Recherches bibliques sur le culte des chrétiens.djvu/Promesse II


II

J’aborde maintenant la promesse relative à la cène du Seigneur, promesse qui nous assure que sa mort est, par ce repas de foi, annoncée jusqu’à ce qu’il vienne (1 Cor. XI, 26).

La célébration de la cène faisait, comme nous l’avons vu[1], partie du culte primitif de l’église et y occupait une place importante. Nous voyons les frères assemblés à Troas, le premier jour de la semaine « pour rompre le pain » (Act. XX, 7) ; et le Seigneur, en instituant ce saint repas, dit à ses disciples : « Prenez, mangez : ceci est mon corps qui est donné, qui est rompu pour vous ; faites ceci en mémoire de moi ! De même, en distribuant la coupe : Buvez en tous, car ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance, répandu pour plusieurs en rémission des péchés. Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang, qui est répandu pour vous. Faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez » (Math. XXVI, 26, 27, 28. Luc, XXII, 19, 20. 1 Cor. XI, 24, 25).

La cène est donc tout d’abord un mémorial de la mort du Sauveur. Dans cet acte nous jetons sur sa croix un regard rétrospectif qui met nos cœurs en communion avec sa mort (1 Cor. X, 16). Mais il y a plus : Il a voulu que nous mangeassions ce pain qui représente son corps et que nous bussions ce vin qui représente son sang ; ce qui exprime d’une manière touchante que nous nourrissons nos âmes du mérite parfait de son sacrifice, et que pour nous, par notre foi, « sa chair est une vraie nourriture et son sang un vrai breuvage » (Jean, VI, 55). Enfin, le Sauveur a voulu que ses saints célébrassent ce repas, non pas isolément, mais ensemble, participant tous au même pain et à la même coupe, ce qui exprime si pleinement que les croyants sont un seul corps, « car ils participent tous au même pain » (1 Cor. X, 17).

D’après cela, l’institution de la cène fait naître ces deux questions :

1° Qui doit communier ?

2° Avec qui les chrétiens doivent-ils communier ?

Cher lecteur, quel effet produirais-je sur vous si je répondais à ces deux questions de cette manière-ci : « Les disciples seuls doivent communier ; mais, en même temps, les disciples doivent communier avec tout le monde ? » Cependant c’est là ce qui se pratique et ce qu’on est bien décidé à continuer de pratiquer dans la chrétienté prétendue ; et c’est une de ses déviations. Aussi ma seconde question est-elle généralement évitée comme importune. Ou bien on nous renvoie à 1 Cor. XI, 28 : « Que chacun s’éprouve soi-même, et ainsi qu’il mange de ce pain et qu’il boive de cette coupe ; » et cela sans prendre garde que ces paroles n’ont aucun rapport à la question de savoir avec qui devaient communier ceux auxquels elles étaient adressées. Cette question-là était déjà toute décidée à Corinthe, et tous les disciples y étaient en communion les uns avec les autres « comme sanctifiés en Jésus-Christ » (1 Cor. I, 2) et membres de son corps. Si Paul les exhortait à s’éprouver eux-mêmes, c’était pour les détourner des communions in dignes et les engager à se bien convaincre que, en mangeant le pain et en buvant la coupe, ils y discernaient spirituellement le corps et le sang du Seigneur. Les chrétiens qui connaissent par expérience la relation de la cène avec la communion fraternelle en Jésus-Christ, obéissent sur ce point à d’autres enseignements qu’à ceux de Babylone. Je me rendrais, n’est-il pas vrai, coupable d’hypocrisie, en professant dans la cène une foi que je ne posséderais pas. Serais-je moins hypocrite en professant dans la cène, envers les communiants de la multitude, une communion spirituelle que je n’éprouverais pas et que leur état évident d’irrégénération me mettrait dans l’impossibilité de ressentir ? « Parce qu’il y a un seul pain nous sommes un seul corps, car nous sommes tous participants d’un même pain » (1 Cor. X, 17).

Mais je passe à d’autres considérations pratiques.

Pour former nos assemblées de communiants chrétiens, reconnaissons comme nos frères et nos sœurs toutes les personnes chez lesquelles nous apercevons la repentance envers Dieu et la foi en Jésus-Christ (Act. XX, 21), la nouvelle naissance (Jean, III, 3) et la présence de cet Esprit duquel un apôtre nous déclare que si quelqu’un n’a pas « l’Eprit de Jésus-Christ il n’est point à Lui » (Rom. VIII, 9).

Accueillons nos frères quelles que soient les dénominations diverses auxquelles ils appartiennent. Dans des réunions de communiants il n’y a ni baptistes ni pédobaptistes, par exemple : il n’y a plus que des chrétiens, et toutes les désignations humaines s’évanouissent momentanément.

Accueillons aussi les croyants les plus faibles, pourvu que nous puissions discerner chez eux quelques indices de vie spirituelle. La cène n’appartient-elle pas à tout disciple, et voudrions-nous risquer de priver de cette précieuse bénédiction, même le plus chétif des fidèles, lorsqu’il n’est pas dans un état de chute ?

Et après avoir pris toutes ces précautions indispensables, gardons-nous de considérer nos réunions de communiants comme étant, par cela seul, absolument pures et composées uniquement de vrais chrétiens où de chrétiens impeccables. Ne perdons pas de vue que nous accueillons au milieu de nous comme frères et sœurs en Jésus toutes les personnes qui nous paraissent nées de Dieu ; mais que nous ne pouvons faire davantage et que la connaissance du secret des cœurs appartient au Seigneur seul. L’église, dans sa réalité spirituelle, ne contient, sans doute, que des chrétiens véritables ; mais sur la terre et dans la pratique, nous ne pouvons agir qu’en relation avec l’église apparente.

  1. Page 7.