
Le Prince,
Primus,
Secundus,
L’Astrologue,
Chascun.
Et puys, mes folz, qui triomphe, qui dance ?
Qui a le bruit ? Qui caquette a plesance ?
N’est il point temps que Chascun doeve rire
Et se esjouyr ?
Que de plesir il soibt nouvelle en France ;
Pour le present on ne le seroit dire.
La ou chascun souloiet rire il soupire,
Et ne seroiet trover si sage myre
Qui a son mal peust donner reconfort.
Conclusion : toult va de mal em pire,
Tant hault que bas, soit reaume ou empire,
Et, se Chascun se plaint, il n’a point tort.
Par Dieu, Chascun a eu le temps bien fort.
Depuis dix ans, et toult par le discort
Des principaulx.
Point pour nyent n’en faisoit son raport.
Ce les signes ne sont d’ung bon acort.
Les allemens[2] ne seroient aler bien.
Chascun se plaint.
Chascun dist qu’il n’a rien.
Chascun seufre des douleurs non pareilles.
Propos final, je veul dire et maintien
Que nous sommes cheus es ans de mervelles.
Tel ne dit mot qui fait grandes orelles.
Qui toultez foys n’en pense de rien mains.
Tel fait penniés qui feroit bien corbelles,
Qui luy mettroit de bon boys entre mains.
Les ellemens sont de infection plains,
Et ont regné quelquez faulcez planettez.
Je ne croy point que Lombars ou Rommains
N’y ayent jetté quelques choses infettez.
Comment, diable ? Se sont quasi profettez
Parmy Paris, puis ung an, et en court[5].
Leur seront pas ung jour leurs barbes faitez
Et les cheveux abregés sur le tourt ?
Se Justice ce bien ne vous resourt,
Toult est perdu.
Et implique que le monde fut gourt,
Se Justice n’est en son signagogue.
Hau ! qu’est ? Hau ! qu’est ?
A son parler je l’ay bien recongneu.
Faitez voye, qu’il entre, au pedagogue.
Honneurs, sires !
Nostre maistre !
Ce que j’ay dist desja deux ou troys foys ?
Il m’en souvient, je l’ay bien retenu ;
Menti n’avés d’un seul mot a tous troys.
Pensés, enfans, que je m’y recongnoys
Auchunement, celon droitte escripture ;
Mès Dieu peult toult, qui est le roy des roys,
Et son plaisir fait d’umayne nature.
Tant de proucez nourir ?
Qui court ainsi durant ceste ceson.
Par Dieu, par Dieu, tant que le signe dure,
L’ær ne sera net de ceste poueson.
Quel signe esse, venons en la raison,
Qui de venin est tellement guarny ?
C’est Gemini, qui regne en la maison
Du haust dieu Mars[10].
Ceras tu point une fois forbani
De ce climat par ta faulte vileine,
Et que le monde fust en pais et uny,
Sans tant d’esteurs ?
Tel a esté bailly et capitaine
Qui maintenant se voyt desapointé
Par Gemini[12].
Tousjours y a de la duplicité.
Dieu se joue des grans.
Faire le peut : justice est a sa dextre.
Quant il a tout bien veu et escouté,
Pugnir il peut come seul juge et maistre,
Et ne soit on auchun remede mettre
A son grant coupt. Il n’esparne personne.
Autant luy est le lay comme le prebstre,
Quant ungne foys a plaisir s’y adonne.
Dieu ne a regart n’a chapeau ne a couronne.
Quant il luy plaist donner mortel assault,
En ung instant sans auchun cry le donne,
Sans envoier messagier ne herault.
Or sa, maistre, ung pou parler nous fault
D’auchuns signes merveilheus advenuz
Puis auchuns temps que nous avons congnus :
Princes mourir en leur fleur de jeunesse,
Prebstres bruller, prendre Dieu a la messe
En commetant commune vitupere,
Gens se pendre, le fils tuer la mere,
Gens verolés sans quelque medicine.
Bien dire fault que c’est quelque mistere,
Ou que couru il a ung maulvais signe.
Il faut craindre pugnition divine
Plus que le temps pour humain sentement.
Et l’erchaufault qui cheut derrienement
A ses joustes[17] ?
Regnant adonc, selon mon jugement,
Toult ne fust pas ja ainsi tempesté.
Venus regnoit, qui hait virginité
Et ne meust gens que a delis et luxure ;
Par quoy je croy, selon la verité
Et le raport de la comunité,
Que admener peult ceste horrible avanture.
Dieu veult jeu.
Dieu peult autant qu’il fist jamais.
Voire, mais en telle laidure
Tel le seuffre qui n’en peult mais.
Qu’en dictes vous, maistre ?
Grans differences d’en parler,
Car je trouve, je vous proumès.
Grandes influences en l’air.
Sy ne devés vous point celer
Vérité.
Bien poués dire et reveler
Ung petit des choses publicques.
Toutes estoilles erratiquez
Couroient tant que c’est grant horreur ;
Mesmes aulx signes pramatiquez
Trouveroys le plus grant erreur.
Mars, qui est prince de feureur,
Par prebstres conduit ces bataillez
Et les commet en sa chaleur
A lever suscites[25] et taillez.
Ce n’est pas ung jeu de troys mailles
Q’i dist, enfans.
Chassés moy ung tas de prebstrailles
Qui s’entremettent des assaulx[26]
Pour avoir lez rougez chapeaux,
Ainsi que aultrefoys declara.
Puis que Rouen est a ces saulx,
S’il treuve d’avoyne monceaulx,
Ne doubtés qu’il en mengera[29]
Ainsy minor bursa[30] sera
De toutes pars mal demenee.
Tant que le signe durera
De Gemini, on ne verra
En l’air chose bien ordonnee[31].
L’Esglise est toutte desrunee,
Tant que l’air en est empesché.
Nous voyon tel qui a preché
Que c’est contre les Escriptures
De tenir ensemble deulx cures,
Qui present n’en fait poaint pechié.
Ugne abaye et une evesché,
On n’en fait plus de conscience.
C’est ung hochepot tout poché
Qui s’en va par une dispense.
Dieu voit tout.
Et crains bien, s’on n’y remedie,
Q’en l’air ne souet quelque influence,
Cause de quelque epidimie.
Ha ! Jhesus !
Regardés ; j’ay ouy auchun.
Faites luy voye ; c’est Chascun,
Qui se plaint de sa maladie.
Ung peu de repos, je vous prie !
Car, par mon Dieu, je suis lassé
D’avoir eu tant, le temps passé,
De pertes et de mengeries.
Qu’as tu, Chascun ?
Pas ne me plains de teste saine.
Je congnois par l’astrologie
Que minor bursa ne est pas plaine.
C’est ce qui m’a donné la paine
Que j’ay : j’ay la teste tuee.
Pour poier le chapeau d’ung moyne
Ma bource est toute evacuee.
Ainsi que ung loup a la huee,
En m’a chassé et tot et tart[40].
La choze ne sera muee
Tant que Sol[42] y aist son regart.
Dict on pas qu’en aulchune part
On a veu des egles voler
Et faire emotion en l’air ?
D’ou vient ceste aparition[43] ?
C’estoit en l’ombre du Lyon
Orgueilleux, fier et vallereux[44] ;
Mais Mars[45] a esté vertueux,
Qui a chassé de son vergier
Les egles qui vouloient menger
Ces fruis.
Vesy haulte besongne.
Exemple en la haulte Bourgoinne
Du commencement de dangier’.
Monstre poaint signe de changer[47]
Le temps ? Dites en vérité.
Par Dieu, je n’y sçay que songer ;
Point n’y vois bone qualité.
Puis que Virgo en est osté
Et que Justice in Cancro[50] dance,
Gemini a auctorité,
Je n’y prens point bonne esperance.
Au mains sur le climat de France
Se Virgo regnat seulement,
Ce seroit quelque demonstrance
D’avoir auchun aligement.
Venus a le gouvernement
Present en plusieurs regions,
Tant que par empoisonnement
Elle infaite religions.
En vos pronostications
Que trouvés vous qui nuyre puisse
Plus au quatre completions ?
Les maulvaises conditions
D’ambition et de Justice
Cheus au signe de l’Escrevice
De Justice signantement,
Dangier est s’il y a eclypse
En Chatelet ou Parlement
Touchés moy principalement
De ces eclipses. Qu’esse a dire ?
C’est a dire un aveuglement :
Qu’on ne voit plus Justice luyre.
Grogne Gaultier, voycy ung sire
Qui dira mirabilia.
Il ne dit que ce qu’il y a
Et qu’on voit le monde conduire.
Viene qui voudra contredire :
Il est eclipse voyrement
En plusieurs lieux au temps present.
Quant bonne Justice luyroit
Et n’aroit poaint d’empeschement,
Tel vit qui au gibet seroit.
Qui Justice n’empecheroit,
Tel contrefait du gentilastre
Qui seurement au coing de l’atre
Par povreté se coucheroit.
Par ainsi Virgo regneroit.
Par ainsi Dieu omnipotent
Tant de ces biens nous donneroit
Que Chascun en serouet content.
Qui bien attent ne sourhatent[61].
Enfans, poaint ne vous coroussés ;
Je sçay aulchun signe patent
Que les grans dangiers sont passés.
Affin que trop ne vous lassés,
Vous ayrés la chanson nouvelle.
Je veulx regarder une estoille
Ce temps pendant qu’on chantera ;
Car je crois bien que dessus elle
Ma pronosticque ce faira.
Faites ainsi qu’il vous plaira.
Chantons, chantons joyeusement
Cependant qu’il regardera
L’orbiculaire mouvement.
C’est chanté gracieusement.
Cela oste melencolie,
Mais chascun a l’entendement
Sy trouble pour le temps present
Qu’il n’a plaisir en chanterie.
Avoir plaisir, bon gré ma vie !
Qui seroit de plaisir feru,
Avoyt la grande pilerie[66]
Qui le temps passé a couru ?
Et, se Dieu ne m’eust secouru,
Je ne crois pas qu’en desplaisance
En ce danger fusse encouru
De tout metre en dessesperance.
Or revenon a la substance
Des elemens.
Ne sont qu’en tresbonne ordonnance ;
Le dangier gist aux mouvemens.
Elevon nos entendemens
Sus ce poaint.
Car jamais Mars n’eust entreprins,
Quoy que fust homme furieulx,
Vallereux et luxurieulx,
Prendre la deesse Venus
Qui fust fame de Vulcanus,
Se n’eust eu quelque mouvement[69].
Vela, je croy, entendement
Par quoy les grans astrologaus,
Comme Macrobe et ces egaux,
Mars planete a Mars comparerent,
Pour cause qu’il considererent
Que toute infortune venoit
Quant ceste planete regnoit,
Et sera tant que regnera.
Mais, qui point Mars ne mouvera
A trouver quelque brouillement,
Je croy qu’il se reposera
Tant que le monde en pais sera.
Au deable le mouvement !
Le feu roy fust paisiblement
Vivant a son païs de France,
Qui ne l’eust meu soubtilement
D’aler a Napes vitement
Perdre beaucoup sans recouvrance[71].
Vela une belle plaisance !
Pour avoir une rouge chappe
A ung tresorier de finance
Y faloit aller voir le pape[72] !
Il est bien eureulx qui eschape
De ces mouvemens geminaux,
Car, quant l’ung contre l’autre frape,
Mars nous donne divers assaulx.
Dieu gart le roy et ces vassaulx,
Qui bien ayme le sang rouyal,
De aversité et de tous maux,
Et de mouvement geminal[74] !
Or revenon au principal.
Que court il ?
Eclipse de lune.
Tousjours deffaute de pecune,
Se ce n’est en major burssa ;
Car, quant de la bourse commune,
Il n’y a plus rien, grant piessa.
Or sa, de par le deable, sa !
In manu sancti sanctorum.
Je crois que jamais ne seron
Nectement hor de ceste ordure.
Non pas, tant que l’estoille dure
Qui fait tant de ces mouvemens.
Taison nous, soions patiens,
Car le regne de Saturnus
Qui nous a longuement tenus,
A toute sa laide grimace[77] ,
Est passé, et sommes venus,
Ce Dieu plaist, au regne de grace.
Dictez vous que Saturnus passe,
Alant son pas, voire sanguin ?
Dangier n’y a que de la fin,
Car j’ay mainte foys oy dire
Que a la queue gist le venin.
Il est vray, ce serouet le pire.
Pourveu que Saturne ne tire
A faire sa conjunction
A la queue du Scorpion,
C’est fait ; elle ne peut plus nuyre.
Son cours est passé.
Puis que la chose vient a point,
En vostre esprit trouvés vous point
Se l’annee bonne sera ?
Ouy, la terre portera
Ce que deussent porter les eaux.
Quoy ? Du poisson ?
Et grant force de maquerelles.
Or bien, voicy grandes novelles.
Nous en airons donc grant marché.
Mès seront chiers.
En saisons quelles ?
Avecques deulx ou trois pucelles
Ung coulera ungne evesché.
Bon homme, avez vous bien changé
Si tresavant en vostre espere ?
Je y ay deja veu et peché
Le fis macquereau de sa mere
Et de sa seur.
Nous en serons empoisonnés.
Qui, dyable, les a amenés,
Que l’on ne les gete a la mer ?
Se n’est point viande a aymer ;
Fy ! c’est viande a laboureux[85] .
Et, par Dieu ! quant les grans seigneurs
Veullent menger de bons morseaux,
Maistre d’ostel et gouverneux
Ne servent que de maquereaux.
Revenons au poins principaux.
Selon le cours de la saison,
D’autres biens airons nous foison ?
Ouy, mès que le temps se change,
Car, par ma foy, la veneson
Me semble encore bien estrange.
Regardés.
Par le benoist ange,
Je n’y voy encore aparence
Qu’il y ait riens en pascience ;
Il semble que le deable y court.
Par Dieu, je suis en difference
Que n’ayons de la pestilance
Ce Sol ne reluyst en sa court.
Il faut qu’il luise, bref et court,
Et que Justice soit sus terre.
Par m’ame, s’elle ne se sourt,
Les ellemens seront en guerre
Et viendra feu, pluie, tonnerre
Sur toutes regions tonner,
Tant que les plus grans mis en serre
Ne seront quelle part tourner.
Face Justice gouverner
Chascun et garder ses estas.
On ne verroit point tant regner
De simonie et d’apostas.
Voisent gendarmes au debas.
Voisent les prestres au monstier
Sans estre de guerre advocas.
Chascun doit faire son mestier.
Voyse le bon docteur preschier,
Ainsy qu’il treuve en ces gerandes,
Et non pas chascun jour plaider
Pour avoir cinc ou .vi. prebendes.
Voisent les prelas au kalendes
Revisiter leur eveschés,
Non pas exiger les admendes
Pour punir les petis pechiés.
Moynes doibvent estre couchés
En dortoys, non pas en chasteaux,
Et en leurs clouetres cachés,
En guardant leurs veux moniaulx.
Voysent marchans, comme lyaux,
De marchandyse prendre cure
Et non pas, comme desloyaulx,
La prester ou vendre a usure.
Vela de quoy vient ceste ordure,
Qui guate chascun element,
Et puis la puante luxure
Qui regne generalement.
On le presche publiquement ;
On monstre au doy, disant : « C’est telle »;
Mais il semble, par mon serment,
Qu’onques n’en ouyrent novelle.
Pourtant est l’edit sollennelle
Des ellemens tout en discort.
Par mon serment, je vous revelle
Que Roan est vilain et hort[98].
Ha, Dieu ! airai ge mal confort ?
Serai ge tousjours sans cesser
En ce point ?
Et ne te fault point courroucer.
Je veulx de ton estat penser
Et te faire des medecines ;
L’espere en ce point fault laisser ;
Trop avons veu de maulvais signes.
Vous congnoissés vous aulx urines
Ou au pouce ?
C’est une de mes grans doctrines
Pour mallades solliciter.
Voyre, je luy vis visiter,
Deux ans a, l’uryne du Monde,
Et dist tropt bien qu’il y abonde
De mauvoys sang entour le chef[102]
Nous sommes hors de ce meschef ;
Le temps est bien changé depuis.
Par Dieu ! se je n’ay ung relief
De ma douleur, perdu je suis ;
J’é tant souffert que plus ne puis.
A ! mais a cest advenement
De regne, qui m’eust ouvert l’uys
Pour avoir quelque amendement !
Il t’amendera.
Je n’en voy quelque apperssevance.
Tays toy. Pour ton alligement
On tiendra les estas en France[104].
Sa, je veuil voir la doulleance
De Chascun. Baille moy ton pouce
Ung peu.
Pour me mennier doulcement ?
On m’a traisté si rudement
Le temps passé que c’est horreur.
Chascun, je congnoys ta douleur :
Tu es vuydé, je le voy bien.
Sy vuydé que je n’ay plus rien.
Je ne sçay quelz appoticaires
M’ont donné de si grans clistaires
Qu’il ne m’est peu riens demeurer.
Du remide ?
Prince, se estes vous qui debvez
Penser de Chascun.
Ceste charge.
L’intention du noble prince
Doib estre singulierement
A garder curieusement
Chascun.
Tant que a Chascun puisse complaire
En raison principalement.
Je veulx qu’on donne amendement
A chascun qui a enduré.
J’ay bien enduré vrayement ;
Mays, se on me traiste rudement,
Je ne sçay se je endureray.
De ce restauré
Que j’ay preparé
Tous les jours prendras ;
Croy que tu vendras
En l’an desiré.
Dittez vous que je mengeray ?
Or me dictes donc en effait
De quellez droges il est fait,
Car je n’ay cure de poueson.
Il y a primo de raison
Deulx onces, car sans quelque fable,
Nous airions bonne saison
Se Chascun estoit raisonnable.
C’est une chose veritable.
Sur mon ame, je vous en croy.
En après ?
Et ne nous seroient ja venir
Tant de maulx et de desaroy
Se Chascun voulust foy tenir.
Vela donc pour me entretenir :
Raison et foy.
Quant d’esperance,
Je ne t’en quiers plus souvenir,
Car tu en as grande abundance.
Vela doncques ma restaurance :
Raison et foy.
Quar il sont de grande sustance,
Se Chascun les savoit conduire.
Si Chascun, pour verité dire,
Raison de soy consideroet,
L’ung a l’autre ne vouldroet nuire,
Mais toult en union seroit.
Quant Chascun sa foy garderoet,
Raison auxi pareillement,
Certes pas on ne trouveroiet
Tant de procez en parlement.
Que reste plus ?
Après la restauracion,
Chanter et faire seulement
Vostre pronosticacion.
Sus qui ?
Mès nous n’en vendrions point a bout.
Du premier sault.
Pronostiquez en vous assault.
Il n’y a que ung mot de bon goust.
Quel ?
En effet, toult ne vault rien.
Parler fault d’ung austre mouyen
Par raisons condicionnellez
Parlés, vous, astrologien,
Qui vous cognoissez aux estellez.
Je diz que, ce choses mortellez
Sont tousjours en ce point contrerez,
Nous trouverons pareillz a ellez
Les mouvemens orbiculerez.
Je diz que, ce les adulterez
De Paris ne sont convaincuz,
Tant avocaz que commisserez,
De procureux et de notairez,
Il sera beaucoup de coquus.
Je dy que ce, pour des escuz,
Ou pour avoir force ducas,
Le pape dit qu’ung monachus
De saint Benoest ne le soeit plus,
Il sera beaucoup de apostas.
Je diz ausi : ce les estas
Des goriez qui courent en France
Ne changent et tombent au bas,
Il sera grant charté de dras
Et si sera peu de finance.
C’est pronostiqué en substance
Et n’y a nullez menteries.
Je diz : ce les grans pilleries
Qui ont couru on n’amenuise[127],
Il sera plus de mengeriez
De povretez et diableriez
Que en Sayne il n’y a de menuise.
Je diz : tant que les gens d’Eglise
Se mellent du fait de la guerre,
Qui qu’en parle ne qu’en divise,
Nous n’arons ja pais sur la terre.
Il est ausi cler qu’est le voirre :
Ce n’est point a eux d’en parler.
Pensés bien que le bon saint Pierre
N’avoit garde de c’en meller.
Je diz : ce on ne fait aller
Hors de France ung tas de mutins,
Lesquelz ne font que grumeller,
Il sera beaucoup de hutins.
Veniciens et Fleurentins
Avecquez Franchoys, notez bien
Qu’on verra ung de ces matins
Que l’assemblement n’en vault rien.
Dieu gard le roy Treschrestien
Par sa souveraine puissance !
Mès je diz que Venicien,
Millanoys ne Italien
Jamez ne veulent bien en France.
Je diz que, ce la contenance
Des fames de Paris ne mue,
Telle n’a de mal souvenance
Qui sera paillarde tenue.
Je diz auci : s’on n’abitue
Enfans a mieux savoir leurs pars,
La science sera teüe,
Et verrons toult d’ugne veüe
Beaucoup d’anes mestres aux ars.
Je diz auci : se gros pillars
De Chatelet ou Parlement
Ne sont pendus de malles hars,
Les procez pris dedans ses parcs
I demeureront longuement.
Je diz auci pareillement :
S’on fait au vin dans les seliers,
Ceste annee auchun broulement,
Nous y verrons finablement
Beaucoup de mauvez taverniers.
Je diz : s’on seufre aux cordeliers
Ou aux quarmes courir la ville,
Il feront en divers cartiers
Des confusions plus de mille.
Conclusion, c’est de prier
Pour le roy principalement
Que Dieu le gard de varier
Par ce geminal mouvement.
C’est le grant danger vrayement ;
Mès j’ay ja bonne confidence
Au restaurer premierement
Et au nouvel advenement,
Que Dieu y mettra providence.
Enfans, nous airons patience
Tant que la revolucion
Du cours du temps a l’influence
Aist austre disposicion.
