Voyage par le Cap de Bonne-Espérance à Batavia, à Bantam et au Bengale, en 1768, 69, 70 et 71.djvu/I/IV

CHAPITRE IV.

Départ de Batavia pour le Bengale.




Notre départ fut fixé au 12 août, au moins six semaines plutôt que je ne l’avois pensé, puisque ma première destination étoit pour Malacca, lieu vers lequel les vaisseaux ne partent qu’à la fin de septembre.

Pendant notre séjour à Batavia, on déchargea le vaisseau pour être radoubé dans l’île d’Onrust, d’où il revint, au commencement d’août, sur la rade de Batavia, afin d’y prendre sa cargaison pour la factorerie de Bengale.

Le 12 août, vers les huit heures du matin, nous appareillâmes, et dirigeâmes notre route vers l’île d’Onrust, ayant alors à bord soixante-quatorze hommes d’équipage. Nous saluâmes la rade par treize coups de canon, et en reçûmes trois de retour du vaisseau amiral. Ayant dépassé à neuf heures le Rhynlands-Droogte, appelé communément le Commandeurs Mantel, nous hissâmes le pavillon du grand mat, comme un signe de considération que le gouverneur-général vouloit bien accorder à un directeur de la Compagnie que nous avions à notre bord ; mais c’étoit là une faveur particulière ; car il est d’ordre de ne hisser qu’une flamme pour une personne de ce rang ; aussi le gouverneur-général m’avoit recommandé de n’arborer ce pavillon que quand nous serions arrivés à cette hauteur.

Vers les dix heures, nous fûmes contraints de mouiller, à cause du calme et du vent contraire. À cinq heures de l’après-midi, nous remîmes à la voile, et jetâmes de nouveau l’ancre à huit heures du soir près l’île d’Onrust.

Comme le tems n’étoit pas favorable le lendemain, nous restâmes en place ce jour-là, et reçûmes à bord quelques tonneaux d’eau fraiche qu’on nous envoyoit encore de Batavia.

Trois jours auparavant, le tonnerre avoit causé de grands dégâts dans l’île d’Onrust, au magasin à poudre, dont il avoit emporté entièrement le toit, sans avoir touché néanmoins à la poudre.

Le 14 août, nous fîmes voile au lever du soleil par un vent d’est, en dirigeant notre route entre la pointe d’Ontongh-Java et l’île de Middelbourg ; et ensuite entre l’île des Antropophages et le Groote-Combuis, vers la pointe de Bantam.

Vers les neuf heures du soir, nous jetâmes l’ancre devant la baie de Bantam, n’osant nous hasarder à aller plus avant à cause de l’obscurité.

Le matin à quatre heures, nous remîmes à la voile, et à midi nous nous trouvâmes près de l’île Dwars-in-den-Weg, où nous reçûmes à bord le délégué de la baie d’Anjar, qui nous céda quelques tortues. Comme le vent nous resta favorable, nous dirigeâmes, ce jour-là et pendant la nuit, notre route sur l’île de Kraketouw, et ensuite entre l’île du Prince et la pointe basse de Sumatra, pour entrer en mer.

Le lendemain, au lever du soleil, nous appercevions encore un peu l’île du Prince, où nous prîmes la hauteur du pays, et dirigeâmes à l’ouest-sud-ouest, jusque par le huitième degré de latitude méridionale ; d’où nous fîmes route droit à l’ouest, par un bon vent frais de sud-est qui nous chassoit rapidement. Le 26 août, nous étions, suivant notre estime, par la longitude de 10½°, à l’est de Ténériffe, ou deux cents cinquante milles au moins à l’ouest du détroit de la Sonde, d’où nous courûmes au nord-ouest, et ensuite plus au nord, vers la ligne, que nous passâmes le 2 de septembre.

Le 30 août, vers les quatre heures et demie du matin, nous apperçûmes, à l’est du ciel, une comète, dont la queue étoit tournée vers l’ouest-sud-ouest de la longueur de huit à dix degrés ; sa configuration étoit celle d’une plume à écrire. Le corps de la comète ressembloit à une étoile de la seconde grandeur ; mais un peu nébuleuse. Sa position étoit entre Orion et le Taureau. D’après notre observation, assez légère à la vérité, sa distance de Vénus étoit de 50° 39′, et du soleil de 95° au moins ; sa juste hauteur au-dessus de l’horison paroissoit être alors de 69°, et sa longitude de 62° 21’. Notre vaisseau se trouvoit par la latitude sud de 3° 52′, et par la longitude d’environ 100°.

Le 14 septembre, à quatre heures du matin, je trouvai que, depuis le 30 août, ou en quinze jours naturels, la comète s’étoit approchée du soleil d’environ 54°, par conséquent d’un peu plus de trois degrés et demi par jour. Depuis ce tems-là, je ne l’apperçus plus le matin, parce que le ciel se trouva pendant quelques jours couvert de brume et d’épais nuages ; et, dans la suite, lorsque le tems fut devenu clair et serein, la comète se perdoit dans la lumière de l’aube du jour. Au commencement de novembre, nous la revîmes à l’ouest, une heure après le coucher du soleil ; mais beaucoup plus foible qu’auparavant ; sa queue ne se prolongeoit pas non plus tant à l’est qu’elle l’avoit fait vers l’ouest ; et peu de tems après elle disparut entièrement.

Le 30 août aussi, le vent d’est nous quitta et courut à l’ouest, entre ouest-nord-ouest et ouest-sud-ouest, de tems à autre avec des grains violens accompagnés de tonnerre et d’éclairs, jusqu’à ce que nous fumes arrivés à deux ou trois degrés au nord de la ligne, où nous trouvâmes un tems moins variable.

Nous essuyâmes dans ces parages plusieurs raffales, et nous y vîmes un grand nombre de becs-en-ciseaux et de foux.

Par la latitude d’un degré et demi nord, nous remarquâmes, au lever du soleil, un grand changement dans la couleur de l’eau de la mer. Nous jetâmes aussitôt la sonde, sans cependant trouver de fond par les cent brasses ; et l’eau reprit, dans la soirée, sa première couleur.

Le 5 septembre, nous nous trouvâmes à la hauteur de l’île de Ceylan, que nous laissâmes à l’ouest, pour ainsi dire, à la portée de la vue ; nous pensâmes même l’avoir apperçue au coucher du soleil, sans néanmoins en être bien certains.

Le 12, la couleur de l’eau de la mer nous offrit quelque altération, mais sans trouver de fond par cent soixante-quinze brasses. Plusieurs oiseaux se firent voir autour du vaisseau, parmi lesquels il y avoit des pailles-en-queue et de petits oiseaux de rivage. Suivant notre estime, Bemelipatnam, sur la côte de Coromandel, étoit alors à vingt-cinq milles, au nord-nord-ouest du vaisseau. Pendant la nuit nous entendîmes un grand bruit causé par les cris d’une quantité d’oiseaux.

Le jour suivant, nous dirigeâmes droit au nord pour chercher terre ; mais nous n’apperçûmes rien, excepté des herbes et de la lentille de mer qui flottoient sur l’eau.

Le lendemain, 14 septembre, nous dirigeâmes, au nord-ouest, droit sur la terre, en forçant de voiles, et vers les sept heures du matin nous découvrîmes le pays de Pondy, sur la côte d’Orixa. Cette côte se présenta d’abord à notre vue avec trois petites collines isolées les unes des autres. Cent brasses de ligne ne suffisoient pas alors pour nous faire trouver fond, et il n’y avoit aucune altération dans la couleur de l’eau ; mais dans l’après-midi, nous trouvâmes fond par soixante-dix brasses, sur une argile bleuâtre. Le soir nous présentions le côté au mont Carepare, à quatre ou cinq milles de la terre la plus proche. Nous trouvâmes que, depuis que nous avions pris la hauteur de l’île du Prince, nous étions à vingt-un milles plus à l’est que nous ne devions l’être suivant notre estime. La côte n’est pas haute ici, et se trouve garnie ça et là de dunes de sable entremêlées d’arbres verds. On y apperçoit aussi, en longeant la côte, deux grandes pagodes, dont l’une, celle de Jagernate, est le principal temple des Gentoux qui habitent l’Inde proprement dite.

On assure que ces temples sont d’une grande richesse par l’affluence d’un nombre considérable de pèlerins qui s’y rendent de toutes parts, et qui, dans l’espoir d’être purifiés de leurs péchés, y font des présens plus ou moins riches, suivant leurs facultés. On prétend aussi qu’un certain corsaire, nommé Jagernate, qui avoit amassé des richesses immenses par ses pyrateries, avoit fait bâtir ce temple pour obtenir le pardon de ses crimes ; mais on ne se rappelle point le tems auquel cet événement doit être arrivé.

Ce temple présente en mer l’aspect d’une haute tour platte parle bout ; tandis que l’autre ressemble à un vaisseau à deux mats qui seroit sous voiles.

Le jour d’après, le calme ne nous permit guère de faire route, et au coucher du soleil nous nous trouvâmes devant l’embouchure de la petite rivière de Mirzapour, à deux milles environ de la côte, qui nous parut fort agréable, étant par-tout couverte d’arbres. À midi nous étions par la latitude nord de 19° 48’.

Le lendemain dans l’après-midi, nous fumes obligés de jeter l’ancre à la profondeur de dix-sept brasses, à deux bons milles de terre, à cause que les courans, qui venoient du sud, nous abattoient fortement. Pendant la nuit, nous hélâmes un senau anglois, qui venoit de Calcutta pour se rendre sur la côte de Coromandel, à ce que nous apprit l’équipage.

Nous fûmes contraints de demeurer amarrés jusqu’au 18 de ce mois, que les courans devinrent moins rapides. Mais nous nous vîmes forcés alors de descendre plus bas en bordayant, parce que les vents d’ouest commençoient à courir à l’est. Nous réussîmes néanmoins, pendant la nuit du 19 au 20, à passer au vent de Punto-dos-Palmeros. Le lendemain, à la pointe du jour, nous apperçûmes les chaloupes des pilotes hollandois, qui sont obligés de rester ici en croisière, pour aller au-devant des vaisseaux qui sont attendus. Nous prîmes sur-le champ un de ces pilotes à bord. Dans l’après-midi, nous apperçûmes les montagnes de Bellezoor, et jetâmes l’ancre, au coucher du soleil, devant le premier banc du Bengale. Ici il nous fut impossible d’appercevoir d’aucun côté la terre.

Ces bancs, dont deux se trouvent à l’ouest de l’embouchure du Gange, s’étendent de la terre ferme à huit ou dix milles en mer ; leur tête ou partie méridionale donne un fond de dix brasses ; mais immédiatement après il n’y a plus que trois brasses et demie d’eau.

Lorsqu’on vient de la mer, on est obligé de traverser ces bancs obliquement, parce que les plus profondes passes sur et entre ces bancs, servent à indiquer aux pilotes les endroits où ils doivent trouver les balises dans le canal qui court entre ces bas-fonds, et qui conduit vers l’embouchure de la rivière près d’Insely. Si par malheur le vaisseau s’ensable en passant par dessus ces bancs, on court le danger d’y périr sans ressource ; car le sable en est fort dur et en même tems mouvant. On ne doit donc les franchir que par la plus haute marée ; et quand les pilotes craignent qu’il n’y a pas assez d’eau, ils préfèrent de rester mouillé devant ces bancs ; pour plus de sûreté même ils envoient à une demi-lieue ou à trois-quarts de lieue en avant une de leurs chaloupes, qui donne à connoître par des signaux la quantité d’eau qu’elle y trouve.

Le 21 septembre, à huit heures et demie du matin, la chalouppe du pilote nous lit signe qu’il y avoit assez d’eau sur le banc ; nous levâmes aussitôt l’ancre et fîmes voile. Nous passâmes le premier banc sur vingt-huit pieds, et le second sur vingt-quatre pieds d’eau : notre vaisseau ayant vingt pieds d’œuvres vives. Vers le midi, comme nous filions entre les deux bancs, nous trouvâmes que la latitude septentrionale étoit de 20° 19’; et vers les trois heures et demie de l’après-midi nous mouillâmes dans le canal près de la balise de Bouro-Baly.

Le lendemain, environ vers les sept heures du matin, nous remîmes à la voile, en dirigeant notre route au nord-nord est. À dix heures, nous apperçûmes l’île de Sagor, que nous laissâmes à stribord. Cette île est longue et basse ; le peuple de Bengale la regarde comme un lien saint. Immédiatement après midi, nous passâmes la rade d’Insely, où nous commençâmes à appercevoir la terre des deux côtés ; tandis que, depuis l’île de Sagor, nous ne l’avions vue qu’à stribord, et point du tout à bâbord. Ces terres sont fort basses près de l’embouchure de la rivière ; de sorte qu’en venant de la mer, on ne peut les découvrir qu’à la distance de trois milles. À trois heures, nous passâmes le Jennegat, qui, de tous ces bancs, est le plus dangereux à franchir ; car les navires qui touchent sur un de ces bas-fonds, qui rendent ce passage si étroit, sont immanquablement perdus ; comme cela eut lieu, il y a trois ans, avec le vaisseau de la Compagnie appelé la Dame-Petronelle, dont on ne put sauver qu’une partie de la cargaison ; le navire se trouva en fort peu de tems englouti par le sable mouvant.

Au coucher du soleil, nous mouillâmes près de la branche de Kisseryen, où il nous vint à bord un petit bâtiment, par lequel je fis passer à Hougly les papiers de la Compagnie dont j’étois chargé.

Le jour suivant, 23 septembre, nous levâmes l’ancre vers les neuf heures du matin, et montâmes la rivière en profitant de la marée. Nous avions alors six, cinq et quatre brasses d’eau, laquelle étoit épaisse et vaseuse, ce qui est occasionné par le cours rapide de la rivière. Le fond du canal est une vase molle, mais les bancs, qui y sont en grand nombre, sont d’un sable fort dur. À midi nous passâmes la branche du Lièvre, laquelle est assez large et assez profonde pour recevoir des bâtimens de mer. En 1768, un directeur de la Compagnie y envoya quelques pilotes et experts, pour examiner si l’on ne pourroit pas, en cas de besoin, conduire les navires en mer par cette branche, au lieu de prendre par le Jennegat en passant devant l’île d’Insely ; mais ils trouvèrent en sortant de ce canal (dans un autre bras du Gange qui passe devant Daca) qu’il seroit dangereux pour les vaisseaux de la Compagnie de se rendre par-là en mer, à cause de grands bancs de sable dont on ne connoît pas encore assez la position ; et l’affaire en resta-là. La plupart des marchandises qu’on transporte de Daca à Hougly, prennent la branche du Lièvre.

Lorsque nous eûmes passé par la branche du Lièvre, le canal devint plus profond, et nous trouvâmes dix à douze brasses d’eau, dont le fond étoit cependant une vase molle.

Jusqu’ici le terrain que nous avions laissé derrière nous en montant la rivière étoit inhabité, inculte et rempli d’un grand nombre de tigres et d’autres bêtes féroces. Les bords étoient, en général, garnis de bois taillis fort épais ; mais un peu au-delà de la branche du Lièvre, nous commençâmes à appercevoir des maisons, et même quelques hameaux des habitans du Bengale.

Dans l’intérieur des terres, nous vîmes des plaines unies, dont quelques parties étoient cultivées, et entre ces champs il y avoit des prairies d’une belle verdure ; ce qui nous procuroit des points de vue charmans pendant notre navigation. Plus nous remontions la rivière, et plus l’aspect du pays devenoit riant. Par fois nous découvrions des troupeaux de plus de cent bêtes à cornes.

Vers les trois heures de l’après-midi, nous passâmes devant un village appelé Dover, où les Anglois ont une factorerie et quelques magasins. Il y a ici une bonne et sûre rade, fort fréquentée par leurs vaisseaux, dont nous en trouvâmes alors plusieurs. Près de là est l’embouchure de la branche des Chevrettes, qui s’étend fort avant dans les terres. Au coucher du soleil, la marée et le vent contraire nous obligèrent de mouiller à la pointe des Buffles, près d’un endroit auquel les habitans ont donné le nom de Tombeau d’Adam, et qui est très-reconnoissable par un joli bouquet de beaux arbres.

Ce ne fut qu’à trois heures de l’après-midi que nous pûmes, le lendemain, mettre à la voile à cause des obstacles que nous présentoient le vent et la marée. Nous fûmes même obligés de mouiller deux heures après un peu au-dessous de l’ancien Gange ; et nous essuyâmes, pendant toute la nuit, une forte tempête accompagnée de tonnerre et d’éclairs.

Le lendemain à la pointe du jour, nous levâmes l’ancre, mais fort peu et à peine seulement hors du fond, sur lequel elle traînoit même encore, pendant que nous nous laissions emporter par le flux. Nous étions forcés de faire cette manœuvre, non-seulement à cause du peu de largeur du canal, mais encore parce que nous étions exposés à de rapides courans. C’est ainsi donc que nous montâmes en flottant l’arrière en avant jusques passé l’ancien Gange, ainsi que le nomment les pilotes.

On n’a pas encore remonté jusqu’à la source de cette rivière, dont on ignore par conséquent l’origine, ainsi que nous l’apprirent les pilotes et d’autres personnes instruites. L’endroit où elle se réunit ici avec le véritable Gange, est le passage le plus à craindre pour les vaisseaux qui montent ou qui descendent cette rivière, à cause des bancs dangereux qui s’y trouvent, et que les courans s’y portent avec rapidité pendant le flux, comme ils en sortent avec force au jussant. Peu de tems avant mon départ du Bengale, les Anglois avoient conçu le projet d’établir une forte batterie sur l’angle que forme le confluent des deux rivières, pour empêcher les vaisseaux de remonter le Gange. Certes, il n’y a pas sur les rives de ce fleuve un emplacement plus convenable que celui-ci pour remplir cette intention ; car, à cette hauteur, la manœuvre nécessaire pour ne point tomber sur les bancs et pour éviter d’être entraîné par les courans dans l’ancien Gange, demande trop de soins pour qu’on puisse songer à se défendre.

Après avoir passé l’embouchure de l’ancien Gange, nous vîmes les vaisseaux de la Compagnie hollandoise qui mouilloient sur la rade de Voltha. Ils nous saluèrent par dix-sept coups de canon aussitôt qu’ils eurent apperçu notre pavillon ; nous leur répondîmes par quinze coups. Vers les huit heures et demie nous mouillâmes près de la branche de la Chaux. Peu de tems après vint à notre bord le maître d’équipage d’Hougly pour saluer le directeur F… que nous avions avec nous. Il nous apprit que huit jours auparavant un vaisseau de la Compagnie des Indes orientales angloise avoit échoué en passant sur les bancs qui sont en mer, à l’embouchure de la rivière ; que toute sa cargaison, estimée un million trois cent mille florins de Hollande, étoit perdue, et qu’on n’avoit même pu sauver que quarante hommes de l’équipage.

Le jour suivant, 26 septembre, nous remîmes à la voile au lever du soleil, et mouillâmes à neuf heures sur la rade de Voltha. Nous y trouvâmes trois vaisseaux de la Compagnie, dont l’un étoit arrivé de la patrie, les deux autres venoient de Batavia. Ils nous firent le salut accoutumé auquel nous leur répondîmes. Vers les onze heures, nous reçûmes à bord une députation du conseil pour complimenter le directeur F… sur son arrivée et le conduire à Hougly dans le grand badjerah ou jagt de la Compagnie qu’on avoit amené à cet effet. Je parlerai de cette espèce d’embarcations dans mes Observations sur le Bengale.

Au départ du directeur F… je fis faire de mon vaisseau une décharge de vingt-un coups de canon et on baissa le pavillon ; les autres vaisseaux me répondirent par dix-neuf, dix-sept et quinze coups ; c’est ainsi que se termina le cérémonial de la rade.

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