Rational (Durand de Mende)/Volume 5/Septième livre/Chapitre 39

Traduction par Charles Barthélemy.
Louis Vivès (volume 5p. 119).


CHAPITRE XXXIX.
DU BIENHEUREUX NICOLAS.


I. On lit que dans une église appelée Sainte-Croix, dépendante du monastère de la bienheureuse Marie-de-la-Charité, on ne chantait pas encore l’histoire nouvelle, ou l’office nouveau du bienheureux Nicolas. Les frères de ce monastère supplièrent instamment leur prieur de leur permettre de le chanter ; mais il le refusa positivement, disant que ce serait une chose inconvenante de changer les anciens usages pour y substituer des nouveautés. Et comme ils redoublaient leurs instances, il leur répondit avec emportement : « Laissez-moi, je ne veux pas que l’on chante des cantiques nouveaux, je dis plus, des chansons qui sont de pur amusement, dans mon église. » Advient cependant la grande fête annuelle de saint Nicolas, et les frères achevèrent les matines de la vigile, l’ame triste. Quand tous se furent remis dans leurs lits, voici que le bienheureux Nicolas apparut au prieur avec un visage terrible, et, le tirant par les cheveux hors du lit, le coucha sur les dalles du dortoir, et entonnant l’antienne O pastor œterne, à chaque note, avec les verges dont il était armé, il redoublait les coups les plus terribles sur le dos du prieur gémissant ; il chanta ainsi lentement l’antienne jusqu’au bout. Les moines, réveillés en sursaut par les cris du coupable, le reportent à demi-mort dans son lit, et quand il fut enfin revenu à lui-même, il leur dit : « Allez et chantez à grand chœur la nouvelle histoire de saint Nicolas. » (16).

II. Au temps de l’empereur Henri IV, les os du bienheureux Nicolas furent transportés à Benevent.