CHAPITRE CCCVI.

Retraite.


On ferme sa porte à Paris, quand on veut ; ce qui est impossible dans les autres villes. On se dit à la campagne pour un mois, & vous pouvez être assuré que pendant un mois personne ne viendra vous importuner. Les portiers sont d’un merveilleux secours pour vous faire voyager, tandis que vous boudez tout seul dans un coin. Ils vous servent de chevaux de poste.

J’ai lu jadis une piece de vers intitulée : Épître à mon verrouil. L’idée étoit plaisante. Un philosophe avoit mis en grosses lettres dans son cabinet ces trois mots, épargnez mon tems. Avec cela faisoit-il fuir les importuns ? J’en doute. Il n’y a d’autres remparts contre les visites incommodes qu’un verrouil : il ne faut donc point faire une épître à son verrouil, mais le tirer.

Combien d’amitiés, combien de liaisons inutiles ! Il est un tems dans la vie, où un homme raisonnable devroit savoir à quoi se fixer, éprouver ceux qu’il fréquente, & se débarrasser ainsi de mille soins que tous ces amis de nom usurpent aux véritables. La sagesse, la philosophie s’en trouveroient mieux, & l’on apprendroit de bonne heure à ménager le tems, à prévenir le regret de sa perte.

Certaines gens sont si fatigués d’eux-mêmes, qu’ils n’existent que quand ils ont quatre ou cinq personnes dans leur chambre pour assister à leur lever & à leur toilette.