Quelques documents relatifs à la discipline établie par M. Darby et d’autres frères en Angleterre vis-à-vis de l’assemblée de Béthesda/commentaire 1


Quelques documents relatifs à la discipline établie par M. Darby et d’autres frères en Angleterre vis-à-vis de l’assemblée de Béthesda
James Attinger (p. 24-30).

Je me suis posé comme règle de ne pas vous occuper de choses que vous ne puissiez juger par vous-mêmes. Il s’agit de principes et non de tel ou tel fait. Je me permets pourtant une remarque par rapport à la circulaire de M. Darby, vous pouvez la contrôler, si vous le voulez, en écrivant à la personne dont il s’agit. M. Darby allègue l’opinion de M. Chapman, de Barnstaple[1], en faveur de son système, et il est très-vrai que ce frère et l’assemblée de Barnstaple furent épouvantés, au commencement, par les accusations d’hérésie, etc., et qu’ils s’éloignèrent pour un temps de Béthesda. Mais à l’heure qu’il est, non-seulement ils désapprouvent la discipline, mais ils croient aussi que les derniers écrits de M. Newton sont si clairs et si satisfaisants, qu’ils ont demandé que la question de son excommunication fût réglée par une conférence réunie dans ce but.

C’est à vous, mes frères, de juger si la lettre des dix conducteurs de Béthesda autorise les conclusions de M. Darby dans sa circulaire. Puis, n’est-il pas contraire au bon sens chrétien de supposer que toute une assemblée, telle que Béthesda, et que tant d’autres centaines de chrétiens après eux en Angleterre et sur le continent, recevraient sciemment et méchamment des blasphémateurs, des menteurs. Je dis que la pensée elle-même est monstrueuse. Sans doute, des chrétiens de nom se soucient peu de la foi et de la moralité chrétienne, mais croire que ceux que vous appelez encore « frères, » et quelquefois de « bons frères, » feraient cela, c’est tout simplement supposer une impossibilité. Comment tant de milliers de chrétiens seraient-ils devenus apostats en un jour ? Si Béthesda, et nous après elle, avons fait ce que M. Darby affirme de nous tous, nous ne serions pas même chrétiens. Si vous osez aller jusque-là, c’est à Dieu que vous répondrez dans la journée de Christ, mais c’est la seule conséquence logique des accusations de M. Darby. Aussi ne se fait-il pas scrupule d’écrire, sur ses frères, des choses qui font trembler. J’en ai les preuves en main, ce n’est pas ici que je les produirai, mais dans une conférence spéciale si on le demande.

On pourrait, sans doute, critiquer telle ou telle phrase de la lettre des dix conducteurs de Béthesda, mais peut-on dire que cette assemblée avait « formellement admis, le sachant et le voulant, » le système de M. Newton. Il me semble que la simple lecture de ces trois pièces démontre clairement que l’accusation est non-seulement fausse mais monstrueuse.

Plus tard, dans la même année, sept assemblées d’église furent tenues à Béthesda, entre le 27 septembre et le 11 décembre 1848. Les traités de M. Newton furent examinés. La conclusion en fut : « De ne recevoir à la communion aucune personne qui défend, maintient ou soutient les vues ou les traités de M. Newton. » — Cette décision fut écrite par lord Congleton, au moment où M. Müller la prononçait, ledit lord et M. Wakefield, de Kendal, étant l’un et l’autre présents. — Affaire de Plymouth et de Béthesda, page 30.

C’est relativement à ces réunions que le pieux et bienheureux frère M. Groves (maintenant auprès du Seigneur) s’exprime ainsi :

« Quoi ! six semaines de pénibles recherches, durant lesquelles toute autre assemblée et toute autre affaire furent suspendues, pour examiner la question et instruire chaque membre de Béthesda, dans le but d’obtenir un jugement juste et éclairé sur cette question difficile et embarrassante, c’est ne rien faire ! Quoi ! après un examen prolongé et des recherches faites avec prières ; après avoir désavoué M. Newton comme docteur, et refusé la communion à tous ceux qui défendraient, maintiendraient ou soutiendraient ses doctrines ou ses traités, tout cela c’est ne rien faire ! »

M. Trotter a la conscience de répondre :

« C’est une chose affligeante quand la seule réponse, qu’on puisse faire à un tel appel est « rien pour satisfaire la conscience de tout chrétien qui estime l’honneur de Christ et la pureté de la communion de sa maison plus que des efforts pour sauver les apparences et pour soutenir les intérêts d’un parti. »

Puis M. Trotter motive cette triste réponse de cette manière : (Voyez Affaire de Plymouth et Béthesda, p. 37-40.)

1° Béthesda n’a pas avoué le mal contenu dans la lettre des dix.

2° Cette décision ne contient pas de jugement, selon M. Trotter, quant aux personnes qui faisaient ombrage à Béthesda. Cependant ces personnes s’étaient retirées d’elles-mêmes. Puis des menteurs pourraient venir de chez M. Newton et les tromper à Béthesda, comme si cela ne pouvait pas arriver en tout temps et partout.

3° M. Trotter répète ici la première partie de son motif numéro deux, et il met en avant de nouveau le premier motif.

Que Béthesda agisse ou qu’elle n’agisse pas, qu’elle parle ou qu’elle se taise, c’est la même chose.

La Parole de Dieu déclare que si la sagesse qui vient d’en haut est « premièrement pure, elle est ensuite pacifique, modérée, traitable, pleine de miséricorde et de bons fruits, ne faisant point beaucoup de difficultés et sans hypocrisie. » — Jacques, chap. III, V, 17.

Vous avouerez, mes frères, que les juges étaient difficiles. Il est possible que si, dans cette occasion, les frères de Béthesda avaient retiré la lettre des dix conducteurs, la paix s’en serait suivie. A-t-on été conciliant des deux côtés ? Dieu seul le sait. Au mois de juin 1849, un certain nombre de frères de Rawstorne Street, à Londres, et d’autres endroits, adressèrent un appel à Béthesda, tendant à obtenir d’elle une « réunion ouverte à toutes les parties intéressées » pour l’examen des accusations dirigées contre elle et de sa défense. M. Müller répondit que cela ne pouvait pas avoir lieu sans que premièrement « on eut jugé ceux qui ont été manifestement coupables d’une marche tendant à la division et de calomnies grossières contre leurs frères. » Cette réponse fut donnée au nom de M. Müller et de ses compagnons d’œuvre. Pour ma part, je crois qu’ils auraient mieux fait en s’y rendant. Cependant ils se déclarèrent prêts à rendre raison de leur conduite à ceux qui ne se seraient pas compromis en soutenant MM. Darby et Wigram. (Voyez Affaire de Plymouth et de Béthesda, par Trot ter, pages 44-46). On dit que, dans ce moment, M. Darby retira sa circulaire. On parle d’une bonne visite qu’il fit à M. Müller ; mais, cessa-t-on d’en appliquer les principes ? Non ! Avait-on l’intention d’être moins rigide ? Peut-être ! Mais, dès lors, les remarques de M. Trotter et la conduite des frères laissent des doutes à cet égard. Mais les principes demeurent, quels qu’aient été les torts de part et d’autre. Et ce qui nous occupe, en ce moment, ce sont des principes, les principes de la circulaire de M. Darby. Par cette circulaire il a eu le malheur, l’immense malheur de se placer entre les assemblées et le Seigneur. Si M. Darby s’était borné à indiquer le mal, laissant aux assemblées le soin de faire ce qu’elles pouvaient faire, selon leurs lumières, la paix serait demeurée parmi nous. Mais établir tout seul que toute assemblée n’exerçant pas la discipline, comme il l’entend, est elle-même hérétique en tout et en partie, c’est se constituer apôtre, c’est s’attribuer à soi-même l’autorité et la puissance, dans l’église, au lieu de laisser aux églises avec leurs conducteurs, la conscience de leur responsabilité envers Dieu, selon l’autorité des Écritures. Et tant que vous accepterez ce principe, frères, vous maintiendrez les troubles et la confusion dans les églises du Seigneur.

M. Darby était libre de ne pas aller à une assemblée où il croyait que le mal était toléré, c’était même son devoir, mais il n’avait pas le droit, par les conclusions de sa circulaire, d’imposer sa conviction à d’autres, sous peine de retranchement. Nous ne savons que trop bien quelle discipline a été suivie depuis.

Avant de quitter cette question de Béthesda, il sera utile que je traduise quelques lignes de M. Wigram ; car, il faut le dire, cette circulaire de M. Darby avait donné libre carrière à toute espèce d’accusations contre ces frères de Béthesda. Si je reproduis cette pièce, ce n’est pas avec l’intention de diminuer votre respect et votre affection pour ce frère, qui a vieilli en se dévouant pour l’Église, même d’une manière peu ordinaire, et c’est bien l’amertume de cette discipline qui fait qu’on est obligé de parler des choses qu’on voudrait cacher. Le Seigneur sait quelle douleur j’éprouve en disant ou en répétant quoi que ce soit de cette nature, et je lui demande avec ferveur de nous rendre notre première unité dans la foi et dans l’amour, ne fût-ce que pour éviter de reproduire ces tristes détails. Mais la nécessité m’est imposée de chercher à vous éclairer, mes frères, sur la valeur de ces accusations.

M. Wigram avait publié une brochure intitulée : « Appel aux chrétiens de Béthesda. » Dans cette brochure, il cherche à démontrer que M. Craik est autant entaché d’hérésie que M. Newton, affirmant qu’il a trouvé dans les écrits de M. Craik la semence, les branches et le fruit de cette doctrine.

M. Wigram avait feuilleté certaines lettres pastorales de M. Craik, qui avaient servi depuis longtemps à édifier les enfants de Dieu. Il crut enfin trouver dans les extraits suivant la preuve de la culpabilité de M. Craik.

« Jésus, quant à son humanité, grandit (avança jusqu’à la stature d’un homme) dans le désert. Il était comme une racine sortant d’une terre altérée. » (Craik.)

M. Wigram dit que cette assertion « dégrade Christ, jusqu’à la position non-seulement d’un incrédule, mais aussi à celle d’un imposteur, et il ajoute que cela fut la semence de l’erreur de M. Newton. » (Wigram).

Puis, allant en avant dans ses accusations, il croit trouver dans ces mêmes lettres les branches et le fruit de l’erreur de M. Newton.

M. Craik avait dit, en faisant allusion au bois employé pour la construction du tabernacle : « On dit que le bois d’acacia a une grande puissance pour résister aux dégâts de la corruption et de la décadence ; ainsi l’humanité du Seigneur Jésus était libre de la moindre tache de mal moral, et son corps fut préservé de toute tache, même de corruption extérieure. » (Craik.)

M. Wigram tire de cette remarque la conclusion que Craik n’admet pas qu’il y eut « aucune vertu ou puissance intérieure, point de sel intérieur. » (Wigram.)

Comme si dans une lettre destinée à l’édification on mettait en doute tout ce que l’on n’expose pas d’une manière théologique et détaillée.

La troisième preuve des blasphèmes que M. Wigram impute à M. Craik est tirée des paroles suivantes :

« Il respira le même air et fut nourri par la même nourriture qui soutiennent de simples hommes ; les vents du désert de ce monde soufflèrent autour de lui, et comme la jeune plante avance graduellement vers la maturité, soit en hauteur, soit en vigueur, ainsi Jésus avança à travers les phases de l’enfance et de l’adolescence, jusqu’à ce qu’il parvint, en âge et en stature, à l’état de l’homme fait » (Craik.)

(Vous trouverez ces accusations pages 10 et suivantes du susdit ouvrage.)

Si on n’avait pas le témoignage du propre écrit de M. Wigram, on ne croirait pas qu’il fût possible que l’esprit de parti pût être aussi injuste. M. Craik a été beaucoup calomnié sur le continent au sujet de ces choses, cela a passé même de bouche en bouche, d’assemblée en assemblée. On lui reproche certaines expressions sur l’humanité du Seigneur Jésus que ma plume ne reproduira pas, et qu’il a lui-même en horreur. Eh bien ! mes frères, ce n’est pas lui qui les a employées, mais des opposants les ont présentées à M. Craik sous forme de demandes. M. Craik répondit à toutes ces questions dans la simplicité de son cœur, et toutes ces réponses revenaient à ceci : que Jésus pouvait, quant à sa nature, et souffrir et mourir, mais qu’Il ne put jamais mourir autrement que comme Agneau de Dieu, se donnant Lui-même pour la vie du monde. Je le tiens de sa propre bouche.

Je laisse maintenant la question de la discipline, telle qu’elle fut établie en Angleterre. Je ne vous donnerai pas les détails de la triste confusion, des déplorables divisions qui résultèrent de son application dans tout le royaume uni. Je ne comprends pas qu’on puisse aimer la sainteté de Dieu, et contempler de pareilles scènes sans s’humilier jusque dans la poussière. Qui ne serait abreuvé de douleur en voyant ces divisions de Londres, ces quatre tables dressées au nom de notre commun Maître à Plymouth et aussi à Bath, ces scandales de Jersey, renouvelés encore à Londres avec plus d’intensité ! Que de brebis du Seigneur dispersées ! Allez de maison en maison, mes frères, en Angleterre, et on vous racontera des souffrances personnelles qui feront dire : « Y a-t-il jamais eu de douleur semblable à notre douleur ? » Puis la France, la Suisse et l’Italie viennent avec leur triste cortège de maux. Le monde entier a été rempli de ces divisions ; jusqu’en Amérique, en Inde et dans la Nouvelle-Zélande. Le remède a été pire que le mal. Peut-on dire que le Seigneur ait ratifié cette discipline ? Ose-t-on parler après cela de l’unité de l’Esprit ? Peut-on la garder autrement que dans la paix ?

Je n’ai rien exagéré, mes frères, je le répète, je pourrais vous donner dans une conférence particulière des preuves douloureuses de tout ce que j’affirme.

J’en viens à l’établissement de la discipline en Suisse.


  1. M. Chapman, ministre de l’Évangile, Barnstaple, Devonshire, England.