« Pour être socialiste » : différence entre les versions
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▲Il est temps ici de retourner en arrière et d’envisager de plus près ce mot dont nous nous sommes déjà servis tant de fois. Le capital qu’est-ce donc que ce talisman magique dont la présence ou l’absence transforme notre condition, notre état, notre vie entière ? Comment se présente-t-il à nous, quelle est son origine ou sa raison d’être, de quoi est-il fait ?
Si je dis de mon voisin qu’il est un riche capitaliste, cela signifie qu’il est propriétaire de terres et d’usines, qu’il possède ce qu’on appelle aujourd’hui des valeurs mobilières - actions de sociétés ou rentes sur un État, - qu’il a de grosses sommes placées chez son banquier ou chez son notaire et beaucoup de billets de banque ou d’or dans son tiroir. L’or et les billets de banque ne sont pas des richesses réelles, ce sont des monnaies, c’est-à-dire des valeurs fictives, imaginées dans un état lointain de la civilisation pour représenter les denrées et marchandises de toute espèce, pour en faciliter l’échange et la conservation. Les métaux précieux et le numéraire sont, dans le régime actuel, les moyens de paiement universellement adoptés, mais ils ne sont par eux-mêmes d’aucune utilité sociale. Il est aisé de concevoir une société parvenue à un haut degré de culture et de civilisation, où la monnaie ne serait cependant pas employée. Il suffirait d’adopter, entre les hommes, une autre façon de distribuer les produits de leur travail et les richesses naturelles. Si nous faisons, par l’imagination, l’effort de supprimer tout l’or et tous les billets existant sur cette terre, les intérêts privés d’une multitude d’hommes en seront momentanément bouleversés, mais, dans son ensemble, la richesse totale du monde n’en sera aucunement diminuée. Car, considérée en elle-même, la monnaie ne satisfait à aucun des besoins des hommes. Ce n’est pas avec de l’or qu’on mange, qu’on se chauffe ou qu’on se vêt, qu’on bâtit ou qu’on construit une machine. Nous en sommes venus, peu à peu, à considérer l’or comme le signe représentatif de toutes les valeurs, mais il n’est pas par lui-même une valeur, si ce n’est pour les rares industries qui l’emploient comme matière première. Un compte dans une banque n’est pas autre chose qu’une certaine quantité de monnaie mise en dépôt et que le dépositaire s’engage à nous représenter sur notre demande. Les rentes ou les actions ne sont pas autre chose que des monnaies à valeur variable et productrices de revenu annuel. À l’origine du compte, il y a un versement de numéraire. À l’origine du titre de rente ou de l’action, il y a une opération de placement, c’est-à-dire l’échange de la valeur mobilière contre une certaine quantité d’or ou de billets. Toute cette première catégorie de capitaux ne représente donc, sous une forme simple ou compliquée, directe ou indirecte, que la monnaie et ses divers modes de transformation.
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