Cécilia/5/7
an III (1794) (3, p. 99-100).
CHAPITRE VII.
Habitation d’un Avare.
Monsieur Briggs se trouva chez lui. Cécile lui communiqua, sans préambule et en peu de mots, les raisons qui l’engageaient à desirer de quitter M. Harrel et ajouta que, s’il lui était possible de la loger, elle serait charmée de résider avec lui jusqu’à sa majorité. Oui, oui, s’écria-t-il, je suis très-content, je vous recevrai de tout mon cœur. M. Harrel, sûrement, a bien fait ses affaires avec vous.
Cécile commença, en voyant la chambre qu’il lui destinait, et le délabrement des meubles qu’elle renfermait, à se repentir de lui avoir fait connaître le sujet de sa visite ; car elle vit qu’il lui serait absolument impossible de s’accoutumer jamais à une telle habitation. Elle aurait seulement souhaité que M. Monckton eût été présent, pour juger par lui-même combien son projet était peu praticable. Tout ce qu’il lui restait actuellement à faire, était donc de rétracter ce qu’elle avait avancé ; et de se retirer de chez M. Briggs. Elle était fâchée cependant de ce que le seul de ses tuteurs chez lequel il lui convenait d’habiter, eut trouvé moyen, par sa bassesse, son avarice et sa grossièreté, de rendre les richesses méprisables, l’opulence inutile, et l’économie odieuse ; et que le choix de son oncle fût ainsi malheureusement tombé sur l’avare le plus vil et le plus abject, dans une ville sur-tout où l’abondance, l’hospitalité et la splendeur régnaient, et dont les principaux habitants, long-temps renommés pour leur opulence et leur probité, se distinguaient alors par leur magnificence et leur libéralité.