Astronomie populaire (Arago)/XXXII/15

GIDE et J. BAUDRY (Tome 4p. 571-573).

CHAPITRE XV

températures moyennes de l’océan par diverses latitudes


Il est temps d’examiner maintenant comment les phénomènes de température sont modifiés lorsqu’un horizon d’une étendue déterminée, au lieu d’être composé de parties solides, est recouvert en totalité d’une épaisse couche d’eau.

Nous avons déjà expliqué (chap. ix) que l’eau s’échauffe moins à sa surface que les matières terreuses, parce que ces dernières matières ont une chaleur spécifique très-inférieure à celle de l’eau. En sorte que la quantité de chaleur solaire nécessaire pour élever leur température de 10°, par exemple, est beaucoup moins considérable que la chaleur de même origine qui peut élever du même nombre de degrés la température d’une couche liquide.

Nous devons remarquer, en outre, que les rayons solaires qui s’absorbent dans une très-mince couche terreuse, pénètrent en partie dans l’eau à une profondeur considérable ; qu’en mer notamment ils ne s’éteignent tout à fait qu’après avoir traversé des profondeurs d’une centaine de mètres, en sorte que la chaleur provenant de l’absorption, au lieu de se concentrer pour ainsi dire à la surface, porte sur une grande masse d’eau et doit être d’autant moindre que cette masse est plus considérable.

L’évaporation, cause très-intense de froid, comme nous l’avons vu, est d’autant plus forte que ce phénomène s’exerce sur une plus grande échelle. Or, là où le liquide peut fournir sans cesse à l’évaporation, existe une cause de refroidissement qu’on ne trouve pas du tout ou qu’on ne trouve pas au même degré sur la terre ferme.

Il résulte de ces trois causes (chaleur spécifique, diathermansie, évaporation), que l’eau et l’atmosphère qui est en contact avec elle, doivent être moins chaudes l’été que les portions continentales des terrains semblablement situés.

Après avoir vu ce qui arrive à l’eau pendant l’été, sous le rapport de la température, examinons comment elle se comporte en hiver.

Nous l’avons déjà dit, les molécules superficielles, refroidies par leur rayonnement vers les régions froides de l’espace, se précipitent vers le fond à cause de leur excès de pesanteur spécifique (chap. iii) ; en conséquence, la surface de la mer doit conserver une température supérieure à celle que présente la surface des continents, puisqu’ici les molécules superficielles refroidies ne s’enfoncent pas dans le terrain.

Ces conséquences déduites d’un examen minutieux du mode d’action des rayons solaires sur une surface liquide et sur une surface continentale, sont confirmées par les observations.

Ainsi, à Bordeaux, la température moyenne de l’hiver est de 6°,1, tandis que sous la latitude de cette ville la température de l’océan Atlantique ne s’abaisse jamais au dessous de 10°,7 centigrades.

Sous le 50e degré on n’a jamais trouvé l’Océan au-dessous de 9° centigrades.

L’ensemble des observations qu’on a recueillies montre que dans l’hémisphère nord et dans la zone tempérée la température moyenne d’un îlot situé au milieu de l’océan Atlantique serait plus élevée que la température moyenne d’un lieu semblablement placé sur le continent, et qu’on y trouverait un été moins chaud et un hiver moins froid. Des différences dans ce sens-là ont été particulièrement constatées à l’île de Madère.