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— « Ni moi de lui, si c’eût été vrai… Je ne veux rien vous cacher… Et puis, maintenant, cela vous revient : c’était à lui, c’est à vous, je vous le dois… Si c’eût été vrai, je mentirais en ne disant pas que j’en aurais moins de regret. Mais je mentirais aussi (me croirez-vous ? ) si je ne vous disais que tel que c’est (que ce n’est pas), ce m’est encore plus beau et plus cher… »

Les deux femmes rentrèrent, sous la pluie, an petit hôtel du village, en attendant le train qui devait ramener Annette à Paris. Ruche veillait sur elle. Annette avait encore à remplir quelques funèbres formalités, à voir le fleuriste et le marbrier pour les soins à donner à la tombe, et elle voulut y retourner. Ruche l’accompagna partout, l’aidant de son esprit pratique. La pluie avait cessé. Les deux femmes, après uns longue station auprès de la fosse, firent ensemble, avant de retourner à la gare, quelques pas autour du petit tertre et elles s’assirent un peu au-dessous, dans la campagne. Ruche racontait ce que Marc avait été pour elle, les jours passés, aussi les nuits. Elle parlait avec sa franchise nue, exacte, sans voile, sans trouble, sans embarras, qui était comme un dessin net, d’un trait sûr, sans repentirs. Absence totale de sentimentalité et, dans sa précision réaliste, rien de vulgaire et d’appuyé. La mémoire de la narratrice était un miroir infaillible, mais de style. Annette, penchée sur lui, se taisait ; dans son chagrin, un sourire pâle, comme le soleil au travers de ce jour pluvieux de mai, passait en évoquant les deux enfants à la dérive qui, dans la nuit fiévreuse de Paris, s’entretenaient sur le même lit, en tenant chacun les pieds de l’autre dans ses mains.

Ruche disait :

— « Il m’a sauvée. J’allais au fond. Si je suis encore, et tout ce que je suis, c’est à cette nuit que je le dois, aux quelques jours passés ensemble, à cette sagesse,