une autre par le sang.
Et la troisième par les larmes de mes yeux ! —
Elle a ouvert son armoire,
Et se retournant vers son fils Jean :

  — Retire-toi loin de moi,
Va-t’en brûler dans les feux de l’enfer ! —
— Puisque Dieu m’a pardonné,
Ma mère, pardonnez-moi aussi ! —


Chanté par Marie Audern du bourg de Pluzunet. — 1867.