« Les Exilés (Banville)/À Auguste Brizeux » : différence entre les versions

Contenu supprimé Contenu ajouté
maj
Ligne 1 :
 
<div class="text">
{{TitrePoeme|[[Les Exilés]]|Théodore de Banville|AÀ AUGUSTEAuguste BRIZEUXBrizeuxX}}
 
<pre>
Poète, il est fini l'âpre temps des épreuves.
Quitte nos solitudes veuves,
Et dors, libre et pensif, bercé par tes grands fleuves !
 
Au milieu des brumes d'Arvor
Repose ! Ta chanson va retentir encor
Sur la lande où sont les fleurs d'or.
 
 
 
poëte, il est fini l' âpre temps des épreuves.
Quitte nos solitudes veuves,
et dors, libre et pensif, bercé par tes grands
fleuves !
Au milieu des brumes d' Arvor
repose ! Ta chanson va retentir encor
sur la lande où sont les fleurs d' or.
Heureux qui resta pur en ces âges profanes !
Longtemps les jeunes paysannes
répéterontRépéteront tes vers, de Tréguier jusqu' à Vannes !
 
Ton poëme, génie ailé,
Ton poème, génie ailé,
volera sur le Scorf et sur le doux Ellé,
Volera sur le Scorf et sur le doux Ellé,
aux voix de leurs brises mêlé.
Aux voix de leurs brises mêlé.
Oui, le repos est bon à l' homme qui travaille !
 
Oui, le repos est bon à l'homme qui travaille !
Calme au sortir de la bataille,
dorsDors, celteCelte aux cheveux blonds, honneur de la Cornouaille.
 
Cornouaille.
Je n' étais qu' un enfant joyeux
lorsqueLorsque tu vins, armé de l' arc mystérieux :
alorsAlors je te suivis des yeux.
 
Et, tel que les héros à la belle chaussure,
toiToi, tu lançais d' une main sûre
lesLes traits dont l' univers adore la blessure.
 
Savant artiste, comme moi
tuTu chéris l' harmonie et son étroite loi :
elleElle eut les trésors de ta foi.
 
ô prodige inouï ! Magnifique mystère !
Ô prodige inouï ! magnifique mystère !
Malgré ses liens, l' ode austère
Malgré ses liens, l'Ode austère
s' envole, et ses pieds blancs ne touchent pas la
S'envole, et ses pieds blancs ne touchent pas la terre.
terre.
 
Qu' un esprit saturé de fiel
Qu'un esprit saturé de fiel
boive à sa coupe, où brille un vin substantiel,
Boive à sa coupe, où brille un vin substantiel,
elle l' emporte au fond du ciel.
Elle l'emporte au fond du ciel.
 
En vain ses préjugés aiguillonnaient ses haines.
C' en est fait, il n' a plus de chaînes :
tuTu le sais, fils béni de la mer et des chênes !
 
ô Brizeux, nous pouvons mourir
Ô Brizeux, nous pouvons mourir
seuls, avant d' avoir vu les roses refleurir !
Seuls, avant d'avoir vu les roses refleurir !
Mourons sans pousser un soupir.
 
Amoureux du vrai bien, notre lyre sonore
saluaitSaluait le feu qui colore
auAu lointain rougissant la merveilleuse aurore.
 
Nous avons frappé le vautour
quiQui se gorgeait de sang dans les coeurscœurs pleins d'amour ;
Nous avons crié : C'est le jour !
d' amour ;
 
nous avons crié : " c' est le jour ! "
ehEh bien, que le vulgaire en ses funèbres fêtes
accoureAccoure aux grandeurs qu' il a faites !
Le bruit et la louange aiment les faux prophètes.
 
Nous, contents d' avoir mérité
Nous, contents d'avoir mérité
qu' elle n' ait pas pour nous un regard irrité,
Qu'elle n'ait pas pour nous un regard irrité,
suivons la sainte vérité !
Suivons la sainte Vérité !
Quand se déchirera sur le temple d' ivoire
 
la nuée orageuse et noire,
Quand se déchirera sur le temple d'ivoire
elle se chargera d' éclairer notre gloire ;
La nuée orageuse et noire,
et, beaux de la haine du mal,
Elle se chargera d'éclairer notre gloire ;
elle nous donnera son reflet triomphal
 
sur le seuil du ciel idéal !
Et, beaux de la haine du Mal,
Mais, hélas ! Tant d' amis perdus à la même heure !
Elle nous donnera son reflet triomphal
Sur le seuil du ciel idéal !
 
Mais, hélas ! tant d'amis perdus à la même heure !
Permets une fois que je pleure,
museMuse ! Carcar le silence envahit ta demeure.
 
Ce prince parmi tes amants,
leLe grand Heine périt au milieu des tourments,
lesLes mains pleines de diamants.
 
ô déesse ! Il tomba sous le laurier insigne.
Ô Déesse ! il tomba sous le laurier insigne.
Puis l' ange implacable désigne
Puis l'Ange implacable désigne
Musset pâle et sanglant, qui s' éteint comme un
Musset pâle et sanglant, qui s'éteint comme un cygne.
cygne.
 
ô cher et sage paresseux !
Ô cher et sage paresseux !
Et tous deux pleins de jours ! Et voici qu' après eux
laLa tourmente emporte Brizeux !
 
Laisse-moi, laisse-moi le pleurer ! La nature
Laisse-moi, laisse-moi le pleurer ! la nature
allait bien à cette âme pure
Allait bien à cette âme pure
qui rêve maintenant sous une dalle obscure !
Qui rêve maintenant sous une dalle obscure !
Gémissez, fleuves qu' il chanta,
 
terre dont la mamelle auguste l' allaita,
Gémissez, fleuves qu'il chanta,
Izol, et toi riant Létâ !
Terre dont la mamelle auguste l'allaita,
Izol, et toi, riant Létâ !
 
Oiseaux, feuillages, mer à la voix de tonnerre,
quiQui jettes un cri funéraire,
enchantezEnchantez son sommeil : il était votre frère !
 
Près de vous, au jour redouté,
ilIl se réveillera pour l' immortalité,
brillantBrillant d' orgueil et de beauté.
 
'' Bellevue, juin 1858 : ''
 
</pre>\n</div></pre>
Bellevue, juin 1858.</pre>