Librairie Bloud et Barral (p. 229-242).


XVIII

Tout était resté en question après cette série d’explications orageuses où nul avis n’avait prévalu, et aucune trace de ces dissentiments intimes ne perça les jours suivants dans les rapports journaliers. Seulement, Mme Maudhuy profita des heures tardives où chacun était retiré chez soi pour ramener Cécile à une appréciation plus saine des choses.

D’abord, il était impossible de considérer autrement que comme un caprice le dédain subit qu’elle faisait d’un jeune homme dont elle avait agréé les soins sans répugnance, et manquer cette occasion d’être dotée, c’était décourager l’oncle Carloman de ses intentions généreuses qu’on ne retrouverait peut-être pas en lui dans une autre occasion.

Quant à ce projet de mariage avec le cousin de Chicago, c’était un radotage de vieillard qui ne valait pas même la peine d’être discuté. L’assentiment chaleureux de Carloman Maudhuy devait être une rouerie pour se faire bien venir de son oncle, et si sa lettre paraissait annoncer un prochain voyage en France, c’était pour leurrer le malade d’espoir. On ne vient pas de Chicago en un jour, et l’Américain, qui mettait déjà en avant la nécessité de laisser ses affaires en bon ordre afin de se donner un bon prétexte de retard, bercerait le vieil oncle de cette rêverie de mariage aussi longtemps qu’il le faudrait. Peut-être n’aurait-il pas à jouer cette comédie pendant des années. L’oncle Carloman était bien cassé depuis son accident. Il digérait mal, ne dormait guère que grâce à des potions soporifiques. C’était un organisme en train de se dissoudre.

Après ces réflexions, Mme Maudhuy en revenait à démontrer à Cécile qu’il n’était ni convenable ni juste qu’elle demeurât à Sennecey. Quelle figure ferait-elle sans sa mère dans la maison de son oncle ? Qui lui servirait là de chaperon ? Ce ne pouvait être Mme Trassey qui habitait sous un autre toit, et la présence journalière de son fils serait une gène pour une jeune fille. Enfin la partialité visible de l’oncle Carloman pour Cécile annonçait une de ces idolâtries de grands parents qui annullent chez eux tout sentiment de justice. Restant à Sennecey, Cécile deviendrait sans s’en douter, sans le chercher, l’unique héritière de l’oncle Carloman. Quelques menus soins, des cajoleries, une docilité niaise à se prêter à des passe-temps ridicules prévaudraient contre les droits de Charles… et de Carloman Maudhuy, tous deux occupés à faire leur position par leur travail, et plus méritants par cela même.

À considérer les choses à un autre point de vue, Cécile n’était donc pas heureuse chez sa mère qu’elle fût si empressée de la quitter ? Et si l’oncle Carloman était destiné à vivre encore plusieurs années, elle accepterait donc de gaieté de cœur l’idée d’une longue séparation ?

Quelques-uns de ces arguments se contredisaient bien entre eux ; mais les orateurs pleins de leur sujet n’y regardent pas de si près, surtout quand ils dominent et subjuguent leur auditoire. Cécile était trop triste pour observer ces contradictions. Elle faisait bien la part de ce qui venait du fonds de sa mère dans ces reproches et de ce qui était inspiré par son frère, mais elle n’avait pas même la force de plaider ses bonnes intentions et elle se bornait à répondre :

— Tout ceci me fait haïr l’argent plus que jamais. Ah ! que la vie est laide, vue du côté des intérêts matériels ! Je retournerai à Paris. Mais l’oncle va être bien seul. Pauvre oncle !

Le convalescent savait bien que cette trêve aux débats était occupée à une correspondance active entre Mme Maudhuy et Charles, et que de celui-ci dépendait la décision qu’allait prendre sa belle-sœur. Il avait trop de dignité dans le caractère pour s’immiscer dans ce qui s’agitait entre la mère et la fille, en demandant à Cécile pourquoi elle avait les yeux rouges et gonflés quand elle venait le saluer plus tard que d’habitude le matin. Il s’étudiait, au contraire, à se montrer gai ; mais il n’était pas dupe des efforts de sa nièce pour oublier les amertumes subies, et un matin que Julien les avait quittés brusquement après une allusion au désir qu’avait le cousin de Chicago de connaître Cécile qui venait d’être faite par l’oncle Carloman ; celui-ci dit à la jeune fille :

— Je te sais gré de ce que tu as voulu faire pour moi ; mais je ne veux pas que tu perdes tes yeux à pleurer, ni que ton cher visage pâlisse. Je trancherai toute difficulté aujourd’hui.

Le lendemain, la nouvelle du départ des dames Maudhuy se répandit dans Sennecey. C’était M. Maudhuy lui-même qui, ne voulant pas priver trop longtemps de sa famille son neveu de Paris, engageait sa belle-sœur et sa nièce à l’aller rejoindre. Les dames Maudhuy seraient toujours les bienvenues à Sennecey, où chacune de leurs visites serait considérée comme une faveur.

Cette initiative de l’oncle Carloman venait à point pour alléger Mme Maudhuy d’une vive crainte. La dernière lettre de Charles annonçait que si sa mère et sa sœur ne revenaient pas dans la huitaine, il demanderait un congé de quinze jours pour aller les rejoindre. Or, Mme Maudhuy savait par expérience que ce qui pouvait faire le plus de tort à Charles auprès de son oncle, c’était de passer quelque temps chez celui-ci. Tout en considérant son fils comme le chef de famille et en professant à son égard cette tendre déférence des mères qui ont abdiqué, Mme Maudhuy ne pouvait se dissimuler que Charles était d’humeur cassante, ombrageuse, et s’irritait de la plus légère contradiction. Un tel caractère était fait pour choquer l’oncle Carloman, si absolu de son côté.

Les préparatifs du départ furent hâtés, et Cécile alla faire ses adieux à la famille Limet, pendant que sa mère terminait le rangement de ses malles.

M. Limet était occupé à son étude. Mme Limet, dans le coup de feu des confitures de pêches qu’elle faisait elle-même, reçut Cécile à la cuisine, en s’excusant sur la maladresse notoire de ses servantes qui l’empêchait de quitter le fourneau.

Une buée de vapeurs flottait en flocons légers au-dessus de la bassine léchée en dessous par des langues de flamme bleuâtre qui laissaient des traînées blanches à ses flancs rebondis. Des bulles d’air éclataient à la surface de la marmelade et le rythme grondant de son ébullition faisait, à chaque tour de l’écumoire de cuivre, flotter dans le sirop roux les blancheurs des quartiers de fruits. Les joues presque aussi en feu que la braise incandescente qui pétillait dans le fourneau, Mme Limet manœuvrait l’écumoire avec gravité, et elle ne cessa pas de la tourner en rond dans la bassine pour dire à la visiteuse :

— J’irai ce soir faire mes adieux à Mme Maudhuy. Ah ! elle ne pourra pas goûter de mes pêches. C’est une mortification pour moi qui me flatte d’avoir une recette unique pour les préparer.

— Si Cécile restait à se griller, dit Reine à sa mère, ce serait sans compensation, puisqu’elle ne mangera pas de tes confitures. Je l’emmène au jardin…

La maison notariale avait un petit jardin où les fleurs n’étaient guère représentées que par les giroflées et les iris poussés au hasard sur les murs, et par quelques rosiers étouffés entre les groseillers et les cassis. C’était un verger à vrai dire que ce petit enclos. La seule part sacrifiée à l’agrément était un berceau couvert de vigne vierge vers lequel Reine conduisit Cécile.

— Eh bien ! lui dit-elle quand toutes deux se furent assises sur le banc de bois placé au fond de la tonnelle, qu’y a-t-il donc que vous partiez si subitement ? Rien de fâcheux, j’espère ?… Ah ! vous me prenez pour une curieuse de village. Vous vous trompez… Outre que votre départ me fait de la peine, il me déconcerte. Je me figurais que vous resteriez… tout à fait. Comment vous dirai-je cela ? Vous êtes si réservée que je vous crains un peu.

— Il n’y a de réservées que les personnes qui cachent leurs secrets, répondit Cécile avec mélancolie, et je n’ai aucun secret, moi !

— Je ne suis pas de même, reprit Reine avec sa vivacité enjouée, et je vais vous dire le mien. Oh ! ne croyez pas qu’il me pèse, et que je saisisse l’occasion de m’en débarrasser en le jetant à quelqu’un qui s’en va et qui ne pourra pas le répandre dans le pays. Ce secret-là, j’en parlais tout à l’heure à ma mère, et elle me disait une minute avant votre arrivée, tout en tournant ses confitures de l’air recueilli que vous avez pu constater : « Reine, tu es une extravagante. » Mais elle a ajouté : « À dix-huit ans, je pensais comme toi. À quarante, tu le vois, je me contente de réussir mes confitures. Tu feras comme moi et je te donne rendez-vous d’ici à dix ans, si je vis, auprès de la bassine où cuiront tes marmelades de fruits cueillis à Sennecey, dans ton propre jardin. »

— Mais quel est le rapport entre votre extravagance et les confitures ? demanda Cécile qui ne pouvait s’empêcher de rire.

— Le rapport est direct et c’est là que gît mon secret, répondit Reine vivement. Je suis née à Sennecey, je n’ai de ma vie quitté, pour ainsi dire, l’arrondissement. Depuis que je suis sortie de pension, mon père me promet un voyage en pays lointain — ne riez pas — il s’agit de Lyon… et ce projet ne se réalise pas plus que s’il m’eût promis une ascension en ballon devant me mener tout droit dans la lune. Vous supposez bien, n’est-ce pas ? que si petite que soit la somme d’instruction que j’ai reçue, on m’a montré la géographie. Eh bien ! mon secret, c’est que je m’ennuie de penser que tant de gens font le tour du monde, y voient tout ce qu’il y a de curieux, et que moi je n’ai pas même la liberté d’un écureuil qui peut sauter d’arbre en arbre d’un bout à l’autre d’une forêt, et que je suis comme un pieu planté en terre, condamné à rester là où on l’a enfoncé… Tenez, Cécile, voilà mon portrait fidèle, ajouta la jeune fille en frappant de la main un des supports sur lesquels se treillageait la tonnelle. Mais ce pieu est mort, et moi qui n’ai pas de goût pour l’état de borne, je m’ennuie cruellement à Sennecey. Ah ! toujours voir la montagne de Laives et celle du Mouron quand on rêve des Alpes et des Pyrénées !

— Pourquoi pas de l’Himalaya ?

— Et aussi de l’Himalaya, poursuivit Reine avec la même crânerie sémillante. Savez-vous pourquoi j’ai pris en horreur cet ouvrage sur la Chine dont nous parlions l’autre jour ? c’est par jalousie contre le Père Huc qui a vu tant de choses étranges qu’il me sera impossible de voir par moi-même après lui. Ah ! si ma mère avait éprouvé à mon âge la même impatience contre les horizons connus, elle n’aurait pas épousé M. Limet, notaire à Sennecey, maison porte à porte avec celle de ses parents. Oui, je ferai des confitures à quarante ans, car ne croyez pas que mes instincts voyageurs me portent à vouloir abdiquer mon rôle de femme ; mais je ne les ferai pas avec des fruits de Sennecey… Et voilà, Mademoiselle Maudhuy, conclut Reine en saluant Cécile d’une inclination de tête un peu cérémonieuse, pourquoi je vous ai fait l’autre jour les honneurs du seul prétendant que la voix publique m’attribue. D’abord, il est de Sennecey, et il s’y trouve plus enraciné que moi par ses propriétés. — Moi je n’ai qu’une dot en argent et toute petite. — Puis, il est trop instruit, trop sensé, trop paisible pour moi. Enfin, mon père me chante ses éloges avec une persistance qui à elle seule aurait suffi pour me le faire prendre en grippe, et j’aimerais mieux faire rôtir une bosse de buffle dans un wigwam enfumé, pour le dîner d’un mari tatoué comme on nous représente certains Peaux-Rouges, que de cuire des confitures à l’usage de Julien Trassey.

— Dépêchez-vous en ce cas de partir pour l’Amérique, dit Cécile, qui voulait tourner l’entretien en plaisanterie, car des Peaux-Rouges il n’en reste plus guère.

— Voyons, Cécile, pourquoi partez-vous ?

— Mais cela va de soi. Nous étions en visite chez mon oncle et les visites ont une fin… Mon frère nous réclame… Nous reviendrons d’ailleurs l’année prochaine.

— Est-ce que… ? Non, je ne puis pas demander cela. Ce serait indiscret. Et puis, je comprends ce qu’il en est. Il est timide, tous les gens fiers le sont. Il n’ose pas s’avancer…

— Votre imagination vous emporte, ma chère Reine, répondit Cécile. Si vous voulez me laisser un bon souvenir de votre amitié, nous en reviendrons à vos rêves de voyage……

La dernière soirée fut triste à la maison Maudhuy. Il y eut pourtant grande affluence de visiteurs ; mais les compliments sur le départ du lendemain firent tous les frais de la causerie. On se promettait de se revoir au printemps. Le docteur Cruzillat affirmait que son malade recouvrerait assez bien l’usage de sa jambe pour pouvoir, s’il le souhaitait, aller rendre vers la fin de l’automne leur visite à ses parentes de Paris ; mais, après cet échange de banalités, la conversation expirait. Chacun était sous le coup de cette impression étrange qui saisit à l’instant des adieux. Les gens qui doivent s’éloigner paraissent déjà loin de ceux qui restent. La rupture des menus rapports quotidiens s’ébauche ainsi. Les uns, préoccupés du but lointain vers lequel ils vont s’acheminer, ne sont plus là, pour ainsi dire ; les autres sentent déjà une distance, celle de la pensée, s’établir entre eux et ceux qui s’apprêtent à les quitter.

Julien Trassey n’avait pas apporté ce soir-là son livre au salon ; mais il n’y fit qu’une courte apparition, et sa retraite fut remarquée par le docteur Cruzillat, qui en demanda le motif d’un air curieux.

— Mon fils a passé sept heures à cheval aujourd’hui, répondit Mme Trassey ; il a bien gagné de s’aller reposer plus tôt que de coutume.

— Ah ! ah ! fit le docteur en se frottant le nez de son index, par un geste qui lui était familier.

Le lendemain matin, Cécile était levée avec le jour. Elle descendit au rez-de-chaussée : les volets de l’oncle Carloman étant encore fermés, elle parcourut l’enclos et monta jusqu’au haut de la butte qu’on appelait le labyrinthe à cause de ses sentiers enchevêtrés qui s’embrouillaient en se croisant.

Parvenue au sommet de la petite élévation d’où la vue s’étendait assez loin, la jeune fille contempla le paysage que les rayons du soleil levant ranimaient dont la partie basse était encore endormie sous un rideau de vapeurs. La montagne de Laives, le Mouron plus lointain ne lui donnèrent pas, à elle, la nostalgie des Alpes, puisqu’une larme involontaire coula sur sa joue et témoigna du regret qu’elle ressentait de les quitter.

Cécile ne voulait pas s’attendrir ; elle descendit rapidement le sentier en zig-zag qui s’ouvrait en face de la charmille, et, après avoir cueilli quelques pervenches qu’elle mit dans son nécessaire de poche, elle revint par les parterres d’un pas ralenti et si absorbée dans ses pensées, qu’elle ne songea à l’obstacle du cadran solaire élevé à la fourche des quatre allées, qu’au moment où elle allait s’y heurter.

Ce vieux cadran, posé sur son piédouche grossièrement tourné en colonne tronquée, comme il l’avait intéressée autrefois ! Cécile se souvenait de s’être hissée sur les bras de l’oncle Carloman pour voir de plus près l’angle d’ombre projeté par la plaque de fer sur le cadran. Elle avait aussi épelé sa devise et se l’était fait traduire :

Cogita ultima, pense à ta dernière heure !

Quel conseil profond tenait en ces deux mots ! Eh bien, à cette dernière heure, ce ne seraient pas les joies savourées qui compteraient, mais les sacrifices faits au devoir, et accomplis courageusement. Cette devise disait la vanité des agitations au profit d’intérêts matériels et, par contre, le prix d’une existence vouée au bien, soucieuse de son progrès moral. Cécile se promit, en regardant une dernière fois cette devise, de l’adopter autant qu’il serait en elle, et de s’en faire une force à l’avenir.

La voix de l’oncle Carloman vint la distraire de cette méditation. Il s’était levé, il l’appelait. En un instant elle eut traversé le parterre et la terrasse ; mais elle ne sauta point par la fenêtre ouverte ; elle n’avait plus renouvelé ce mode cavalier d’intrusion depuis le jour où elle avait été si confuse d’avoir Julien Trassey pour spectateur de cet exploit.

Il était là, ce matin encore, occupé à faire une sorte d’emballage dans une petite corbeille d’osier.

— Puisque te voici levée de si bon matin, dit l’oncle Carloman à sa nièce, viens nous mettre d’accord, Julien et moi. Il s’est souvenu que la petite linaire Ruines de Rome t’avait fait envie le lendemain de ton arrivée ici, et que tu voulais en recueillir des graines pour ton jardin suspendu de Paris. Il a pensé qu’il te serait plus agréable d’avoir cette plante toute poussée, sans attendre que les graines aient germé, et il a garni cette corbeille de Ruines de Rome. La plante est bien aménagée là sur un lit de mousse humide autour du pot de terre qui la contient, et la corbeille serait aisée à emporter à la main et à placer en route sur les filets du compartiment de wagon. Mais, après avoir pris cette peine, Julien s’est imaginé que ton désir d’avoir cette linaire s’est passé, et que tu serais ennuyée de ce petit colis… que sais-je, moi ? cent scrupules de même genre qui l’auraient empêché de t’offrir cet échantillon de plante et de terre de mon jardin si je ne t’avais appelée.

Cette attention du jeune homme toucha Cécile plus vivement qu’elle ne l’aurait voulu, et il en perça quelque chose dans son remerciement qui troubla Julien Trassey. Il répondit en balbutiant que Mlle Maudhuy était trop bonne de se dire reconnaissante d’une si petite chose, et brusquement il la salua en ajoutant qu’il lui souhaitait un bon voyage.

— Comment ! s’écria l’oncle Carloman, est-ce que tu ne conduis pas ces dames à la gare ?

— Non, mon parrain. Jean mènera la voiture. J’ai affaire aux vignes de Beaumont.

— Bah ! ce n’est rien de pressé. Il y a autre chose. Qu’est-ce donc ? Je veux le savoir.

— Puisqu’il faut vous l’avouer, mon parrain, répondit Julien dont la contenance se raffermit, j’ai du chagrin à voir partir les dames Maudhuy et je ne me sens pas le courage de les reconduire.

Cet aveu franc, cordial, fit oublier à Cécile les scrupules délicats que les interprétations risquées de Reine Limet lui avaient inspirés ; elle fit un pas vers Julien Trassey et lui dit, en lui tendant la main :

— Je ne vous confie pas le soin d’égayer mon oncle ; ce serait renverser les rôles entre nous. Si j’ai été sa garde-malade pendant quelques jours, il y a longtemps que vous remplissez à son égard les devoirs d’un fils. Mais je vous prie de lui rappeler que je m’en vais à regret et qu’il n’a qu’un seul moyen de me consoler de mon départ, c’est de se bien porter et d’être tout à fait alerte quand je reviendrai à Sennecey.

Julien Trassey s’inclina en touchant à peine la main de la jeune fille, et il sortit sans avoir pu lui répondre un seul mot.