Vie de Mohammed/Défaite des Musulmans

Traduction par Adolphe-Noël Desvergers.
Imprimerie royale Voir et modifier les données sur Wikidata (p. 45-47).

Défaite des musulmans.

Les infidèles avaient pris la fuite et les archers du prophète, emportés par le désir du butin, quittèrent le poste auquel i leur avait ordonné de rester. À ce moment Khaled, fils de Walid, à La tête de sa cavalerie, prit les Musulmans à dos; en même temps on cria que Mohammed était tué. Le désordre s'étant mis alors parmi les Musulmans, l'ennemi leur fit éprouver de grandes pertes, et ce fut pour eux un jour d'épreuve; soixante-dix d'entre eux succombèrent, et les infidèles perdirent vingt-deux hommes. Cependant les enne- mis parvinrent à l'endroit où se tenait le prophète; atteint par leurs pierres, il tomba à terre; une de ses dents de devant fut brisée (80); il fut blessé au visage et à la lèvre. L'auteur de cette blessure fut Otba, fils d'Abou-Waceas, frère de Saad. Le sang commença à couler sur le visage du prophète qui dit alors : « Comment pourrait prospérer un peuple qui a souillé de sang le visage de son prophète au moment où il l'appe- « lait à la connaissance du Seigneur ? Ce fut à ce sujet que descendit cette parole du Très-Haut (81): Pea t'importe qu'il les punisse ou qu'il leur pardonne, car ce sont des impies. Deux des anneaux du casque de Mohammed étaient entrés, par la force du coup, dans le visage du prophète, et Ahou-Obaïda, fils de Djerrah, en ayant arraché un, l'une de ses dents tomba; il arracha l'autre et perdit encore une dent, en sorte P. A qu'il en eut deux de moins. Senan, père d'Abou-Said, de la tribu des Benou-Khoudr, suçait le sang du prophète qu'il ava- lait ensuite, et le prophète lui dit : « Celui dont le sang s'est « mêlé au mien ne sera point atteint par le feu de l'enfer. » La tradition rapporte qu'en ce jour-là Talha fut privé de l'usage de sa main par un coup dont il préserva le prophète : Mohammed était revêtu de deux cuirasses.

Hend et ses compagnes mutilèrent les compagnons du pro- phète qui avaient sucombé dans le combat, leur coupant le nez et les oreilles pour s'en faire des colliers; puis Hend arracha le foie de Hamza, qu'elle mácha, mais sans l'avaler. Son mari, Abou-Sofian, ayant frappé de l'extrémité de sa lance la lèvre de Hamza, gravit la montagne et s'écria : «Les armes » sont journalières ; Je combat d’Ohod venge celui de Bedr. « Élève-toi, ITobal (82) : » il voulait dire : Fais triompher ta re- ligion. Lorsqu’il s’en retourna À la tête des siens, il ria : « Je « vous donne rendez-vous à Bedr l’année prochaine », et le prophète ordonna à l’un des siens de répondre : « Vous nous « y trouverez. » Les infidèles étant retournés à la Mecque, le prophète chercha son oncle Hamsa, et l’ayant trouvé le ventre fendu, Le nez et les oreilles coupés, il dit : « Si Dieu me fait « triompher des Koreïschites, je vengerai, sur trente des leurs, « la mort de Hamra. » Puis il ajouta : « Gabriel est venti à moi vet m’a révélé que Harmza est porté au nombre des &lus du « septième ciel sous ce nom : Hama, fils d’Ahd-el-Mottalib, « le Lion de Dieu et de son prophète. » Ensuite il ft couvrir ». e son côrps d’un manteau, pria sar lai et répéta sept fois Allah skbar. On apporta aussi le corps des autres victimes ; on les plaçait suerossivement auprès de celui de Hamza ; il priait sur eux et en même temps sur Hamza, en sorte qu’il fit soixante-doure prières sur le corps de son oncle. Ce fait vient à l’appui de l’opinion d’Abonlanife (83), qui approuve les prières faites sur Le corps des martyrs de la foi, contrairement au dogme de Schafeï (84). (Dien les ait tous deux en pitié ! } Le prophète ordonna ensuite qu’on inhumât Hama, puis quelques Musulmans emportèrent leurs morts à Médine et les y enterrèrent. Mohammed défendit qu’on imitât cet exemple, et dit : « Enterrez des morts où ils ont succombé. » On entra alors dans la quatrième année de l’hégire.



(80) I paraît, d'après le texte d'Abou'Hféda, que le prophète ne perdit qu'une seule dent. Celles qui sont gardées à Constantinople seraient done de frumses reliques. Ou Hit dans d'Ohaton : « Sous Le nom de Sin Scherif + où dents sacrées, on conserve encore à Constantinople deux des dents «que le prophète perdit à Ohod ; l'une est gardée au sérail, et J'autre «dans ls chapelle sépulcrale de Mobaramed IT, où on f'expose à In véné. » ration du publie pendant La nuit appelée Leïler #l-Cadr, le a7 du moïs “de ramadhan. (Voyes Mourndjha d'Ohsson, £. TE, p. 895, el Histoire des Ottomans , par Demetrius Cantemir, 1. L, p. 295.)

(81) Voyez le Coran, 3 sourale, vers. 128.

(82) Hobal était Ja principale des idoles adorées à la Mecque par les Arabes. (Voyez à ce sujel Pococke, Spee. His. Arub., p. 97, 98, 99, +00.) Armrou, fs de Lokay, Mis de Haeitb, roï du Hedja, voyageant en Syrie, rencontra des hommes qui sdoraient des idoles. Leur ayant demandé ce que c’était que ces idoles, is lui répondirent : « Co sant des dieux que « nous avons faits à’image des étoiles et des hommes. Nous leur demanda « dons du secours, et nous en oblenons : nous en implorons de la pluie, « etils nous en donnent. » Amrou rempli d’étonnement Leur demanda une de ces ideles, et fs Jui donnèrent Hobal qu’il rapporta à la Mecque, et qu’il plaça sur ls Caaba, (Voyez Ecerpla en Alouéda, par M. de Say, p. 448.) Le même récitse trouve également dans Le Sirat er-reçoul Go 19 9).

(83) Abou-Hlanifa s’appelait Noman, fils de Thabet ; on l’a surnommé Jnam Azkan, ou le grand Imam. Il est né l’an 80 de l’hégire sous le khalifat d’Abd el-Mekik. C’est l’an des quatre imams qui ont fondé les rites orthodoxes de la foi musulmane. Comme 1 état l’an des partisans les lus zélés de la maison d’Al, le Lhalife Abdallah I {el Mançour) le Bt empoñsouner à Baghdad, où it mourut Tan de l’hégire 150. (Voyez &Ohsson, LL, pat)

(84) Schefey est te second des quatre imams orthodoxes. Son nom entier est Mohammed fils d’Otliman, fils de Schaley. Il naquit à Ghaza, en Syrie, l’année de la mort d’Abonianifa, et movrat en Égyple l’en 204, sous le khalifat d’elMamoun, Les deux autres imams fondateurs des rites orthodoxes, sont Malek. fils d’Anas. et Ahmed, fils de Haubal. {Voyez d’Ohsson, à L, p. 14 el euiv)