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torale. Les nations contemporaines sont pour le moment moins occupées de quelques voyages de diplomates ou de princes, de quelques incidens qui passent, que de leurs intérêts, de leurs fmances et de leurs affaires commerciales, de ces réformes sociales qui remuent des millions d’hommes, dont les empereurs se font des programmes. Les gouvernemens ont assez de vivre, de se débattre avec leurs embarras intérieurs, avec leurs partis, avec leurs élections, et le cabinet anglais lui-même, si mêlé qu’il soit aux grandes aflaires du monde, n’échappe pas à la destinée commune des pouvoirs qui ont à disputer leur existence sans être assurés du lendemain.
torale. Les nations contemporaines sont pour le moment moins occupées de quelques voyages de diplomates ou de princes, de quelques incidens qui passent, que de leurs intérêts, de leurs fmances et de leurs affaires commerciales, de ces réformes sociales qui remuent des millions d’hommes, dont les empereurs se font des programmes. Les gouvernemens ont assez de vivre, de se débattre avec leurs embarras intérieurs, avec leurs partis, avec leurs élections, et le cabinet anglais lui-même, si mêlé qu’il soit aux grandes aflaires du monde, n’échappe pas à la destinée commune des pouvoirs qui ont à disputer leur existence sans être assurés du lendemain.


Rien de plus curieux d’une certaine façon, en effet, que ce qui se passe en Angleterre. Depuis quelque temps déjà, le premier ministre de la reine, lord Salisbury, tout entier à sa diplomatie extra-européenne, semble étendre son regard de tous les côtés, sur le Niger, sur le Zambèze, sur le lac Nyanza. Il est engagé en Egypte, dans le Soudan, à Zanzibar. Il fait des conventions avec l’Allemagne, avec la France pour la distribution de l’Afrique, des terres inconnues. Il négocie avec l’Italie pour Kassala, il impose sa volonté au Portugal qui fait aujourd’hui un dernier appel à sa modération. 11 réussira, c’est vraisemblable, et ces jours derniers encore, au banquet du lord-maire, il parlait, sans aucune jactance, d’ailleurs, de sa politique africaine qui n’est pas faite pour être désavouée par les Anglais. C’est fort bien ; mais tandis que lord Salisbury promène au loin sa diplomatie voyageuse et conquérante, étendant le domaine de l’Angleterre, le danger est tout prés de lui, autour de lui ; il est à l’intérieur, dans la résistance passionnée de l’indomptable Irlande qui ne se soumet pas du tout à la coercition, dans le mouvement croissant de l’opinion qui se détache de plus en plus du ministère et passe aux libéraux. M. Gladstone, toujours vert sous le poids de ses quatre-vingts ans, recommençait récemment sa campagne du Midlothian, rajeunissant par son inépuisable éloquence une popularité qui survit à tout. Ses propagandes ont déjà infligé plus d’une défaite aux conservateurs dans les élections partielles, et tout dernièrement les élections municipales ont été un nouveau succès pour les libéraux. Ce ne sont que des élections locales sans doute ; elles sont toujours un signe du mouvement de l’opinion. Un des principaux alliés de lord Salisbury, le chef des libéraux unionistes, lord Hartington, dans un discours qu’il a prononcé l’autre jour à Edimbourg, n’a pas déguisé ses préoccupations. Sans se séparer du ministère, il n’a pas caché qu’on avait peut-être abusé de la coercition avec les Irlandais, il a môme proposé une sorte de sclf-governmenl pour l’Irlande. Lord llartington a visiblement des inquiétudes, et au banquet de Mansion-llouso, lord Salisbury s’est lui-même prudemment défendu de rien augurer pour les élections prochaines ; il a spirituellement invo-
Rien de plus curieux d’une certaine façon, en effet, que ce qui se passe en Angleterre. Depuis quelque temps déjà, le premier ministre de la reine, lord Salisbury, tout entier à sa diplomatie extra-européenne, semble étendre son regard de tous les côtés, sur le Niger, sur le Zambèze, sur le lac Nyanza. Il est engagé en Egypte, dans le Soudan, à Zanzibar. Il fait des conventions avec l’Allemagne, avec la France pour la distribution de l’Afrique, des terres inconnues. Il négocie avec l’Italie pour Kassala, il impose sa volonté au Portugal qui fait aujourd’hui un dernier appel à sa modération. 11 réussira, c’est vraisemblable, et ces jours derniers encore, au banquet du lord-maire, il parlait, sans aucune jactance, d’ailleurs, de sa politique africaine qui n’est pas faite pour être désavouée par les Anglais. C’est fort bien ; mais tandis que lord Salisbury promène au loin sa diplomatie voyageuse et conquérante, étendant le domaine de l’Angleterre, le danger est tout prés de lui, autour de lui ; il est à l’intérieur, dans la résistance passionnée de l’indomptable Irlande qui ne se soumet pas du tout à la coercition, dans le mouvement croissant de l’opinion qui se détache de plus en plus du ministère et passe aux libéraux. M. Gladstone, toujours vert sous le poids de ses quatre-vingts ans, recommençait récemment sa campagne du Midlothian, rajeunissant par son inépuisable éloquence une popularité qui survit à tout. Ses propagandes ont déjà infligé plus d’une défaite aux conservateurs dans les élections partielles, et tout dernièrement les élections municipales ont été un nouveau succès pour les libéraux. Ce ne sont que des élections locales sans doute ; elles sont toujours un signe du mouvement de l’opinion. Un des principaux alliés de lord Salisbury, le chef des libéraux unionistes, lord Hartington, dans un discours qu’il a prononcé l’autre jour à Edimbourg, n’a pas déguisé ses préoccupations. Sans se séparer du ministère, il n’a pas caché qu’on avait peut-être abusé de la coercition avec les Irlandais, il a même proposé une sorte de sclf-governmenl pour l’Irlande. Lord llartington a visiblement des inquiétudes, et au banquet de Mansion-llouso, lord Salisbury s’est lui-même prudemment défendu de rien augurer pour les élections prochaines ; il a spirituellement invo-