(tome IXp. 50-52).

CHAPITRE DCLXXXVI.

Démonstration du Déluge universel.


Un précepteur des pages de la feue reine, voulant prouver le déluge, & faire voir que le systême de Moïse l’emportoit sur les raisonnemens de Burnet, de Wistou, de Wood, de Pluche, &c. forma un globe terrestre plein d’eau, armé de soupapes, & enfermé concentriquement dans un globe de verre. Il commença par remplir d’eau le globe terrestre, ferma l’ouverture pratiquée, & donna ensuite au globe intérieur un léger mouvement de rotation. L’eau n’a point franchi ses barrières. Voilà (disoit-il) le temps où Dieu n’étoit point courroucé contre le genre humain. Mais vous allez voir l’instant de sa colère. Aussi-tôt il fit mouvoir le globe avec une vîtesse accélérée. Bientôt, la masse d’eau força les soupapes attachées à la surface extérieure de ce globe terrestrre, & remplit toute la capacité du globe de verre, en s’échappant avec force. Ainsi le globe terrestre (disoit le précepteur aux assistans) a été entièrement couvert de ses propres eaux. Dieu se calme. Je vais cesser d’agiter ce globe, l’eau rentrera dans le réservoir, à peu près jusqu’à l’horizon du globe, & se mettra en équilibre avec elle-même. Il n’y a que des impies (continuoit le précepteur des pages de la reine) qui puissent contredire présentement le déluge universel ; car je vous l’ai peint d’une manière bien conforme au récit de l’historien sacré. Tous les assistans s’en retournèrent, persuadés de l’existence du déluge universel, & que ceux qui avoient l’audace de le nier, alloient contre la raison. C’est ainsi qu’en 1768 on enseignoit la physique aux pages de la reine.