Vie de Mohammed/Mort du prophète

Traduction par Adolphe-Noël Desvergers.
Imprimerie royale Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 91-92).

Mort du prophète.

La maladie faisant toujours de nouveaux progrès, le prophète mourut le lundi dans la matinée, ou, comme d’autres personnes le disent, à midi. Aiescha dit : « Je vis le prophète « de Dieu au moment de sa mort : il avait auprès de lui un vase plein d’eau dans lequel il trempait sa main, puis il se touchait le front en disant : « O mon Dieu, aidez-moi à sur à monter les angoisses de la mort. » Alors, dit toujours Aïesacha, sa tête devint pesante et il retomba sur mon sein ; je jetai les yeux sur son visage, son regard était fixe, et il dit : « C’est le compagnon d’en haut (163) (que je choisis).» « Lorsque son âme se fut envolée au ciel, je reposai sa tête sur l’oreiller, puis je me mis à gémir et à me frapper le visage, ainsi que toutes ses femmes. »

Il mourut un lundi, 12 du mois de rebi-et-aoual, et d’après cela il y aurait concordance entre le jour de sa naissance et le jour de sa mort. Après la mort du prophète, la plus grande partie des Arabes quitta l’Islamisme, à l’exception des habitants de Médine, de la Mecque et de Taïef, trois villes dans l’enceinte desquelles l’apostasie ne trouva pas de partisans. Le prophète avait nommé au gouvernement de la Mecque P.IIF Attab, fils d’Açid, fils d’Abou’l-Ais, fils d’Omaia. Ce chef, craignant pour sa vie, se cacha, ct la ville devint en proie à une agitation violente. Le peuple était sur le point d’apostasier, lorsque Sohail, fils d’Amrou, se rendit à la porte du temple, et appelant à haute voix tous les habitants Koreischites et autres, il leur dit : « O vous, habitants de la Mecque, qui avez été les derniers à embrasser l’Islamisme, serez-vous donc les premiers à l’abandonner ? Cependant Dieu accomplira son œuvre ainsi que vous l’a dit le prophète. » Par ces paroles, il les empêcha d’abandonner la voie de la religion. Le cadi Schahab-eddin, fils d’Abou-Dam, dit dans sa Chronologie que l’on courut en foule à la maison du prophète pour le contempler encore, et que chacun s’écriait : « Comment est-il mort lui qui doit rendre témoignage contre nous ? non certes il n’est pas mort, mais il est monté au ciel comme Jésus (164). » Puis ils criaient à sa porte : « N’enterrez pas le prophète de Dieu, car il n’est pas mort. » Ils restèrent dans l’attente jusqu’à ce que, le corps étant tout enflé, Abbas, oncle du prophète, sortit et leur dit : « Par celui qui est le seul Dieu de l’univers, le prophète s’est endormi du sommeil de la mort. »


(163) C’est le compagnon d’en haut de بل الرفيق الأعلى Ces mots ont be- soin, pour être compris, des passages suivants du Sirat-er-Reçoul, qui complètent l’idée de Mohammed exprimée par Abou’lféda d’une manière trop concise. On lit, fol. 269 :

[Texte en Arabe]

« J’entendais souvent

Mohammed, dit Aiescha, assurer que Dieu n’appelait jamais à lui un "prophète sans lui avoir donné le choix (de rester encore sur la terre ou d’aller au ciel)… Or je trouvai que sa tête devenait pesanle ; je portai les yeux sur son visage ; son regard était fixe, et il s’écria : C’est le compagnon élevé habitant du paradis (que je veux suivre). Je dis alors, « continue Aiescha, On vient de te donner le choix (entre la vie et la mort) et tu as choisi.»

(164) D’après la croyance des Musulmans, les Juifs crucifièrent Don pas Jésus lui-même, mais un homme auquel Dieu avait donné sa res semblance : Jésus fut enlevé au ciel. C’est à celle opinion que font allusion les deux versets 42 et 43 de la tır sourate du Coran, expliqués dans ce sens par les commentateurs.