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existence qu’en se chargeant de matière, et dans la proportion même où il s’en charge, mais à l’ordre du non-être. De sorte que le problème mallarméen avoisinera |
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108 LA POÉSIE DE STÉPHANE MALLARMÉ |
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existence qu’en se chargeant de matière, et dans la prd- |
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portion même où il s’en charge, mais à l’ordre du non- |
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être. De sorte que le problème mallarméen avoisinera |
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celui qui hanta Platon durant toute la seconde partie |
celui qui hanta Platon durant toute la seconde partie |
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de sa philosophie — celui du Sophiste et du Parménide. |
de sa philosophie — celui du ''Sophiste'' et du ''Parménide''. |
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— Comment donner au non-être une certaine existence ? |
— Comment donner au non-être une certaine existence ? |
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Et cette vision de l’absence chez Mallarmé, cette |
Et cette vision de l’absence chez Mallarmé, cette existence du non-être chez Platon, naissent pareillement, à |
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tence du non-être chez Platon, naissent pareillement, à |
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la fois, de la conscience et de la hantise des Idées, d’une |
la fois, de la conscience et de la hantise des Idées, d’une |
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croyance obstinée de visuels à l’être nécessaire et |
croyance obstinée de visuels à l’être nécessaire et suffisant du Mot. Le ''Nénuphar Blanc'' m’apparaît comme le |
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''Parménide'' esquissé, désarticulé et flottant d’un poète et d’un rêveur. Et sur un tel problème l’esprit de Mallarmé, comme la fleur sur l’eau, s’épanouissait voluptueusement. Vivant dans un monde subtil de sensations |
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sant du Mot. Le Nénuphar Blanc m’apparaît comme lo |
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Parménide esquissé, désarticulé et flottant d’un poèto |
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V d’un rêveur. Et sur un toi problème l’esprit de Mal- |
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larmé, comme la fleur sur l’eau, s’épanouissait volup- |
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tueusement. Vivant dans un monde subtil de sensations |
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et d’idées, il ne donnait pas au mot exister, ou plutôt |
et d’idées, il ne donnait pas au mot exister, ou plutôt |
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il n’éprouvait pas dans ce mot sa signification usuelle. |
il n’éprouvait pas dans ce mot sa signification usuelle. |
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Il le reculait et le dissolvait dans le songe. Au jeune |
Il le reculait et le dissolvait dans le songe. Au jeune |
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homme qui s’ennuie et qui veut l’action : Qu’est-ce, |
homme qui s’ennuie et qui veut l’action : Qu’est-ce, répond-il, qu’agir ? « Produire sur beaucoup un mouvement qui te donne en retour l’émoi que tu en fus le |
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principe, donc existes : dont aucun ne se croit, au préalable, sûr<ref>''Divagations'', p. 256.</ref> ». Il déniait volontiers — et peut-être était-ce un compliment — la réalité à autrui, contestant qu’il |
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fépônd-il, qu’agir ? « Produire sur beaucoup un mouve- |
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ment qui te donne en retour l’émoi que tu en fus le |
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principe, donc existes : dont aucun ne se croit, au préa- |
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lable, sûr ’». Il déniait volontiers — et peut-être était-ce |
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un compliment — la réalité à autrui, contestant qu’il |
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« eût lieu », — parfois à lui-même. Le tabac, la songerie, |
« eût lieu », — parfois à lui-même. Le tabac, la songerie, |
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la yole, la musique, ces quatre ailes du même |
la yole, la musique, ces quatre ailes du même génie |
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consolateur, lui paraissaient, enveloppant à la |
consolateur, lui paraissaient, enveloppant à la même |
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main et dans les mêmes lignes une absence de fleur et |
main et dans les mêmes lignes une absence de fleur et |
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une fleur d’absence — le Nénuphar Blanc du poème — |
une fleur d’absence — le ''Nénuphar Blanc'' du poème — abolir sous leur bref passage ce qui demeure obscurément le scandale de tout idéaliste, — l’existence. |
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abolir sous leur bref passage ce qui demeure obscuré- |
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ment le scandale de tout idéaliste, — l’existence. |
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1. Divagations, p J56. |