À l’assaut du Pôle Sud

Voyages et aventures
dans les régions antarctiques
1599 — 1906
(pp. 19-34)
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I

À TRAVERS LES RÉGIONS ANTARCTIQUES

La première découverte antarctique. — Le hasard. — Un marin. — Aux frais des marchands. — Jusqu’en 1772. — La compagnie de Pierre van der Hagen. — L’expédition des cinq navires de Rotterdam. — Simon de Cordes. — Le yacht Blyde Boodschap. — Le 16 juin 1598. — Au détroit de Magellan. — Au 64e parallèle sud. — Au cap des Vierges. — Les Sebaldines. — Les Malouines. — Un grand géographe. — Dirck Gherritz. — Au XVIIIe siècle. — Bonnet, Marion et Crozat. — Le capitaine Cook. — En janvier 1794. — Les explorations des XVIIIe et XIXe siècles. — Découvertes de nouvelles terres. — Les baleinières. — Grandes expéditions.

Il y a à peine un peu plus de trois siècles qu’eut lieu la première découverte antarctique. Elle fut faite par un marin hollandais et elle est due, d’ailleurs, au hasard, qui fait souvent bien les choses[1].

On sait qu’à cette époque, les Hollandais venaient de nouer de fructueuses relations de commerce avec les Indes Orientales[2]. Il y avait eu plusieurs expéditions équipées aux frais des riches marchands d’Amsterdam[3], et qui avaient accompli avec succès le périlleux voyage des Indes par le Cap de Bonne-Espérance[4].

Il arriva que, stimulés par ces exemples, des négociants de Rotterdam voulurent à leur tour organiser des expéditions pour les Indes Orientales ; mais écoutant les conseils du célèbre géographe Pierre van der Hagen, ils s’associèrent sous la raison sociale « Compagnie de Pierre van der Hagen » et équipèrent, à leur tour, une belle escadre.

Ne voulant pas faire comme les bourgeois et les marchands d’Amsterdam, ils donnèrent l’ordre au chef de leur escadre de se rendre aux Indes, non plus par la route du Cap suivie jusqu’alors, mais par la route tracée par Magellan[5].

À cette époque troublée, on armait — par précaution — en guerre toutes les expéditions commerciales et l’escadre de « l’Expédition des cinq navires de Rotterdam » avait embarqué un effectif de cinq cents hommes, marins et soldats placés sous le commandement supérieur de l’amiral Jacques Mahu et du vice-amiral Simon de Cordes[6].

C’était le plus petit des bâtiments de cette escadre, le yacht Blyde Boodschap qui devait faire la première découverte des terres australes. Ce navire, qui ne jaugeait que 75 tonnes, portait 56 hommes d’équipage, commandés au début de la campagne par Sebald de Weerdt (ou Weert[7]).

Le 26 juin 1598, l’escadre mettait à la voile ; mais ce ne fut que le 6 avril de l’année suivante, après une pénible traversée, que les cinq navires arrivèrent au détroit de Magellan.

Le chef de l’escadre, Jacques Mahu, était mort en route, et avait été remplacé par le vice-amiral de Cordes qui, à son tour, avait été remplacé par Sebald de Weerdt.

Le yacht Blyde Boodschap avait alors reçu comme commandant Dirck Gherritz, marin expérimenté, qui avait déjà fait vaillamment les voyages au Japon, pour le compte de compagnies portugaises.

Le 8 avril, l’escadre franchissait le goulet du détroit de Magellan.

Des vents violents et contraires ne tardèrent pas à l’assaillir, et le vice-amiral décida d’hiverner dans le détroit. L’hivernage fut rude, et une centaine d’hommes environ périrent en cet endroit.

Enfin, le 3 août, l’escadre pénétrait dans l’Océan Pacifique.

Mais là, ne devait pas se trouver la fin des ennuis, comme on le croyait, et des tempêtes firent subir à la flottille de grosses avaries.

Le yacht Blyde Boodschap fut désemparé, et on ne parvint qu’à grand’peine à le remettre en état.

Un mois plus tard, le 10 septembre, une violente tempête dispersa la petite flottille, et le Blyde Boodschap, jeté violemment hors de sa route, se trouva seul et atteignit le 64e degré parallèle sud, où son commandant, Dirck Gherritz, aperçut avec étonnement une terre présentant des montagnes élevées couvertes de neige, « comme dans le pays de Norvège ».

Cette terre était la première terre découverte de celles qui font partie des archipels et des terres des régions du Pôle Sud.

Dirck Gherritz réussit à gagner une latitude plus clémente, et, quelques semaines plus tard, il parvenait dans la baie de Valparaison ; mais il n’avait plus à son bord que neuf hommes encore valides.

De son côté, de Weerdt qui se trouvait sur le Troun, cherchait à regagner l’Europe. À quelque distance du détroit de Magellan, dans l’est du cap des Vierges, il découvrit, le 24 janvier 1600, trois petites îles qu’il plaça sur ses cartes par 50° 40’ sud, à environ 76 lieues du continent et auxquelles il donna le nom de Sebaldines. Ces îles faisaient partie du groupe qui devait, par la suite, recevoir les noms de Malouines et de Falkland[8].

Le premier géographe qui ait mentionné la découverte fortuite de Gherritz, est Gaspard van Baerle, qui joignit à la traduction latine qu’il publia, en 1622, de la Historia General de las Indias Occidentales de Herrera[9], un résumé des voyages faits au détroit de Magellan.

Avec le dix-huitième siècle, devaient commencer des découvertes sérieuses et les hardis pionniers du Pôle Sud devaient devenir assez nombreux.

En tête, se présente un Français, Bouvet, qui, en 1739, découvrit l’île qui porte son nom.

Puis vinrent deux autres Français, Marion et Crozet, qui, en 1772, rencontrèrent, au cours de leur exploration, un nouveau groupe d’îles qui a également gardé le nom de ses découvreurs.

Le quatrième de ces pionniers que nous avons à citer est encore un Français, le capitaine Kerguelen[10].

En 1772, il découvrit dans l’Océan Indien austral, la grande île à laquelle il a donné son nom.

Ainsi, on le voit, c’est par quatre noms de voyageurs français que s’est ouverte, à l’avant-dernier siècle, l’ère des découvertes dans les parages des régions antarctiques et que se sont marquées les premières étapes vraiment sérieuses.

Après eux, devait venir un anglais célèbre, le capitaine Cook, qui, de 1773 à 1775, entreprit dans l’Océan Austral, avec les deux navires Adventure et Resolution, trois croisières restées célèbres dans les fastes géographiques.

Dans la première de ces croisières, en janvier 1774, il atteignit vers le sud-ouest de la Terre de Feu[11] le 71° 10’ de latitude, ce qui pouvait paraître extraordinaire pour l’époque.

Le grand navigateur fut vivement ému par la vue des paysages polaires, qui firent une profonde impression sur sa vive imagination.

Il décrivit, à son retour, et cela avec perfection, la formation des glaces et leur puissante action. Il eut le pressentiment qu’il existait, par delà, d’autres terres qui furent effectivement découvertes après lui dans la vaste zone mystérieuse.

Mais sa relation écrite n’était certainement pas faite pour encourager le zèle des futurs voyageurs en ces contrées désolées. Il osa même écrire : « Le danger qu’on court à reconnaître une côte dans ces mers inconnues et glacées est si grand, que j’ose dire que personne ne se hasardera à aller plus loin que moi, et que les terres qui peuvent être au sud ne seront jamais reconnues. »

Cook se trompait, et cela heureusement pour la science et la géographie !

Un Russe ouvre la liste des explorateurs célèbres du XIXe siècle. Bellingshausen, de 1819 à 1821, fit un important voyage de circumnavigation dans les mers australes. Il compléta les découvertes de son grand devancier en découvrant les deux petites îles d’Alexandre et de Pierre Ier.

À son tour, un baleinier anglais, nommé Weddell, atteignit en 1823, à l’aide de ses deux navires Beaufoy et Jane, le 74° 35’ parallèle.

Ce fut un heureux résultat qui exerça une espèce de réaction momentanée contre les idées de Cook.

Il avait trouvé un passage libre dans la mer de Georges IV (longitude 34°) et dans lequel il avait réussi à s’engager.

On rechercha longtemps ce passage dans les mêmes parages.

Un autre Anglais, Biscoe, en 1830-1832, tenta avec les deux navires Lively et Tula qu’il commandait, des découvertes dans les hautes latitudes du Sud.

Il découvrit les terres Adélaïde, Enderby, Graham.

En 1833, le capitaine Kemp, un Anglais encore, atteignit à l’aide de son schovner[12] Magpie, la terre à laquelle son nom est resté attaché. La terre de Kemp se trouve par le 57° de longitude.

Au cours des deux années 1838, 1839, deux Anglais, les capitaines Balleny et Freeman, à la tête des navires Scott et Sabina, découvrirent les îles Balleny, la côte Clarie, et ramenèrent l’attention des géographes et des hydrographes sur la question, qui paraissait oubliée, des régions antarctiques.

Leur voyage devait avoir un grand retentissement, car ces voyageurs allaient être cause de la reprise de recherches nouvelles.

En effet, à partir de ce moment, les marines françaises, anglaises, américaines, allaient glorieusement rivaliser pour faire de nouvelles découvertes, et, à la même heure, trois grandes expéditions nationales allaient lutter pour de nouvelles explorations.

L’expédition française, composée de deux navires, le Zélé et l’Astrolabe, fut commandée par le célèbre Dumont d’Urville, qui, on le sait, a fait le tour du monde et est mort dans un accident survenu sur le chemin de fer de Saint-Germain.

De son premier voyage, en 1837, l’amiral Dumont d’Urville n’avait rapporté qu’un seul important résultat : la découverte de la Terre Louis-Philippe.

Au cours de son second voyage, il découvrit la Terre Adélaïde, la Côte Clarie (qui avait déjà été aperçue par des Anglais), ce qui ajoutait des découvertes vraiment importantes à la géographie des régions antarctiques.

L’expédition américaine eut lieu en 1839-1840. Elle avait à sa tête le commandant Wilkes, qui avait sous ses ordres trois bâtiments et fit avec eux deux grandes expéditions au milieu de nombreuses difficultés. Il se rendit, d’ailleurs, dans les régions déjà visitées et explorées par le capitaine Balleny et l’amiral Dumont d’Urville.

Au cours de sa seconde expédition, l’explorateur américain découvrit la Terre de Wilkes[13].

James Ross[14], le célèbre explorateur anglais, devait voyager à son tour dans les régions antarctiques de 1839 à 1843.

Il avait, d’ailleurs, déjà fait ses débuts d’explorateur dans les mers glaciales du Nord, où il était sous les ordres de son oncle, le commandant John Ross (1829-1833).

La croisière anglaise de l’expédition, dont il avait le commandement et qui était composée des deux navires l’Erebus et la Terror, devait être des plus heureuses et des plus fertiles.

Elle fit la découverte de la Terre Victoria ; elle dépassa successivement les latitudes atteintes par Cook et Weddell. Ross découvrit les deux célèbres volcans qui reçurent les noms des deux navires dont nous venons de parler.

Au cours d’une seconde expédition excessivement périlleuse, James Ross atteignit enfin 78° 10’, latitude extrême qui ne devait être dépassée qu’en 1900 par le Norvégien Borchgrevink.

Enfin, une troisième fois, le célèbre explorateur anglais devait encore se diriger vers le Sud.

Cette suite de croisières des mers avoisinant le Pôle Sud est restée sans rivale.

James Ross devait aussi s’illustrer dans les régions arctiques à la recherche[15] des restes de l’expédition de sir John Franklin, en 1848[16]. Ce sont ces recherches des restes de Franklin qui l’ont surtout rendu célèbre.

À la suite de Ross, mentionnons l’Anglais Nares, qui, trente années plus tard (en 1873-1874), reprit la suite des voyages vers le Pôle Sud. Il commandait le Challenger, qui fit de nombreuses et remarquables études au point de vue de l’hydrographie, de la botanique et de la zoologie, et enrichit les sciences naturelles de nombreux documents nouveaux.

Depuis une quinzaine d’années, les baleiniers ont étendu leur terrain de chasses aux mers antarctiques. Les baleiniers écossais ont été les premiers à donner l’exemple.

En décembre 1892, un de leurs bâtiments, l’Active, a trouvé de nombreuses baleines. Le docteur Donald a raconté qu’à plusieurs reprises l’Active avait heurté plusieurs de ces cétacés qui sont abondants et peu farouches dans les eaux qui avoisinent l’île de Joinville et celle de Dundee.

Un jour, on n’aperçut pas moins de trente de ces animaux. Une autre fois, le docteur Donald vit un balénoptère long de 25 mètres sauter hors de l’eau comme un saumon.

En 1893, le Jason[17] faisait un nouveau voyage dans les terres australes sous la direction du capitaine Larsen.

Le 9 décembre, Larsen découvrait une île qu’il appela Veiro (Île du Temps). L’après-midi du même jour, il passa auprès d’une île qu’il nomma l’Île Robertson en l’honneur de l’un des propriétaires du navire sur lequel il naviguait.

Le surlendemain, 11 décembre, l’atmosphère s’étant éclaircie, il avait la chance de découvrir encore un îlot volcanique qu’il baptisa Lurdenberg Sukkestop.

Débarquant sur la banquise en compagnie de son second, et chaussé de « skis[18] », Larsen et son compagnon atteignirent l’îlot. Ils rencontrèrent de nombreux phoques, et, en ayant tué plusieurs, ils trouvèrent dans l’estomac de quelques-uns les restes d’un poisson ressemblant au merlan.

Tel était l’état des découvertes australes lorsque le commandant de Gerlache résolut de faire une expédition sur le Belgica.

De Gerlache, avec le Belgica (1898-1899), explora le Shetland, le sud de la terre de Graham, et donna une impulsion nouvelle aux explorations de ces régions si peu connues, si mystérieuses, et qui sont cependant si attrayantes.

Nous raconterons plus loin, avec détails, les principaux faits de cette expédition remarquable qui a excité l’enthousiasme du grand géographe Élisée Reclus.

« Tout d’abord, dit-il, constatons le fait qui devra de siècle en siècle ramener le nom de la Belgica parmi ceux des navires qui visitèrent les terres australes : M. de Gerlache et ses vaillants compagnons sont parmi tous les hommes les premiers qui aient hiverné dans la zone glaciale du Sud au-delà du cercle polaire.

» Pendant treize longs mois ils ont vécu, ou plutôt ils ont réussi à garder le souffle et le mouvement, dans la grande prison de glace, dans la banquise qui dérivait de çà et de là. N’ayant pas eu la chance de trouver, soit la mer libre, soit un promontoire favorablement situé, qui leur permît de passer le long hiver en de meilleures conditions d’économie vitale, il leur fallut rester dans leur navire, mordus par la mâchoire de glace, entendre sans cesse le craquement des flardes entrechoquées, la rumeur sourde de tout cet univers de fraisis cristallin qui se brise et se regèle, participer jusque dans la moelle des os à tous les chocs que subissait la membrure du navire, travailler constamment à le dégager des situations périlleuses, lui éviter le heurt des blocs et des monts de glace, et s’accommoder le moins mal possible à ce va-et-vient de la dérive, qui les promena en ligne brisée sur un espace de 2,000 kilomètres[19]. »

En 1900, à son tour, un Norvégien résolut de suivre l’exemple montré par de Gerlache.

Borchgrevink, dont nous relatons d’autre part le voyage, se mit à la tête de l’expédition anglaise de la Soulthem-Cross, la Croix du Sud, qui, par terre, dépasse de quarante milles (78° 50’) la latitude que James Ross avait atteinte dans les mêmes parages.

C’était lui qui détenait alors le record vers le Pôle Sud. Son expédition endura aussi parfois de dures souffrances, et les explorateurs ne durent souvent leur salut qu’au hasard.

En août 1901, un vapeur, le Morning, chargé de ravitailler l’expédition anglaise de la Discovery, quittait l’Angleterre.

Le 23 janvier de l’année suivante, il attaquait la banquise antarctique dans le sud de la Nouvelle-Zélande, et, après une lutte gigantesque, arrivait enfin à cette terre Victoria, ce morceau du continent antarctique découvert, il y a près de quatre-vingts ans, par l’Anglais Ross.

Au cours de l’été antarctique, on fit de périlleuses expéditions en traîneau, et, une fois les reconnaissances terminées, les explorateurs s’installèrent pour l’hivernage.

Au prix d’efforts inouïs, ils parvinrent ensuite à atteindre, au cours d’une exploration, le 80° 17’ de latitude sud. Ils avaient dépassé Borchgrevink, qui n’était arrivé qu’à 78° 50’.

Comme nous l’avons déjà vu dans les pages précédentes, une question importante pour la science a été résolue par les récents voyages dans les régions australes.

Les observations faites (comme cela a été fait d’ailleurs aussi dans les régions boréales) ont confirmé ce fait que la terre a connu des froids plus intenses et que les glaces étaient jadis plus nombreuses auprès des pôles.

« Les observateurs, a dit un jour Élisée Reclus, au cours d’une conférence, les observateurs ont aussi mis hors de doute un fait capital dans l’Histoire géologique moderne de notre globe. Les terres qu’ils ont visitées portent toutes les traces d’une extension antérieure des glaciers.

» Les rivages de la Terre de Feu présentent en maints endroits des roches montonnées et des moraines[20] provenant de glaciers disparus ; l’île des États, qui n’a pas un seul champ de glace, offre sur tout son pourtour les marques d’un ancien revêtement de neiges et de névés[21] ; enfin, des terres antarctiques elles-mêmes se trouvent évidemment dans la période du recul des glaces.

» La calotte australe eut aussi des âges plus « glaciaires » que de nos jours, de même que la calotte boréale et probablement à la même époque. »

Aussi, la théorie qui prétend que les ossements ont été amenés là par un cataclysme, est aujourd’hui repoussée par tous les savants.

Un examen attentif démontre que l’époque glaciaire fut d’un caractère tout différent, en Europe par exemple, de celui qu’elle a eu en Asie et en Amérique, et que, tandis que des glaciers recouvraient les montagnes des îles britanniques et les plaines de l’Allemagne, des forêts de pins ombrageaient les îles de l’Océan antarctique, et les éléphants se multipliaient et pâturaient sur les bords d’un océan dont les vagues ne roulaient aucun glaçon !

Beaucoup de choses, d’après les savants de la nouvelle expédition, nous prouvent que l’Archipel antarctique a été submergé dans une période géologique très récente ; en effet, nous savons que des coquillages fossiles, de l’espèce de ceux qui vivent dans les eaux environnantes, se trouvent à des hauteurs assez grandes sur toutes les îles de l’Océan antarctique[22].


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Notes :
  1. « Jusqu’en 1772, les écrits publiés sur la zone des glaces australes ne sont qu’imagination fantaisiste et phraséologie imagée. Leurs auteurs y placent une contrée fertile s’étendant vers le nord dans l’Atlantique et le Pacifique, et qu’ils supposent habitée par une race étrange, possédant de l’or, des pierres précieuses et d’autres richesses en abondance.
    » C’est pour reconnaître l’existence de cette nouvelle « Terre Promise » que le capitaine James Cook y fut envoyé en 1772. Cook, avec cette ténacité qui caractérise toutes ses entreprises, navigua tout autour du globe en suivant d’assez près le cercle polaire antarctique pour convaincre le monde de ce fait que, si d’immenses terres existent à l’entour du Pôle Sud, ce devait être au-delà de la limite ordinaire des glaces. »
    (Docteur Cook.)

  2. Nom donné vulgairement aux deux grandes péninsules de l’Asie méridionale séparées par le Gange.
  3. Amsterdam n’était encore qu’un village au XIIIe siècle. Elle resta soumise à l’Espagne jusqu’en 1578 ; elle prit alors le parti des indépendants en lutte contre les Espagnols. Elle s’éleva à la plus haute prospérité à partir de cette époque jusque vers la fin du XVIIe siècle. Elle fonda une célèbre Banque ainsi que les fameuses compagnies des Indes orientales et occidentales. Ses marchands étaient considérés comme les plus riches bourgeois de toute l’Europe.
  4. À la pointe sud de l’Afrique, il fut vu pour la première fois par Barthélemy Diaz en 1496 et doublé par Vasco de Gama en 1497. Il avait été tout d’abord nommé Cap des Tempêtes. Ce fut le roi de Portugal Jean II qui changea ce nom en celui de Bonne-Espérance.
  5. Fernand Magellan, de son vrai nom Fernao de Magalhaes, était un célèbre navigateur portugais du XVIe siècle. Il avait d’abord servi le roi de Portugal aux Indes Orientales, sous Albuquerque ; mais, ayant eu à se plaindre d’une injustice, il avait quitté sa patrie pour passer, en 1517, au service de l’Espagne sous Charles-Quint. Chargé par cet empereur de diriger une expédition contre les Moluques, il conçut le hardi projet de se rendre à ces îles en prenant par l’ouest et en passant au sud de l’Amérique méridionale, alors que jusqu’à cette époque on n’y était allé que par la route de l’Est, en doublant le cap de Bonne-Espérance. Il obtint le commandement d’une petite escadre de cinq vaisseaux et il exécuta son projet à travers bien des obstacles. Parti le 20 septembre 1519, il découvrit, le 21 octobre 1520, le détroit qui porte son nom.
  6. À cette époque, le titre d’amiral n’était pas exclusivement militaire. On le donnait au chef des flottes commerciales équipées par les compagnies hollandaises ou anglaises et le chef pouvait même ne pas être un marin.
  7. Sebald de Weerdt, navigateur hollandais, compagnon de de Cordes, donna son nom à trois îles du détroit de Magellan. La relation de son voyage a été traduite du hollandais en latin par Debry, Grands Voyages, 9e partie, et en français dans le Recueil des Voyages de la Compagnie des Indes.
  8. Ces îles qui avaient été reconnues pour la première fois par le voyageur Davis, en 1592, furent souvent découvertes et redécouvertes, baptisées, débaptisées, puis rebaptisées par les explorateurs ; d’où leurs divers noms : Eaws Southernland, Hawkin’s Maidenland, Sebaldines, Papy’Island[sic], Belgia Australis, îles de Saint-Louis, Malouines, îles Nouvelles, îles Falkland. On dit qu’Améric Vespuce en avait eu connaissance, mais qu’il pensait que ces îles étaient rattachées au grand continent américain.
  9. Antonio de Tordesillas, appelé Herrera du nom de sa mère, fut un célèbre historien espagnol, né en 1559 ; il mourut en 1625. Il est considéré comme l’un des meilleurs parmi les anciens historiens de l’Espagne. Étant allé en Italie, il fut, à la recommandation du duc de Mantoue, nommé par Philippe II premier historien des Indes et de Castille, et secrétaire d’État. On lui doit de nombreux ouvrages.
  10. Kerguelen était breton. Il vécut de 1745 à 1797.
  11. La Terre de Feu est un archipel de l’Amérique du Sud, à l’extrémité méridionale, séparée du continent par le détroit de Magellan, au sud-est de l’île des États par le détroit de Le Maire ; les points extrêmes sont, au nord-est, le cap Catherine ; au nord-ouest, le cap Pilar ; au sud-est, le cap San-Diego ; au sud, le cap Horn. Longueur totale : 850 kilomètres. C’est une région triste, désolée, presque toujours enveloppée de brumes humides et glacées. Sol nu et aride, couvert de mousses et de lichens ; peu d’arbres ; il y a de grands amas de neige dans les parties élevées. Les forêts y sont rares ; on y trouve des hêtres et différentes espèces d’arbres ressemblant assez au laurier. Comme animaux, on y trouve des renards, des guanacos, des loutres, des pingouins, des phoques.
    Les îles principales sont : la Terre de Feu, qui contient des bois et quelques pâturages (cette île a donné son nom à l’archipel) ; la Terre de Désolation ; au nord-ouest, Clarence, Stewart, Londonderry, Navarin, Wolaston, Horn. La population est d’environ 4,200 habitants.
    Cet archipel a été découvert en 1520 par Magellan puis en 1578 par Drake ; visité en 1615 par Le Maire qui en détermina la position et la forme. En 1618, les frères Nodal, en 1679 Wood, en 1761 Byron, en 1768 Cook le visitèrent tour à tour.
    En 1826, puis en 1835, l’Amirauté anglaise fit faire une reconnaissance de cet archipel par les capitaines King et FitzRoy ; Dumont d’Urville le traversa en 1837 avec l’Astrolabe ; en 1850, une expédition tentée dans le but de civiliser les Fuégiens échoua.
  12. Schovner ou schvoner, petit bâtiment possédant deux mâts et gréé en goëlette, c’est-à-dire en bâtiment bon pour la course.
  13. Cette découverte devait lui être contestée, d’ailleurs, par l’anglais Ross ; mais c’était une simple question d’amour-propre national.
  14. Sir James Clark Ross (1800-1862), célèbre marin anglais, neveu de sir John Ross. Capitaine en second, il entreprit en 1843 une expédition au Pôle Sud, pour observer les phénomènes du magnétisme terrestre.
  15. Sur les deux navires l’Enterprise et l’Investigator.
  16. John Franklin (1786-1847). Navigateur, né à Spisby (Lincoln), mort dans les mers polaires. Il accompagna John Ross (1818) dans son voyage à la recherche d’un passage au nord de l’Amérique et commanda lui-même plusieurs expéditions dans les mêmes parages. Parti en 1845 avec deux navires l’Erebus et la Terror pour un voyage dans les mers polaires, depuis le 16 juillet, jour où il fut rencontré par un baleinier dans la baie de Melville, on ne reçut plus aucune nouvelle de lui. Dix-huit expéditions furent faites pour retrouver ses traces. Ce fut seulement en 1859 que le lieutenant Hobson trouva dans l’île du roi Guillaume un parchemin donnant l’itinéraire de l’infortuné marin jusqu’au 11 juin 1847, jour de sa mort.
    John Franklin eut deux femmes dont le nom mérite d’être conservé. La première Eleanor-Anne Porden (1795-1825) a publié plusieurs poésies remarquables. La seconde, Jane Griffin (1794-1875), s’est illustrée par la constance avec laquelle elle a consacré sa vie et sa fortune à provoquer à organiser des voyages d’exploration à la recherche de son mari.
  17. Le navire le Jason fut le même qui avait conduit l’exploration Nansen à la côte Est du Groënland en 1888.
    C’est ce bâtiment que le duc des Abruzzes devait acheter en 1898 et qu’il baptisait du nom de Stella Polare pour son expédition à la Terre de François-Joseph. C’est, on le voit, un navire désormais historique.
  18. Patins à neige norvégiens.
  19. Quant au théâtre spécial des découvertes de la Belgica, le détroit qui portera désormais le nom glorieux de l’explorateur de Gerlache a été parcouru de long et en large avec le plus grand soin, dans tout son développement d’environ 250 kilomètres, du nord-est au sud-ouest.
  20. On donne, en géologie, le nom de moraines aux débris de roches qui s’amassent sur les côtés ou au pied d’un glacier.
  21. On appelle du nom de névés les amas de neige qui n’ont pas encore été transformés en glaciers.
  22. Voici ce que disait le docteur Kane, à la suite de voyages dans les régions arctiques.
    « … Il n’y a pas de doute pour moi qu’à une époque encore dans la limite des temps historiques, le climat de cette région était plus doux que maintenant. Je pourrais baser cette opinion sur le fait, mis en relief par notre expédition, du soulèvement séculaire de la ligne de côte. Mais, indépendamment des anciennes plages et terrasses, et d’autres marques géologiques, qui montrent que le rivage s’est élevé, des huttes de pierres sont éparpillées tout le long de ces parages, dans des lieux maintenant entourés de glaces, au point d’exclure la possibilité de la chasse, et par conséquent, pour les peuplades qui en vivent, la possibilité d’y demeurer. La tradition signale ces parages comme ayant été autrefois des champs favorisés par la chasse. Au haut Remsolan, appelé par les indigènes Annakok ou la place du dégel, nous trouvions des huttes en bon état de conservation. »