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La haine de la société, obstacle au bonheur, et des autoritéssociales, causes de toutes les injustices et de tous les maux, étaitun des sentiments en vogue. « Est presque toujours méprisableet vil quiconque a une place dans les cadres réguliers de lasociété; et généralement aussi l’abjection du personnage est enraison directe de son importance sociale^’). »


La haine de la société, obstacle au bonheur, et des autorités
Deslauriers porte un toast, qui peut nous paraître fantaisiste,mais n’en synthétise pas moms les aspirations d’une grandepartie de la jeunesse de 1847 : « Je bois à la destruction complètede l’ordre actuel, c’est-à-dire de tout ce qu’on nomme Privilège,Monopole, Direction, Hiérarchie, Autorité, Etat! — et, d’unevoix plus haute : — que je voudrais briser comme ceci, en lançantsur la table le beau verre à patte, qui se fracassa en mille morceaux W. »
sociales, causes de toutes les injustices et de tous les maux, était
un des sentiments en vogue. « Est presque toujours méprisable
et vil quiconque a une place dans les cadres réguliers de la
société ; et généralement aussi l’abjection du personnage est en
raison directe de son importance sociale »<ref>Louis {{sc|Maigron}}. ''Le Romantisme et les mœurs'', p. 361.</ref>.


Deslauriers porte un toast, qui peut nous paraître fantaisiste,
Prenons les idées du brave Dussardier, un des rares personnages sympathiques du livre. « Tout le mal répandu sur la terre,il I attribuait naïvement au Pouvoir; et il le haïssait d’une haineessentielle, permanente, qui lui tenait tout le cœur et raffinait sasensibilité... Qu’il (Sénécal) fût coupable ou non, et sa tentativeodieuse, peu importait! Du moment qu’il était la victime del’Autorité, on devait le servir ^’\ »
mais n’en synthétise pas moins les aspirations d’une grande
partie de la jeunesse de 1847 : « Je bois à la destruction complète
de l’ordre actuel, c’est-à-dire de tout ce qu’on nomme Privilège,
Monopole, Direction, Hiérarchie, Autorité, État ! — et, d’une
voix plus haute — que je voudrais briser comme ceci, en lançant
sur la table le beau verre à patte, qui se fracassa en mille morceaux »<ref>''L’Éducation sentimentale'', p. 200.</ref>.


Prenons les idées du brave Dussardier, un des rares personnages
Flaubert nous fait l’esquisse d’un comédien de vingt-cinquièmeordre, qui, à ce point de vue, est tout à fait dans le goût dutemps : « Un drame, où il avait représenté un manant qui fait laleçon à Louis XIV et prophétise 89, l’avait mis en telle évidence,qu’on lui fabriquait sans cesse le même rôle; et sa fonction,maintenant, consistait à bafouer les monarques de tous les pays.Brasseur anglais, il insultait Charles I"; étudiant de Salamanque,maudissait rhilippe II; ou, père sensible, s’indignait contre laPompadour, c’était le plus beau^*^ »
sympathiques du livre. « Tout le mal répandu sur la terre,
il l’attribuait naïvement au Pouvoir ; et il le haïssait d’une haine
essentielle, permanente, qui lui tenait tout le cœur et raffinait sa
sensibilité… Qu’il (Sénécal) fût coupable ou non, et sa tentative
odieuse, peu importait ! Du moment qu’il était la victime de
l’Autorité, on devait le servir »<ref>''Idem'', p. 333.</ref>.
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Flaubert nous fait l’esquisse d’un comédien de vingt-cinquième
ordre, qui, à ce point de vue, est tout à fait dans le goût du
temps : « Un drame, où il avait représenté un manant qui fait la
leçon à Louis XIV et prophétise 89, l’avait mis en telle évidence,
qu’on lui fabriquait sans cesse le même rôle ; et sa fonction,
maintenant, consistait à bafouer les monarques de tous les pays ;
brasseur anglais, il insultait Charles I{{er}} ; étudiant de Salamanque,
maudissait Philippe II ; ou, père sensible, s’indignait contre la
Pompadour, c’était le plus beau ! »<ref>''Idem'', p. 250.</ref>
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M. Maigron nous signale encore comme caractéristique la
prétention à être littérateur ou artiste. « Tout le monde en ambitionne
le titre et la qualité, comme s’il y avait enclos dans ce
vocable, on ne sait quel charme magique, et quel pouvoir
mystérieux »<ref>Louis {{sc|Maigron}}. ''Le Romantisme et les mœurs'', p. 74.</ref>.


Frédéric, dès le collège, a une vocation bien arrêtée ; il veut
M. Maigron nous signale encore comme caractéristique laprétention à être littérateur ou artiste. « Tout le monde en ambitionne le titre et la qualité, comme s’il y avait enclos dans cevocable, on ne sait quel charme magique, et quel pouvoirmystérieux (*\ »
être « le Walter Scott de la France »<ref>L’''Éducation sentimentale'', p. 19.</ref>.


Puis il hésite, il est attiré à la fois par la prose, par la poésie,
Frédéric, dès le collège, a une vocation bien arrêtée; il veutêtre « leWalter Scott de la France » (^^
par la musique, par la peinture : « Frédéric, dans ces derniers

Puis il hésite, il est attiré à la fois par la prose, par la poésie,par la musique, par la peinture : « Frédéric, dans ces derniers

’■’ Louis Maigron. Le Romantisme et les mœurs, p. 361.

’*’ L’Education sentimentale, p. 200.

’^’ Idem, p. 333.

’*’ Idem, p. 250.

’’’ Louis Maigron. Le Romantisme et les mœurs, p. ^JJ^.

f) L’Education sentimentale.

p. 19.