Au Palais Vendramin

Vers et ProseTomes 13 à 16, mars 1908 à mars 1909 (p. 252).


IX

Au Palais Vendramin


Les pâles heures sous la lune…
Camille Mauclair.


Le palais d’orgueil et d’éternel deuil, que hante
Une grande Ombre… Des rayonnements discrets
Dans l’or des cadres, sur l’ivoire des coffrets,
Et cette voix, dans le silence ému, qui chante…

Là montaient à nos cœurs l’incantation lente
De la Circé marine, et les philtres secrets
De la Musique, et tout le charme ardent et frais
Des fleurs, des parfums, de telle robe ondulante.

Vers le Nord, chassé de nos âmes, avait fui
Le corbeau familier de l’implacable Ennui ;
Tu nous oubliais, Vie, ô marâtre importune !

À la haute fenêtre souriait la Nuit,
Et les Heures magiciennes, une à une,
Enchantaient, sous les feuilles d’ombre, l’eau de lune.


Venise.