« De l’interprétation géographique des paysages » : différence entre les versions
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I - Il est à peine besoin de dire que la plus large part, dans cette interprétation, doit être faite à l’étude du terrain. Elles sont l’architecture du paysage, parfois le paysage même. Suivant qu’elles se présentent unies ou accidentées, molles ou heurtées, un certain style prévaut, d’où sort un avertissement, quand il arrivera que telle partie du spectacle qu’embrassent nos yeux, s’en écarte. Le cas ne se présente pas seulement dans des contrées très bouleversées, comme les Alpes. Il suffit que telle roche friable succède à telle roche dure; il suffit que, comme dans le pays de Bray ou dans le Boulonnais, un simple bombement ait mis a nu des terrains de contexture différente, donnant plus de prise à l’érosion. Un œil exercé ne s’en tiendra pas à cette modalité générale. Dans la sculpture à laquelle se livrent incessamment les divers agents d’érosion, chacun avec sa manière propre de procéder, il y a des différences qui tiennent non seulement à l’inégale dureté des matériaux, mais à l’usure antérieure qu’ils avaient déjà
Il y a des paysages où la ligne domine, où tout, comme dans un temple grec, lui est subordonné : tels certains paysages du Sahara ou du Colorado, où la couleur ne fait qu’accentuer le dessin des lignes. Mais en général l’eau, la vie végétale, les œuvres de l’homme se combinent avec les linéaments du relief pour composer l’image qu’encadre l’horizon : l’eau, sous toutes ses formes et avec les phénomènes météoriques qu’elle engendre; la végétation, avec ses associations, ses caractères hygrophiles ou xérophiles, etc. Contentons-nous d’indiquer ces riches matières d’observations. Je laisse aux botanistes-géographes le soin de montrer les influences que l’eau, les différences de terrain, le voisinage de la mer exercent sur le manteau végétal. Mais, marchant à leur suite, je me propose de chercher si quelque trace de cet enchaînement se manifeste aussi dans les œuvres de l’homme.
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II - Sans tomber dans un excès de déterminisme qui ne serait pas moins fallacieux que son contraire, on peut affirmer que les groupements, cultures, mouvements et relations de l’homme n’échappent point à ce réseau de causes et d’effets. Les géographes de jadis se préoccupaient,
Il est vrai que ces types sont sujets à se modifier, comme il arrive pour toutes les œuvres humaines. Ici les populations descendent des hauteurs vers la plaine ; c’est le cas, de nos jours, en Algérie, en Grèce, dans plusieurs régions de la Méditerranée. Ailleurs, les populations qui sous l’action de la nécessité s’étaient concentrées en villages, s’éparpillent en maisons isolées; c’est par exemple le changement qui s’est produit en Scanie vers la fin du XVIIIe siècle. Enfin l’industrie moderne, différente de l’industrie antérieure qui n’avait besoin que d’une eau courante ou de l’orée d’un bois, agissant de fortes masses de produits et d’hommes, obligée par la concurrence de se concentrer sur certains points déterminés, vient apporter à son tour une puissante cause de perturbation dans les groupements humains : perturbation limitée cependant aux régions relativement restreintes où la grande industrie a fixé son siège.
Qu’est-ce à dire, sinon que dans la mobilité perpétuelle des phénomènes, certaines causes nouvelles entrent en jeu ? L’analyse reprend ici ses droits, il faut ranger ces différents types de peuplement d’après les familles auxquelles ils appartiennent. Le principe de classification est ici le genre de vie adopté. L’industrie groupe les établissements humains d’après d’autres lois que la vie agricole. De même, l’élevage apporte des modifications dans la répartition des habitations, dans leur disposition et leur entourage. Ainsi dans le pays d’Auge la dissémination prévaut, les fermes s’éparpillent entre les herbages et les arbres fruitiers. Les chalets alpins se disséminent sur les flancs des montagnes ; et là même où prévaut le type de villages
III - Par ses œuvres, par l’influence qu’il exerce autour de lui sur le
Je ne puis entrer ici dans les développements qu’exigerait ce nouvel aspect de la question. Bornons nous à faire remarquer que les établissements humains introduisent un élément de fixité dans les relations géographiques. Le fait seul qu’ils existent est une raison de subsister, car ils représentent un dépôt que les générations antérieures laissent aux suivantes, un fonds de mise en valeur qui dispense de recommencer sur nouveaux frais. En outre le réseau de routes et la formation de relations leur assure en bien des cas de nouvelles raisons d’être. C’est une plante qui étend ses racines. Cependant il en est qui dépérissent, qui meurent. Mais il est rare q’ils disparaissent, dans nos pays de constructions solides, sans laisser de traces : voyez les pays classiques des bords de la Méditerranée, ou même le Mexique et le Yucatan. Il y a, comme disait Ratzel, une géographie des ruines; et la persistance dont elles font preuve dans les contrées de la pierre et du mortier, est en elle-même un fait géographique. Les anciens auteurs croyaient exprimer le comble de l’anéantissement quand ils disaient : Etiam periere ruinae ! {{Option|traduction|display:none| [''Même les ruines ont péri ! '']}} Il y a pourtant des contrées où les ruines elles-mêmes périssent : celles où la fragilité des matériaux ne résiste pas aux assauts des agents naturels, aux atteintes d’une nature aussi puissante pour la destruction que pour la création; celles où les établissements humains, n’ayant pas poussé autour d’eux les fortes racines qui contribuent à assurer leur perpétuité, se déplacent, se transportent comme la tente du nomade. Il n’en reste plus alors que des traces semblables à celles que les botanistes retrouvent de la forêt, quand elle a disparu : d’humbles plantes; et dans le cas qui nous occupe, quelques végétaux ou légumes apportés par l’homme et continuant à végéter après son départ. Les voyageurs nous ont plusieurs fois décrit ce spectacle dans les régions cultivées de l’Afrique centrale.
Tel est le champ d’observations en partie inexploré qu’offre l’étude des établissements humains, et qui est une des substances fécondes de la science géographique. Je me suis borné ici à parler des observations
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