Victor Devaux & Cie (p. xiii--).
ITINÉRAIRE ABRÉGÉ
des
VOYAGES ET MISSIONS
DU RÉVÉREND PÈRE
P. J. DE SMET,
de la Compagnie de Jésus.



1821 à 1842.


1821. — Au mois de juillet 1821, M. Charles Nerinckx, missionnaire du Kentucky, aux États-Unis, quitta une seconde fois la Belgique, sa patrie. Il était accompagné de neuf de ses compatriotes, parmi lesquels se trouvait M. P. J. De Smet, alors élève des humanités sortant du petit séminaire de Malines [1]. Ce voyage inaugura les longues pérégrinations de celui que la Providence destinait à être plus tard l’apôtre des tribus sauvages de l’Amérique septentrionale. Né à Termonde (Belgique), le 31 janvier 1801, P. J. De Smet avait atteint sa vingt et unième année. Il traversa la Hollande, visita Breda, Berg-op-Zoom, Utrecht, Amsterdam, l’île de Wieringen et celle de Texel. Là il s’embarqua pour les États-Unis à bord du navire Colombus.

Le 15 août, les futurs missionnaires passèrent près du Helder et entrèrent dans la mer du Nord. Ils virent les îles de Færoe, et arrivèrent, par un vent favorable, au nord de l’Angleterre. C’était pour tous, sauf M. Nerinckx, leur premier voyage de mer. Ils traversèrent l’océan Atlantique, franchirent les fameux bancs de Terre-Neuve ; et après une navigation de quarante jours, parvinrent à l’embouchure de la Delaware, et débarquèrent à Philadelphie, ville principale de l’État de Pennsylvanie.

La religieuse troupe de voyageurs se rendit bientôt à Baltimore, en bateau à vapeur, puis, par diligence, à Washington et à Georgetown.

Ce fut à Georgetown que le P. De Smet entra dans la Compagnie de Jésus, avec six de ses compagnons. Ils restèrent dix-huit mois au noviciat de Whitemarsh, dans le comté du Prince George, près de la rivière Patuxent et à dix-huit milles anglais d’Annapolis.

1823. — Le P. De Smet et ses six compagnons belges quittèrent Whitemarsh. Ils furent accompagnés par les PP. Van Quickenborne, de Gand, et Timmermans, de Turnhout, qui, à la demande de Mgr. Du Bourg[2], alors évêque

de la Louisiane et du Missouri, étaient envoyés à Saint-Ferdinand (Florissant), près Saint-Louis, au Missouri, afin de fonder dans l’Ouest le premier établissement de Jésuites érigé depuis la suppression de la Compagnie de Jésus.

Les voyageurs passèrent par Baltimore, Tonnytown, Emmitsburg, Fredericktown, Canowago, Cumberland ; par les villes et les villages situés dans les monts Alleghanys jusqu’à Wheeling. Cette dernière ville est située sur les bords de l’Ohio, surnommée la Belle Rivière. Tout ce voyage fut fait à pied, le bâton à la main et le trousseau sur le dos. Les catholiques, dépourvus de prêtres, voulaient partout retenir les jeunes religieux. Les protestants les regardaient comme de pauvres aventuriers ou chercheurs de fortune, et, eu égard à cette qualité, faisaient des offres avantageuses pour qu’ils s’établissent dans leur voisinage. Les novices s’embarquèrent à Wheeling sur deux bateaux, ou bacs flottants, qui ressemblaient à deux petites cabanes rustiques attachées ensemble. La messe y fut célébrée journellement et tous les exercices du noviciat observés fidèlement. Ils s’arrêtaient chaque jour pour acheter des provisions, et passèrent ainsi sur les territoires des États de Kentucky, de l’Ohio et de l’Indiana.

Cincinnati, Louisville, Madison, etc., étaient alors au berceau. Chaque bord des fleuves était couvert de forêts en apparence impénétrables.

Aujourd’hui les rives de l’Ohio fourmillent de villes, de villages et de belles et grandes habitations… On reprit le bâton du voyageur à Shawneetown, on traversa à pied la partie méridionale de l’État des Illinois, et on arriva enfin, exténué de fatigue, sur les bords du plus grand fleuve de l’Amérique du Nord, le Mississipi, ou le père des eaux, découvert, en 1673, par le P. Marquette, de la Compagnie de Jésus[3].

Le fleuve fut traversé, vis-à-vis de Saint-Louis, ville qui alors contenait à peine 5,000 habitants. Après avoir pris quelques jours de repos dans la maison de l’évêque, les sept novices se rendirent à Saint-Ferdinand, situé à quinze milles de Saint-Louis, pour y finir leurs deux années de probation, et jeter les fondements d’un second noviciat de la Compagnie, aux États-Unis. Ils firent leurs études de philosophie et de théologie, jusqu’en 1827, année de leur ordination. Dans l’entre-temps le nombre des Jésuites s’augmentait chaque année et des églises furent érigées : à Saint-Charles, Portage-des-Sioux, Dardenne, Saint-Ferdinand, etc. — Le Père De Smet fut employé dans ces différentes missions. — En 1830, les Jésuites jetèrent les fondements de leur université de Saint-Louis dans la ville de ce nom (Saint-Louis University).

1833. — Le P. De Smet fut envoyé en Europe par ses supérieurs pour des affaires de la Compagnie, et pour cause de santé. Il traversa en diligence les États des Illinois, l’Indiana, l’Ohio, la Virginie, le Maryland, le District de Colombia, la Pennsylvanie, le Delaware et New-York, où il s’embarqua pour le Havre-de-Grâce en France (Portus gratiæ). Ce deuxième passage de l’océan Atlantique s’effectua en dix-sept jours et demi. Il se rendit en Belgique par Rouen, Paris, Amiens et Lille.

1834. — Après avoir visité les principales villes de la Belgique, notre missionnaire s’embarqua, à Anvers, avec trois candidats pour se rendre en Amérique. Dans la mer du Nord et dans la Manche, il essuya de furieuses bourrasques. Le navire gagna les Downs pour s’y mettre à l’abri. Le P. De Smet fut transporté à Deal, dans un état très souffrant, causé principalement par le mal de mer, dont il avait été gravement atteint durant les tempêtes. Le médecin le jugea incapable, dans l’état où il se trouvait, de traverser l’Océan. Il se rendit à Margate en diligence, puis à Londres, en bateau à vapeur, et se dirigea ensuite par Cantorbéry, sur Douvres. Il traversa le Pas-de-Calais, et par Dunkerque et Lille, il rentra en Belgique.

1833 et 1836. — Il visita les principales villes de la Belgique et de la Hollande, et plusieurs parties de la France, dans l’intérêt des établissements américains, et pour subvenir aux besoins des jeunes candidats qui se préparaient à partir pour se rendre au noviciat du Missouri. Pendant ces deux années, il envoya plusieurs milliers de volumes et un grand nombre de beaux tableaux religieux à l’Université de Saint-Louis.

1837. — Le P. De Smet repartit de la Belgique pour les États-Unis, avec trois candidats. Il traversa la France jusqu’au Havre-de-Grâce, où il s’embarqua sur un paquebot américain. C’était la troisième fois qu’il traversait l’Atlantique. Après trente jours de voyage, on débarqua à New-York. — Nos voyageurs se rendirent à Philadelphie et par les divers chemins de fer et canaux qui passent par les monts Alleghanys ils arrivèrent à Pittsburg sur les bords de l’Ohio. — De là ils descendirent la rivière en bateau à vapeur jusqu’à son embouchure, et remontèrent le Mississipi jusqu’à Saint-Louis, après avoir visité le séminaire de Barrens, qui est sous la direction des Lazaristes. Le Père arriva enfin, avec ses trois candidats, au noviciat établi près de Saint-Ferdinand.

1838. — Le Père De Smet fut envoyé parmi la nation des Potowatomies avec un Père et deux Frères. Tout le trajet se fit en bateau à vapeur. Chemin faisant, les missionnaires visitèrent les Kickapous, les Sancs, les Iowas, les Ottoes, les Missouris et les Omahas. Ils érigèrent une résidence et une petite église en bois, en l’honneur de saint Joseph, à six milles au nord de la rivière du Missouri, à deux milles de la petite rivière aux Maringouins et dans le voisinage de Belle-Vue. Au bout de quelques mois, cette petite chrétienté comptait au delà de trois cents personnes, et presque tous les petits enfants furent régénérés dans les saintes eaux du Baptême, ainsi qu’un bon nombre d’enfants parmi les Ottoes, les Omahas et les Pawnees. Cette partie du territoire indien est aujourd’hui enclavée dans l’État de Iowa.

1839. — Notre missionnaire fit une excursion parmi les Dacotahs ou Sioux, principalement les Yanctons et les Sautées, qui étaient alors en guerre avec les Potowatomies, auxquels ils avaient récemment enlevé plusieurs chevelures. Il les rencontra sur la rivière Vermillon. Les Sioux le reçurent avec des marques sincères d’amitié, écoutèrent avec plaisir ses entretiens sur la religion, et acceptèrent les propositions de paix que le Père leur lit au nom des Potowatomies. Après avoir baptisé plusieurs enfants métis et indiens, il descendit, accompagné de deux hommes, le Missouri en canot, ou tronc d’arbre creusé, et arriva à la mission de Saint-Joseph. Comme on manquait de provisions, d’habits, d’outils nécessaires pour la nouvelle résidence, le Père fut envoyé en décembre, c’est le fort de l’hiver dans ces parages, à Saint-Louis, pour obtenir les secours indispensables. Il fit tout le trajet par terre, à pied, à cheval, en chariot ou charrette et en voiture. Il passa par Weston, par le fort Leavenworth, Westport, Indépendance, Lexington, Boonville, Jefferson, Uniontown, etc., et arriva à Saint-Louis quelques jours avant la nouvelle année.

1840. — Après que le Père eut préparé tout le nécessaire pour son retour parmi les Potowatomies et qu’il fut sur le point de partir, le P. Hoeken fut nommé à sa place et envoyé à la mission de Saint-Joseph. Le Père De Smet reçut ordre de ses supérieurs de se rendre aux montagnes Rocheuses, en compagnie de deux Indiens qui avaient été députés à l’évêque de Saint-Louis, par la nation des Têtes-plates et des Pends-d’oreilles, pour obtenir des missionnaires catholiques.

Il partit au mois d’avril, en bateau à vapeur, et fit le trajet jusqu’au petit village de Kansas, situé près de l’embouchure de la rivière du même nom[4]. À Westport, il rejoignit une compagnie de négociants en pelleteries. Il entra bientôt, et pour la seconde fois, dans les vastes plaines de l’Ouest de l’Amérique du Nord. Il traversa les pays des Delawares, des Shawnees, des Kansas, des Pawnees, des Cheyennes, des Rapatas, des Dacotalis, des Corbeaux et des Serpents. Dans la vallée de Nébraska, ou rivière Platte, le Père et ses compagnons campèrent au pied de rochers que tous les voyageurs saluent avec étonnement, et qu’on appelle, le Château, la Tour, la Cheminée. Le Père, comme les rares voyageurs qui visitent ces parages, traça son nom sur le fameux roc Indépendance, qui sert comme de registre du désert. Ce roc s’élève sur les bords de la Rivière-Sucrée, tributaire de la branche du Sud de la Platte. Sur son chemin, il visita le fort Laramie, où il donna le baptême à un grand nombre d’enfants métis. Pendant environ douze jours, on longea le pied des Côtes-Noires, qui font partie des montagnes Rocheuses ; les cimes en sont couvertes de neiges éternelles ; plusieurs s’élèvent à 12,000 pieds au-dessus du niveau de la mer. On entra ensuite dans la vallée de l’Eau-Sucrée ; là on examina avec étonnement le passage que la rivière s’est frayé à travers un immense rocher, auquel on a donné la dénomination singulière de l’Entrée du Diable. Pendant plusieurs jours, on se trouva en vue des montagnes de la Rivière-au vent, avec leurs cimes glacées et couvertes de neiges. On franchit le Passage du Sud, le sommet des terres, qui divise les eaux de l’Atlantique de celles de la mer Pacifique. Sur le Rio-Colorado de l’Ouest, ou rivière Verte, qui se décharge dans le golfe de la Californie, nos voyageurs rencontrèrent une bande de la nation des Têtes-plates. Un grand nombre de Shoshonies et tous les chasseurs de castors s’y étaient réunis avec leurs familles indiennes, pour vendre leurs pelleteries aux négociants. Parmi eux se trouvait Jean De Velder, de Gand, qui avait passé environ quinze années parmi les Shoshonies, et qui, dès ce moment, suivit le Père De Smet et lui rendit de grands services dans ses longues courses. Tous les jours le Père disait la messe pour les chasseurs, leur prêchait, instruisait les enfants et les préparait à recevoir le baptême. Il eut le bonheur de le donner à un grand nombre d’entre eux. Ses guides Têtes-plates le conduisirent par des sentiers étroits et escarpés, à travers un labyrinthe de montagnes et de vallées, jusqu’au Vallon-à-Pierre, situé dans le voisinage des pics les plus élevés parmi les montagnes Rocheuses, appelés les Trois-Tetons. Les missionnaires dirigèrent leur course par monts et vallées vers la Rivière-au-Serpent, ou Fourche-à-Lewis, l’un des plus grands tributaires du fleuve Columbia. Ils le passèrent dans une espèce de bateau, construit avec des peaux. Chaque jour ils franchissaient des passages étroits, des plateaux élevés, de riantes plaines et des vallées ; souvent aussi on traversait des forêts de cèdres, de pins et de cyprès presque impénétrables, et des endroits rocheux, qui, à la première vue, paraissaient tout à fait inaccessibles. On campa près du lac Henri, d’où sort la rivière du même nom, et tributaire de la Rivière-aux-Serpents. C’est dans ce voisinage que le Père escalada la haute chaîne des montagnes Rocheuses. Il s’y trouva sur un plateau de neige d’où sortent plusieurs torrents, à peu de distance les uns des autres, et qui alimentent les eaux du Columbia à l’ouest et celles du Missouri à l’est. On se dirigea ensuite vers le lac des Maringouins, d’où sort la rivière de l’Eau-puante (eau sulfureuse), tributaire de la rivière de Madison, la fourche centrale des trois fourches qui forment le Missouri. Ici, comme sur l’autre bord, le sentier se déroulait à travers des gorges étroites, par monts et par vaux, jusqu’à la jonction des trois fourches du Missouri. Pendant les deux premiers mois que notre missionnaire accompagna les Têtes-plates et les Pends-d’oreilles dans leurs courses à travers les montagnes, il baptisa environ 600 de leurs petits enfants. Parmi les adultes baptisés dans ce voyage, se trouvèrent les deux grands chefs, nommés le Grand-Visage et la Piste-d’Ours, qui reçurent les noms de Pierre et de Paul. Chaque jour, il donnait deux instructions ; tous apprirent les prières ordinaires et se rassemblaient régulièrement le soir et le matin pour les réciter. Quand le Père fit ses adieux à ces bons Indiens, vingt chefs renommés parmi les braves voulurent l’escorter, à cause des grands dangers auxquels il aurait pu être exposé de la part de leurs nombreux ennemis ; surtout dans les parages appelés les champs de bataille indiens. Les missionnaires se dirigèrent, par un défilé de montagne d’environ cinquante milles, vers la rivière Roche-jaune, grand tributaire du Missouri. Ils descendirent ensuite, pendant plusieurs jours, la vallée de la Roche-jaune, puis ils traversèrent de hauts plateaux, ayant au sud les montagnes de la Rivière-au-vent, et au nord, les Montagnes-aux-Moules. Dans la vallée de la Grosse-Corne, grand tributaire de la Roche-jaune, ils rencontrèrent deux grands camps d’Asharokeys, ou Indiens Corbeaux, qui les reçurent avec la plus grande bienveillance. Nos voyageurs, continuant leur route dans la vallée de la Rivière-au-Vent, arrivèrent au fort des Corbeaux, qui est une maison de commerce de pelleteries, bâtie près de l’embouchure de cette rivière, sur le bord de la Roche jaune. Jusqu’ici les braves Têtes-plates avaient accompagné le Père. Ils retournèrent aux montagnes. Accompagné de Jean De Velder, le seul guide qui restât, le missionnaire, sans aucune connaissance du pays, muni d’une boussole et d’une carte, dirigea sa course vers le Fort-Union, situé sur le bord du Missouri, à trois milles au-dessus de l’embouchure de la Roche-jaune. Tout ce trajet fut fait en neuf jours, mais non sans courir de grands dangers de tomber entre les mains des partis de guerre. Au Fort-Union, comme au Fort-des-Corbeaux, le Père De Smet donna le baptême à un grand nombre d’enfants métis, et annonça pour la première fois la parole de Dieu dans un grand camp d’Assiniboins. Pendant sept jours, on suivit la vallée du Missouri pour se rendre au fort Berthold où l’on rencontra les tribus des Minataries, des Mandans et des Ricaries, qui reçurent le Père avec le plus grand respect et le plus vif empressement, en sa qualité de ministre du Grand-Esprit. Il dut assister à plus de vingt festins dans les loges des grands chefs, bien entendu avec la permission de louer une bande de mangeurs ; ces jeunes gens se prêtèrent volontiers à remplir leur besogne, et à faire honneur aux plats bien fournis, que les bons sauvages, dans leur respect pour la Robe-noire, eurent la bonté et la politesse de lui offrir. Les chiens rôtis et bouillis figurent toujours au menu dans ces sortes d’occasions. Au fort Berthold, le Père De Smet baptisa tous les enfants métis.

On mit dix jours environ pour se rendre au Fort Pierre Chouteau,[5] près de l’embouchure de la Mauvaise petite rivière. Le P. De Smet et ses compagnons prirent le large ; les sauvages de la tribu des Pieds-noirs les firent prisonniers. Cette fois-ci, tout de bon, ils eurent la pensée que leur dernière heure allait bientôt sonner. — Les Indiens emmenèrent les captifs dans leur camp ; le chef, à la tête de tous ses braves, les y reçut avec les plus grandes marques de respect, que les Peaux-rouges ne témoignent que dans les occasions les plus solennelles. Un grand festin termina cette rencontre et on en fut quitte pour la peur. Le Fort Pierre est le grand centre de toutes les maisons de commerce sur les eaux du Haut Missouri et un grand nombre de familles l’habitent. Comme dans les autres postes, le P. De Smet y baptisa tous les enfants. On employa huit jours à se rendre au fort Vermillon : il y eut encore des baptêmes à administrer. De là on se rendit en canot jusqu’à la mission de Saint-Joseph parmi les Potowatomies. Et, comme en 1839, on fit de nouveau le voyage de la mission jusqu’à Saint-Louis, tantôt à cheval, tantôt à pied ou en voiture. Vers la fin de décembre, le Père arriva en bonne santé à l’Université de Saint-Louis.

Il faut observer ici que, dans le désert, durant tout ce voyage, le missionnaire avait dormi chaque nuit à la belle étoile — sa soutane lui servait de tente dans les mauvais temps. — Quoiqu’il fût sans provisions, la sainte providence du Seigneur lui procura chaque jour la plus grande abondance : un buffle, ou un ours, ou un chevreuil, ou une grosse corne, et de plus une bonne variété de gibier.

Dans le mois d’avril de cette année, accompagné de deux Pères et de trois frères, le Père De Smet reprit, pour se rendre aux montagnes Rocheuses, la même route qu’il avait suivie l’année précédente, jusqu’au Rio-Colorado de l’Ouest. De là il se rendit par le vallon de Brown dans la vallée de la rivière à l’Ours, tributaire du grand lac Salé. — Arrivé aux fontaines de Soda, il entra dans un défilé des montagnes et gagna les hauteurs qui séparent les eaux du Grand lac de celles de la rivière aux Serpents. On défila par un passage étroit dans la petite vallée de la rivière Port-neuf et on arriva au Fort-Hall, sur les bords de la rivière aux Serpents. Les missionnaires, après avoir passé la rivière, traversèrent un désert sablonneux, pendant trois jours, souffrant beaucoup de la soif. C’est dans ce désert que se trouvent les trois grandes Buttes. Une belle vue s’y présente dans le lointain, celle des Trois-Tetons. Ils sortirent de ce désert de sable pour entrer dans un défilé qui les conduisit dans les montagnes du Koskooski — ils passèrent ensuite par le versant, à l’Est des monts Rocheux. On rencontra le camp Tête-plate et celui des Pends-d’oreilles dans la vallée de la Tête à Castor, tributaire de la fourche de Jefferson, une des trois qui forment le Missouri. Nos voyageurs repassèrent sur le côté ouest des montagnes et entrèrent dans la belle vallée de la Loge-au-Chevreuil, entourée de fontaines sulfureuses thermales. Ils la descendirent jusqu’à sa jonction avec la vallée de la Racine-Amère, appelé depuis, la vallée de Sainte-Marie. — (Cette jonction est connue dans le pays sous le nom de la Porte de l’enfer.) Ils entrèrent dans la vallée jusqu’à la distance d’environ trente milles et y commencèrent la Mission de Sainte-Marie, parmi les Têtes-plates. C’était vers la fin de Septembre. Le Père De Smet, manquant d’outils pour les travaux de l’agriculture, et de vivres pour passer l’hiver, se rendit, accompagné de quelques sauvages, au fort Colville, situé aux chutes des chaudières du Columbia, éloignées d’environ deux cents milles. Pour y arriver, on passe par la plaine de Camasle, par celle des Chevaux et par le lac Tête-plate ; on met quatre jours à traverser la grande forêt de cèdres et de pins qui longe la rivière Tête-plate. Le Père De Smet y mesura un cèdre qui avait sept brasses de circonférence. On y trouve des passages difficiles entre les rochers qu’on doit monter de six à sept cents pieds. On passe ensuite le long du lac Kalispel, à une distance d’environ quarante milles. On continue sa route jusqu’à la baie des Kalispels, on y traverse la rivière Tête-plate — on se rend au petit lac de la Baie — on traverse la grande chaîne des montagnes des Kalispels. — Puis on entre dans la vallée de la rivière au Moulin, et après une bonne journée de marche, on arrive au Fort Colville sur le bord du t Columbia situé à deux milles des chutes qui barrent le grand fleuve. Le Père De Smet y administra le baptême à un grand nombre d’enfants métis et sauvages. Et après y avoir fait l’achat nécessaire de provisions, de semences et d’outils, il reprit le même chemin pour retourner à la mission de Sainte-Marie. Il rencontra beaucoup de difficultés et de dangers dans ce voyage, à cause de la neige qui tomba en abondance. Les passages des montagnes et les traversées des rivières furent presque impossibles, et les chemins dans la grande forêt presque impraticables, surtout pour les bêtes de somme. On arriva enfin sans grands revers ni malheurs, sain et sauf, à la Mission. Dans ce trajet allant et venant de Colville, on rencontra plusieurs bandes de Kalispels ou Pends-d’oreilles, qui présentèrent au missionnaire tous leurs petits enfants, pour les régénérer dans les saintes eaux du baptême.

1842. — Dans le printemps de cette année, le Père De Smet quitta la mission de Sainte-Marie, et se rendit au fort Vancouver, et à la vallée de Wallamette, pour y conférer, avec le gouverneur de la compagnie de la Baie d’Hudson et avec le très-révérend M. Blanchet, administrateur de l’Orégon, sur les intérêts présents et futurs de nos missions dans les montagnes. Il dirigea sa course vers le lac Tête-plate. — Sur un petit tributaire, au dessus du lac, il visita un grand camp de Kooteneys ou Skalzi et y baptisa tous les petits enfants. Il traversa de nouveau la grande forêt sur les bords de la rivière Tête-plate, avec ses passes étroites et difficiles, et le long des bords du grand lac des Kalispels. Dans le voisinage de la baie des Kalispels, il reçut une députation de Stietshoi ou Cœurs-d’alêne, qui l’invitèrent à venir visiter leur nation. Le missionnaire acquiesça à leur demande et pendant trois jours ceux-ci le guidèrent à travers de forêts épaisses, par monts et par vaux, et ainsi il arriva enfin sur les bords du beau lac des Cœurs-d’alêne, ou toute la nation l’attendait. Elle le reçut avec tous les témoignages du plus grand respect et de l’amitié la plus sincère. Ils l’écoutèrent avec attention pendant les trois jours qu’il put seulement leur accorder. Ils y mirent tant d’empressement, qu’un bon nombre d’entre eux apprirent dans ce court espace les prières ordinaires. Tous leurs petits enfants eurent le bonheur de recevoir le saint sacrement du baptême.

Le Père De Smet traversa ensuite une grande partie du territoire des Cœurs-d’alêne, celui de la nation des Spokanes, et la vallée de la rivière au Moulin, et se rendit à Colville. Il descendit le fleuve Columbia en esquif. Dans les petites dalles, au-dessus du fort Okinakane, l’esquif fut engagé dans un tourbillon fort dangereux ; sur neuf hommes, cinq furent engloutis et noyés. Le Père visita les forts Okinakane et Wallawalla et y baptisa plusieurs enfants ; il passa au travers des grandes dalles et fit halte aux grandes cascades, où les eaux du fleuve sont turbulentes et agitées comme une mer en furie. Ensuite il arriva au fort Vancouver. De là, il s’engagea sur le Wallamette jusqu’aux chutes de cette rivière, où se trouve aujourd’hui la ville d’Orégon. Le missionnaire arriva enfin à la mission de Saint-Paul, résidence ordinaire du très-révérend M. Blanchet. Après avoir terminé ses affaires avec le supérieur ecclésiastique et le gouverneur de la compagnie de la Baie d’Hudson, il reprit le chemin des montagnes Rocheuses. D’abord il remonta le fleuve en esquif jusqu’au fort Wallawalla, ensuite il fit route à cheval, au travers des plaines et des déserts des Wallawallas, des Nez-percés et des Spokanes ; et enfin il visita les riches et belles terres et vallées dans la partie occupée par les Cœurs-d’alêne. Il traversa les montagnes des Cœurs-d’alêne et la vallée Sainte-Marie et revint à la mission… Il y prit tous les arrangements nécessaires pour commencer sans délai deux nouvelles résidences, une parmi les Kalispels de la baie, une autre parmi les Cœurs-d’alênes… Le supérieur ecclésiastique d’Orégon, le gouverneur, et tous les Pères prièrent le père De Smet de se rendre de nouveau dans les États afin d’obtenir des secours d’hommes et de matériel nécessaires au développement des missions et pour satisfaire à la demande et aux besoins des différentes tribus.

Accompagné de deux sauvages qui lui servirent de guides et de quelques chasseurs, il parcourut la vallée de Sainte-Marie jusqu’aux sources de la rivière. Il franchit le grand plateau qui sépare les eaux de la Colombie de celles du Missouri. Par la vallée de Jefferson, la fourche du Nord, il gagna la grande plaine des trois fourches du Missouri. Le missionnaire se rendit par le même défilé, comme en 1840, dans la vallée de la Roche-Jaune. Il rencontra un grand nombre d’Indiens de la tribu des Corbeaux, visita le fort, appelé de leur nom le fort Union, le fort Berthold, le fort Pierre, le fort Vermillon et un grand nombre d’Indiens de différentes tribus ; partout il baptisa les petits enfants en très-grand nombre, et les adultes que les maladies avaient mis en danger de mort. Il repassa par les mêmes villes et villages de l’Etat du Missouri pour se rendre à Saint-Louis, où il parvint sain et sauf bien avant dans l’automne de cette même année 1842.




  1. Charles Nerinckx naquit, le 2 octobre 1761, à Herffelingen dans la province de Brabant, Après avoir fait ses humanités au collège de Gheel dans la Campine, et suivi le cours de philosophie à l’Université de Louvain, il entra au séminaire de Malines en 1781. Ordonné prêtre en 1785, il fut nommé vicaire à la métropole de Malines. Il remplit cette fonction pendant huit ans. La cure d’Everberg-Meerbeke étant devenue vacante, il fut désigné pour occuper cette place par le suffrage unanime des examinateurs, qui, après le concours prescrit par le Concile de Trente en pareils cas, lui conférèrent la palme de préférence à tous les autres candidats. La paroisse se trouvait sous tous les rapports dans une condition déplorable, mais bientôt, par le zèle du nouveau curé, aidé de la bénédiction divine, elle devint un modèle pour toutes les autres.

    Il était naturel qu’un homme qui avait fait tant de bien fut observé d’un œil jaloux par les commissaires de la République Française dont les armées avaient récemment occupé la Belgique. Le digne curé ne tarda pas à être sous le coup d’un ordre d’arrestation. Il fut contraint de fuir et d’abandonner ses paroissiens. En 1797, il se cacha à l’hôpital de Termonde. Il y resta pendant sept ans et remplit en secret l’office de chapelain de l’hospice, son prédécesseur étant banni à l’île de Ré. Il disait la messe tous les matins à deux heures et se retirait ensuite avant l’aurore dans un lieu caché.

    Entouré de périls continuels et ne pouvant prévoir la durée de la terrible tempête qui bouleversait alors l’Europe, M. Nerinckx se décida à émigrer aux États-Unis. Il s’échappa donc et s’embarqua à Amsterdam le 14 août 1804. Il arriva à Baltimore au milieu de novembre 1804. Les origines catholiques de cette dernière ville sont trop intéressantes pour les passer sous silence.

    Ce fut le 29 mars 1634 qu’eut lieu la fondation de la première colonie d’émigrants au Maryland (États-Unis).

    En 1631, le roi d’Angleterre, Charles Ier, avait donné en

    fief, avec les droits régaliens à sir Georges Calvert, comte de Baltimore, et à ses descendants, un vaste territoire situé au nord de la Virginie, et qu’il appela Maryland (Terre de Marie) du nom de sa femme Henriette Marie, fille d’Henri IV. Baltimore voulait faire de cette concession une terre de refuge pour les catholiques persécutés, et il se disposait à partir pour l’Amérique, lorsqu’il mourut au mois d’avril 1632.

    Le second de ses fils, Léonard Calvert, reprenant ce projet, partit l’année suivante avec deux cents familles anglaises presque toutes catholiques. Quatre religieux de la compagnie de Jésus, dont un chapelain du noble Lord, accompagnaient les émigrants : les PP. André White, John Altham, Knowles et Tom Gerwack.

    Ils débarquèrent, le 29 mars 1634, à l’île Saint-Clément sur le Potomac qu’ils remontèrent avec deux petits navires, l’Arche et la Colombe, et fondèrent une ville qui reçut le nom de Baltimore. Mais revenons à M. Nerinckx.

    Ce digne prêtre avait à peine mis le pied sur le sol des États-Unis qu’il offrit immédiatement ses services au patriarche de l’Église américaine, l’évêque Carroll. Le digne prélat reçut le bon exilé à bras ouverts et l’envoya immédiatement à Georgetown. Peu après il fut dirigé sur le Kentucky et alla rejoindre le Rév. M. Badin, vicaire général, avec lequel il demeura sept ans à Saint-Étienne, se dévouant de tout son cœur à l’œuvre du saint ministère. Il semblait trouver ses délices dans les peines et les souffrances. Doué d’une constitution robuste et d’une force herculéenne, il ne s’épargnait pas, et Dieu préserva tellement sa santé qu’à l’âge de soixante ans, il semblait jouir de toute l’énergie et de toute la vigueur de la jeunesse. Il fit deux fois

    le voyage d’Europe, et n’érigea pas moins de dix églises au Kentucky surtout à l’aide des ressources provenant de la généreuse Belgique. Dieu bénit ses œuvres par des fruits si abondants et si permanents de salut qu’on vit une chrétienté florissante s’élever là où il y avait récemment un désert, habité seulement par des bêtes féroces et des hommes sauvages. « Le Christ crucifié » était le modèle de M. Nerinckx et le vrai secret de son grand et étonnant succès dans sa carrière apostolique. Le mérite transcendant de M. Nerinckx ne put échapper à l’œil attentif de l’évêque Carroll, qui recommanda le bon missionnaire au Saint-Siège pour l’évêché vacant de la Nouvelle-Orléans. Mais il refusa humblement et fermement l’honneur offert. Le Souverain Pontife se laissa vaincre par ses représentations et n’insista pas davantage pour lui faire accepter la dignité épiscopale.

    Parmi les établissements fondés par M. Nerinckx, celui des Sœurs de Lorette ou des amies de Marie au pied de la croix, fut le principal et le plus avantageux au diocèse de Kentucky. La fondation eut lieu le 25 avril 1812, presque une année après l’arrivée de Mgr. Flaget. En 1824, le nombre des religieuses Lorettines était plus de cent et elles étaient chargées de six écoles. Peu de temps avant sa mort, le vertueux missionnaire entreprit un voyage au Missouri pour y visiter une colonie de ses religieuses qu’il voulait encourager dans les voies de leur charité et de leur zèle pour l’instruction des jeunes enfants. Ce fut le dernier voyage du saint prêtre. À son retour de la résidence des Sœurs, il mourut, à moitié chemin, le 12 août 1824, à la

    demeure du Rév. M. Dahman, curé de Sainte-Geneviève. La

    fièvre à laquelle il succomba avait été contractée dans ses courses et ses travaux apostoliques. Le Révérend M. Nerinckx était entré dans sa 63me année. Le transport de ses restes mortels au monastère de Bethléem, dans le Missouri, eut lieu sous la direction de l’évèque Rosati, qui était venu à Sainte-Geneviève le lendemain de la mort du missionnaire ; il assista à son service funèbre, qui fut célébré avec une grande solennité. En 1833, on transféra la dépouille mortelle de M. Nerinckx dans le Kentucky ; elle fut déposée dans un beau monument érigé à Lorette au centre du cimetière conventuel de la maison mère des Lorettines. Telle fut la vie, telle fut la mort du révérend M. Charles Nerinckx, un des meilleurs prêtres qui aient jamais travaillé dans les dures missions de l’Amérique.

    (Note de l’Éditeur.)

  2. Louis Guillaume Du Bourg, né à Saint-Domingue, le 13 février 1766 3 fut sacré à Rome, en 1815 évêque de la Louisiane. Il se fixa à la Nouvelle-Orléans qui devint sa ville épiscopale et résidence habituelle. Dans une lettre à M. Du Bourg, de Bordeaux, son frère, il donne les détails suivants, en date du 6 août 1823 : « L’acquisition que j’ai faite des Jésuites pour le Missouri me tranquillise singulièrement pour ces quartiers éloignés. Ces bons Pères sont en possession de ma ferme de Florissant ; ils ont fait pour s’y rendre plus de 400 milles à pied, dont environ 200 à travers des pays inondés où ils avaient souvent de l’eau jusqu’à la ceinture ; et loin d’en murmurer, ils bénissaient Dieu de leur accorder un début aussi apostolique. Ils ont été agréablement trompés, ne s’attendant pas à trouver un aussi joli établissement ; car c’est ma politique de n’annoncer que de la misère à ceux que j’invite à venir partager mes travaux. Le surintendant des affaires des Indiens, de qui dépend beaucoup le succès de nos missions chez les sauvages, les a accueillis avec un vif et tendre intérêt, et se montre hautement le protecteur de leur établissement. Ces pères en effet, y compris leurs novices, sont bien faits pour inspirer la confiance. Un dévouement sans bornes, à l’épreuve des privations et des dangers les plus effrayants, s’unit en eux à une douceur et à des talents rares ; ils ne se plaignent de rien, ils sont contents de tout ; logés les uns sur les autres dans une petite maison, couchés sur des peaux, faute de matelas, vivant de maïs et de lard, ils sont plus heureux que le riche sur le duvet et dans les délices ; c’est qu’ils goûtent des délices d’un genre bien plus exquis, et qui ne s’allient pas avec la mollesse : il est de mon devoir cependant de leur procurer du moins le nécessaire de la vie pour eux-mêmes, et les moyens d’exercer et d’étendre leur zèle ; c’est en quoi j’espère être secondé par l’association de la Propagation de la Foi »
    (Note de l’Éditeur.)
  3. Joseph Marquette, né à Laon, fut missionnaire au Canada, dont il parcourut presque toutes les parties. Comme sa vertu le faisait respecter des Indiens, l’intendant Talon le choisit avec Jolliet, bourgeois de Québec, homme d’esprit et d’expérience, pour aller reconnaître de quel côté un grand fleuve situé à l’ouest des lacs et nommé Meschacébé ou Mississipi dirigeait son cours. On savait seulement que ce n’était ni au nord ni à l’est ; et l’on se promettait les plus grands avantages dans le cas où il irait à l’ouest ou au sud. Marquette et son compagnon s’embarquèrent, le 13 mai 1673, sur la rivière des Outagamis, qui se jette dans le lac Michigan, la remontèrent jusqu’à sa source, et descendirent le Wisconsin jusqu’au Mississipi par 42° 30’ de latitude nord. Depuis le 17 juin ils suivirent le cours de ce grand fleuve, dont la largeur et surtout la profondeur leur parurent répondre à l’idée qu’en avaient donnée les sauvages. Les voyageurs, arrivés au pays des Arkansas vers le 33e degré de latitude, considérèrent qu’avec cinq autres Français qui montaient leurs deux canots, la prudence ne leur permettait pas de trop s’engager dans un pays dont ils ne connaissaient pas les habitants. D’ailleurs ils ne pouvaient plus douter que le Mississipi n’eût son embouchure dans le golfe du Mexique : en conséquence ils remontèrent le fleuve jusqu’à la rivière des Illinois, où ils entrèrent. Arrivés à Chicago sur le lac Michigan, ils se séparèrent : Marquette resta chez les Miamis qui habitaient sur les bords du lac, et Jolliet alla rendre compte de son voyage à Québec. Les Miamis reçurent très-bien Marquette, qui vécut parmi eux jusqu’à sa mort, arrivée le 18 mai 1675, à l’instant où il venait de dire la messe près d’une petite rivière où il était entré allant de Chicago à Michillimackinack. Cette mort et le départ de Talon firent perdre de vue le Mississipi qu’un autre Français, Robert de la Salle, né à Rouen, descendit quelques années plus tard jusqu’à la mer.
    (Note de l’Éditeur.)
  4. Le Kansas est un territoire des États-Unis, entre celui de Nébraska au nord, les États du Missouri et de l’Arkansas à l’est, le territoire indien et le Nouveau-Mexique au sud, le Nouveau-Mexique et l’Utah à l’ouest. Les montagnes Rocheuses le séparent de l’Utah, et le Missouri forme une partie de sa frontière du nord. Le pays, surtout à l’ouest, est en grande partie habité par les Indiens nomades, entre autres les Pawnees, les Osages, les Shawnees. On y voit de vastes savanes et des forêts. Le climat est froid au S.-O., doux à l’E. — Le Kansas, découvert en 1719 par le Français Dussine, faisait partie du territoire cédé en 1803 par la France aux États-Unis. Détaché plus tard du territoire indien, il a été érigé en territoire spécial en 1854.
    (Note de l’Éditeur.)
  5. M. Pierre Chouteau était un catholique français qui, vers la fin du siècle dernier, émigra aux États-Unis et alla s’établir dans le Missouri. Il s’enrichit prodigieusement par le commerce des pelleteries et l’achat de terres non défrichées qu’il vendit à des prix très-rémunérateurs. Il laissa à ses héritiers une immense fortune. Son fils, M. Charles Chouteau, est aujourd’hui un des négociants les plus opulents de la ville de Saint-Louis. Dans un voyage que nous fîmes aux États-Unis en 1867-1868, le R. P. De Smet eut l’obligeance de nous présenter dans cette respectable famille.
    (Note de l’Éditeur.)