Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 12/Géométrie de la règle, article 1

GÉOMÉTRIE DE LA RÈGLE.

Lettre au Rédacteur des Annales,
Sur la démonstration, donnée à la page 326
du XI.e volume de ce recueil, des deux théorèmes énoncés
à la page 
289 du IX.e volume du même recueil ;
M. Vecten, licencié ès sciences, ancien professeur
de mathématiques spéciales.
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J’ai été bien surpris, mon très-cher ami, en lisant le dernier numéro de votre excellent recueil, de voir que vous aviez vainement cherché des démonstrations purement géométriques pour les deux théorèmes énoncés à la page 289 du IX.e volume ; et que vous incliniez même à penser que toute autre voie que celle que vous avez prise ne pourrait conduire que très-difficilement au but. La vérité est que dès que les énoncés de ces deux théorèmes me furent connus, j’en cherchai la démonstration que je trouvai sans beaucoup d’efforts, et par les moyens généralement employés en pareil cas. Si je négligeai alors de vous adresser le résultat de mes recherches, c’est que la chose m’avait paru trop simple pour en valoir la peine, que je ne doutai pas que beaucoup d’autres n’y parvinssent comme moi, et que je craignais d’arriver trop tard. Quoique les démonstrations que vous avez vous-même données ne laissent certainement rien à désirer du côté de la rigueur, de la brièveté et de l’élégance, ceux à qui les principes de la statique sont inconnus peuvent désirer de se convaincre de la vérité de ces théorèmes par des considérations purement géométriques. C’est ce qui me détermine à vous adresser mes démonstrations dont vous ferez, d’ailleurs tel usage qu’il vous plaira.

Tout repose sur une proposition bien connue de tous ceux qui se sont occupés de la géométrie de la règle ; proposition rappelée et mise en œuvre en maints endroits des annales ; et dont la vérité se déduit d’ailleurs bien simplement de la considération de la perspective d’un tronc de pyramide triangulaire à bases non parallèles. Cette proposition consiste en ce que, si deux triangles tracés sur un même plan, sont tels que les trois droites concourent en un même point, les trois points de concours des côtés et et et appartiendront à une même ligne droite, et réciproquement.

En se bornant en effet, pour les motifs que vous avez vous-même indiqués, aux cas particuliers que vous avez considérés ; on voit, par le premier théorème, que les trois droites

joignent deux à deux les sommets de deux triangles dont l’un a pour ses trois côtés les droites

et l’autre pour les siens

or, les côtés correspondans de ces deux triangles concourent aux trois points

lesquels, par construction, sont sur une même droite donc les trois droites ci-dessus dénommées, doivent concourir en un même point (1234) ; et on démontrera, par une semblable considération, que les trois droite

concourent en un même point (2345).

On démontrera semblablement que trois quelconques des quatre droites

concourent en un même point ; d’où on conclura que ces quatre droites se coupent en un point unique (12345).

Pour le second théorème, on voit que les trois points

sont les points de concours des directions des côtés correspondans de deux triangles dont l’un a pour ses sommets les points

et l’autre les points

or, les droites

qui joignent les sommets correspondans de ces deux triangles, concourent, par construction, en un même point donc les trois points ci-dessus dénommés doivent appartenir à une même droite et on démontrera, par une semblable considération, que les trois points

appartiennent à une même ligne droite.

On démontrera semblablement que trois quelconques des quatre points

appartiennent à une même ligne droite, d’où l’on conclura que ces quatre points sont sur une droite unique

Agréez, etc.

Paris, le 26 mai 1821.