Annales de mathématiques pures et appliquées/Tome 04/Correspondance, article 3

CORRESPONDANCE.

Lettre de M. Bret, professeur à la faculté des sciences
de l’académie de Grenoble
,
Au Rédacteur des Annales ;
En réponse aux lettres de MM. du Bourguet et Bérard,
insérées aux pages 56 et 58 de ce volume.
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Monsieur et très-cher Confrère,

Je crois devoir répondre encore aux lettres de MM. du Bourguet et Bérard ; je le ferai brièvement, et de manière à n’être plus obligé d’y revenir.

Je ne disconviens nullement que le théorème que M. du Bourguet a voulu démontrer ne soit évident, pour qui est habitué à la marche de l’analise algébrique ; mais je n’en persiste pas moins à regarder comme très-difficile d’en donner une démonstration en forme, qui ne pêche par aucun côté ; et voilà sans doute pourquoi M. du Bourguet ne peut défendre la sienne qu’à l’aide d’un cercle vicieux. Supposer, en effet, que, si l’équation

(1)

ne donne pas elle donnera tout au moins c’est bien supposer, ce me semble, que toute équation est résoluble, ce qui est précisément la thèse à établir.[1]

Quant à M. Bérard, j’ai dit que la méthode de construction de la parabole qu’il croyait que je lui avais empruntée était différente de la sienne, et c’est une chose dont il convient aujourd’hui. J’ai ajouté que, tandis que la mienne était générale, la sienne souffrait une exception, et cela est si vrai que, pour le cas des axes rectangulaires, il est obligé de recourir à un nouveau procédé, dont il n’est fait aucune mention dans son ouvrage.

Je tiens très-peu, au surplus, à la propriété de ma construction, que tout bon écolier aurait pu trouver comme moi, et dont je n’aurais certes pas fait bruit, si un travail plus étendu ne m’avait conduit à la mettre en œuvre ; mais je dois tenir beaucoup à ne point être injustement accusé de plagiat.

Agréez, etc.

Grenoble, le 10 d’août 1813.

  1. On démontre que toute équation
    (1)

    dont le dernier terme est négatif, admet toujours au moins une racine que l’on peut représenter comme il suit :

    (2)

    or, pour qui est familier avec la marche de l’algèbre, il est clair que, si la valeur (2) rend l’équation (1) identique, la valeur

    (3)

    produira le même effet sur l’équation

    (4)

    Cette assertion pourrait, au surplus, se prouver comme il suit : soit mis le résultat de la substitution de (2) dans (1) sous la forme

    (6)

    étant des fonctions de  ; cette équation (6) devant se vérifier d’elle-même, sans aucune détermination de on doit avoir

     ; (7)

    mais, si (6) est le résultat de la substitution de (2) dans (1), celui de la substitution de (3) dans (4) sera incontestablement

    (8)

    or, en vertu des équation (7), l’équation (8) est identique ; donc, en effet, (3) résout (4).

    La difficulté de cette théorie se trouve donc encore, comme celle de tant d’autres, ramenée à ceci : Toute fonction peut-elle légitimement être supposée développée suivant les puissances entières et positives de l’un des symboles qui la composent ?

    Au surplus, si l’on ne trouvait rien à objecter contre la théorie développée par M. de Maizière, à la page 368 du premier volume de ce recueil, on en pourrait peut-être déduire une démonstration du théorème de M. du Bourguet.