Recherches bibliques sur le culte des chrétiens.djvu/Le Culte au milieu de l’église démembrée


Le Culte au milieu de l’église démembrée.

Chacun comprendra sans doute que nous entendons ici par le culte, non pas le culte personnel que chaque chrétien peut rendre à Dieu individuellement et quelque soit l’état de l’église ; mais le culte collectif, le culte offert au Seigneur par des fidèles réunis. Ce culte ne peut être présenté en commun par tous les fidèles de chaque localité, puisque c’est précisément le morcellement de l’église, quant au culte, qui s’y oppose. Il ne peut donc être offert en chaque lieu que par des fragments de l’église. Or ce qui va nous occuper c’est la question de savoir ce que les croyants ont, d’après l’Écriture, le droit de faire pour établir, dans une mesure restreinte, une assemblée qui puisse servir le Sauveur d’un commun accord. Pour répondre à cette question, si importante dans la pratique, examinons ce qui nous est révélé soit dans l’Ancien soit dans le Nouveau Testament.

Nous remarquons d’abord que quand les Juifs furent de retour de la captivité de Babylone, quoiqu’ils fussent en petit nombre et que la plu part d’entre eux fussent restés dans la captivité, quoiqu’ils habitassent comme esclaves dans leur propre pays (Néh. IX, 36) et qu’ils se trouvassent privés de l’arche de l’alliance, des réponses d’Urim et Thummim et de la gloire qui apparaissait autrefois entre les chérubins et qui représentait la présence et l’habitation de leur Dieu au milieu d’eux ; néanmoins ils rebâtirent le temple, et cela d’après la volonté positivement manifestée de l’Éternel, qui même leur reprochait plus tard leur empressement « à courir chacun à sa maison, tandis que sa maison, à Lui, demeurait désolée (Agg., I, 2 à 9). D’après cela, les croyants de l’alliance de grâce ne sont-ils pas tenus, au milieu de l’état de chute extérieure de l’église, à faire ce qui est possible pour reconstruire, quoique en partie, un culte collectif ?

Si de là nous passons au Nouveau Testament, nous y trouvons essentiellement trois promesses qui sont des réponses à la question proposée. Et cela premièrement parce qu’elles concernent toute l’économie actuelle, et secondement parce qu’elles sont réalisables, quel que soit l’état extérieur de l’église ici bas.

Et d’abord le Seigneur a bien voulu s’engager à se trouver toujours au milieu, ne fût-ce même que de deux ou trois, réunis en son nom (Math. XVIII, 20). Cette précieuse promesse s’applique, en général et en particulier, à tout cas pour lequel des fidèles sont réunis en son nom, et peut recevoir sa réalisation malgré la dislocation de l’église, puisqu’elle s’applique même à deux ou trois disciples.

Deuxièmement, (dans 1 Cor. XI, 26) l’apôtre dit positivement aux chrétiens : « Toutes les fois que vous mangez[1] de ce pain et que vous buvez[2] de cette coupe, vous annoncez[3] la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne. » Ainsi jusqu’à ce que le Seigneur revienne, la cène est célébrée dans son église, quel que soit l’état de cette église. La cène, malgré les altérations que les hommes lui ont fait subir, la cène a été solennisée jusqu’à présent par les chrétiens, et même au sein de la Babylone, et elle le sera jusqu’au retour du Prince de la vie.

Troisièmement enfin, dans Éph. IV, 11, 12, 13, le Saint-Esprit, en parlant des dons que le Sauveur a répandus parmi les hommes, dit : « Lui-même a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs, pour l’assemblage des saints, pour l’œuvre du ministère, pour l’édification du corps de Christ ; jusqu’à ce que nous nous rencontrions tous dans l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, dans l’état d’un homme parfait, à la mesure de la par faite stature de Christ. »

D’après cette même épître, les apôtres et les prophètes sont les ministères fondateurs[4] du temple spirituel qui est l’église ; et les évangélistes, ainsi que les pasteurs et docteurs, sont des ministères continuateurs pour poursuivre la construction de l’édifice ; et cela jusqu’à ce qu’il soit achevé, jusqu’à ce que tous les membres de Christ se rencontrent dans la seule foi et que Christ, qui sans ses membres ne serait qu’une tête, vienne réunir tous les siens autour de lui et soit ainsi parvenu à sa pleine stature.

Quant à des promesses de rassemblement des saints sur la terre avant ce moment-là, le Nouveau Testament n’en contient aucune. Aussi tous ceux qui ont cherché à réunir les saints en un seul corps ici-bas ont-ils agi sans promesse et, par là même, sans puissance, et ont-ils vu échouer leur dessein, et même de manière à agrandir les déchirures de l’église. Nous pouvons prier le Seigneur de se trouver avec nous dans le culte et dans la cène, parce que nous possédons la promesse de sa présence. Nous pouvons prier le Maître de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson (Math. IX, 38), parce qu’il nous invite à le faire, et que de plus à nous possédons la promesse de ministères jusqu’à ce que son corps soit complet. Mais nous ne sommes pas autorisés à demander le rassemblement de tous les saints sur la terre, parce qu’aucune promesse ne nous en a été faite. On a cherché à appuyer l’espérance d’un rétablissement de l’unité extérieure de l’église ici bas sur Jean, XVII, 20 et 21. « Que tous soient un, ainsi que toi, Père, es en moi et moi en toi : afin qu’eux aussi soient un en nous, et que le monde croie que c’est toi qui m’as envoyé. » Mais on n’a pas pris garde que cette demande du Sauveur, laquelle a été exaucée partiellement, en ce que, au début de l’église, tous les saints n’étaient qu’un, n’a pas encore été exaucée complétement, puisque le monde n’a pas cru que Dieu y a envoyé son Fils ; et que cette prière ne recevra son entier exaucement que lorsque, par le pouvoir divin, l’église sera dans la gloire. « Je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, a dit ensuite Jésus à son Père ; afin qu’ils soient un comme nous sommes un. Je suis en eux et toi en moi, afin qu’ils soient consommés en un et que le monde connaisse que c’est toi qui m’a envoyé, et que tu les aimes comme tu m’as aimé. Père, mon désir est, touchant ceux que tu m’as donnés, que là où je suis ils y soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent ma gloire, laquelle tu m’as donnée, parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde » (Jean, XVII, 22, 23 et 24). Alors le monde, qui, au lieu de croire[5], a persécuté les saints, le monde, non pas croira, mais connaîtra[6] que le Père a envoyé son Fils.

Dans un écrit publié en 1843, j’avais dit : « Appliquons-nous à réunir, non pas les chrétiens, ce qui est une entreprise chimérique, mais des chrétiens, ce qui est une œuvre d’amour[7]. » Il me fut répliqué : « Ce que M. Olivier rejette est la volonté de Dieu. Ce qu’il veut est la commodité de l’homme[8]. » Mais l’auteur ne cita aucune écriture à l’appui de son affirmation.

Mais reprenons les trois promesses citées plus haut et recherchons ce que nous pouvons en recueillir quant à la question qui nous ocсuре.

  1. Non pas mangerez.
  2. Non pas boirez.
  3. Non pas annoncerez.
    Par suite de cette traduction vicieuse, on considère assez généralement cette parole comme ayant été prononcée par la bouche du Seigneur quand il institua la cène ; mais on ne réfléchit pas qu’il aurait dit : « Vous mangerez, vous boirez, vous annoncerez ma mort (et non pas la mort du Seigneur) ; tandis que Paul, lui, a écrit : vous mangez, vous buvez, vous annoncez, ce qui indique assez que ce n’était pas la première fois que la cène était célébrée et que les chrétiens étaient, au contraire, dans l’habitude bien établie de rompre le pain entre eux.
  4. « Édifiés sur le fondement des apôtres et prophètes, dont la pierre angulaire est Jésus-Christ » (Éph. II, 20).
  5. Verset 21.
  6. Verset 23.
  7. Essai sur le royaume de Dieu, page 103.
  8. Remarques sur la brochure de M. Fr. Olivier, intitulée : Essai sur le royaume de Dieu, page 23.