Précaution/Chapitre XXXI

Traduction par A. J. B. Defauconpret.
Furne (Œuvres, tome premierp. 210-218).



CHAPITRE XXXI.


Ce couple connaîtra du moins la douceur d’un amour sincère.
Burns.


Le soleil venait de se lever sur une des plus belles vallées du comté de Caernarvon, lorsqu’une magnifique voiture de voyage, attelée de six chevaux, sortit majestueusement des écuries d’un superbe château, et vint se placer devant la grande porte, d’où l’on découvrait une perspective étendue qui comprenait les grands et fertiles domaines dont les revenus remplissaient les coffres du seigneur du lieu, et qui n’était bornée que par la belle vue du canal de Saint-George.

Tout dans ce superbe édifice parlait de la magnificence de ses anciens maîtres et du goût de celui qui l’habitait alors. Il était de forme irrégulière, mais chaque partie du bâtiment avait été construite d’après le style d’architecture le plus à la mode dans le moment où elle avait été érigée ; et maintenant, dans le dix-neuvième siècle, il offrait toute la magnificence que les barons déployaient dans le treizième, combinée avec le goût qu’avait épuré la civilisation des temps modernes.

Les tourelles élevées étaient colorées des vives teintes du soleil levant ; et les paysans du voisinage se rendaient à leurs travaux journaliers, lorsqu’une troupe nombreuse de domestiques vint se rassembler autour de l’équipage dont nous avons déjà parlé. La beauté des chevaux, la richesse de leurs harnais, l’élégance de la voiture, la superbe livrée des laquais, des postillons et des coureurs, tout attestait la fortune et le rang de leur maître.

Les postillons étaient prêts, attendant le signal du départ, lorsque les éclats de rire et les plaisanteries des domestiques firent place à un profond et respectueux silence ; un jeune seigneur et une dame venaient de paraître à la porte du château. Le jeune seigneur avait une taille imposante et les manières les plus distinguées ; mais en même temps il avait l’air si affable, que l’amour semblait avoir autant de part que l’obéissance à la promptitude avec laquelle ses gens s’empressaient d’exécuter ses ordres, et cherchaient même à les prévenir.

La dame était jeune aussi, et elle lui ressemblait beaucoup, tant pour les traits que pour l’expression de la figure. Le jeune seigneur avait un habit de voyage qui, contrastant avec le déshabillé du matin de la dame, annonçait qu’ils allaient se séparer. En effet, celle-ci lui prenant la main et la serrant dans les siennes, lui dit du son de voix le plus doux et avec l’accent de la plus vive affection :

— Ainsi, mon frère, vous me promettez de m’écrire cette semaine et de revenir celle d’après ?

— Je vous le promets, ma chère sœur ; et l’embrassant tendrement, il se jeta dans sa voiture, qui partit avec la rapidité de l’éclair. Aussitôt coureurs, piqueurs, jockeys, tous se précipitèrent sur les traces de leur maître, et bientôt ils disparurent au milieu des bois que la route traversait, pour aller rejoindre les portes du parc.

Après les avoir suivis des yeux aussi longtemps qu’elle put les apercevoir, la dame rentra dans le château au milieu d’une haie de laquais en livrée, et de femmes de chambre que la curiosité ou le respect avaient rassemblés à la porte au moment du départ de leur maître.

Tandis que la voiture roulait avec fracas sur une éminence située près des confins de son parc immense, le jeune seigneur paraissait plongé dans de profondes réflexions. Un sentiment de mélancolie se peignait sur ses traits expressifs, et prouvait que les honneurs et les richesses ne suffisent pas pour assurer le bonheur. Ses yeux se portèrent un instant sur ces forêts, sur ces champs couverts de riches moissons, sur ces fermes entourées de nombreux villages, qui se prolongeaient presque à l’infini jusqu’à l’horizon. Toutes ces propriétés lui appartenaient, et à cette vue un sourire de satisfaction anima un instant sa figure ; il pensait à tout le bien qu’il pouvait faire.

— Où allez-vous, Milord, de si bonne heure ? lui demanda un de ses amis qu’il rencontra sur la route, dans un phaéton élégant.

— À Eltringham, sir Owen, pour assister au mariage de mon cousin, M. Denbigh, qui épouse l’une des sœurs du marquis. Après avoir échangé quelques mots de compliments et d’adieux, ils continuèrent tous deux leur route, sir Owen Ap-Rice pour Cheltenham, où il allait prendre les eaux, et le comte de Pendennyss pour la terre du marquis où devait se faire la noce.

Le lendemain matin les portes d’Eltringham s’ouvrirent pour laisser entrer les nombreux équipages qui s’y rendaient de tous les côtés, et le cœur de lady Laura battit avec force, lorsque le bruit des roues parvint jusqu’à ses oreilles. Elle ne put résister à son impatience, et, courant à la fenêtre de sa chambre à coucher, elle examina les voitures qui s’approchaient rapidement, et à travers l’espèce de brouillard qui lui couvrait la vue, elle vit descendre de la première son futur époux, accompagné du duc de Derwent. Bientôt après arriva lord Pendennyss, et puis enfin l’évêque de ***. Lady Laura n’en put voir davantage, et le cœur rempli de joie, d’espérance, et en même temps d’une vague inquiétude, elle se jeta dans les bras de l’une de ses sœurs.

Une semaine environ après le mariage de sa sœur, lord Henry Stapleton, étant retourné à Londres, rencontra dans la rue John Moseley qui se dirigeait vers la résidence de la douairière lady Chatterton. — Ah ! ah ! s’écria-t-il en le prenant par le bras, encore ici, libertin que vous êtes ! à vous entendre vous ne deviez rester à Londres que vingt-quatre heures, et je vous y retrouve au bout de quinze grands jours !

John rougit un peu. Dès qu’il avait appris l’arrivée de Grace, il n’avait pas eu le courage de partir ; et, au lieu de retourner annoncer lui-même le résultat de son voyage, il s’était contenté d’en écrire une relation circonstanciée.

— Oui, Milord, répondit-il avec quelque embarras, mon ami Chatterton est arrivé inopinément, et j’ai dû… il a fallu…

— Et il vous a fallu rester ; n’est-ce pas ce que vous voulez dire ? dit lord Henry en riant.

— Oui ; il m’a fallu rester, répéta John. Mais où est Denbigh ?

— Parbleu, où doit être tout mari qui a des principes, surtout pendant le mois de miel… avec sa femme.

— Avec sa femme ! qui, Denbigh ? balbutia John aussitôt que sa surprise lui permit d’articuler quelques mots ; il est marié !

— Parbleu ! s’il est marié, s’écria le jeune marin en imitant sa manière ; est-ce une nouvelle que je vous apprends ? n’avez-vous pas reçu le billet de faire part ?

— Marié ! répéta de nouveau John, comme s’il était frappé de stupeur, mais quand… comment… où s’est-il donc marié, Milord ?

— Quand ? mardi dernier ; comment ? par une dispense spéciale, et par le ministère de l’évêque de *** ; où ? à Eltringham ; oui, mon cher ami, ajouta-t-il avec sa gaieté ordinaire ; George est mon frère à présent, et j’en suis ravi.

— Je vous en félicite de tout mon cœur, Milord, dit John cherchant à maîtriser ses sentiments.

— Merci, merci, s’écria Henry ; allez, nous avons mené joyeuse vie. Que n’étiez-vous avec nous, mon cher ! Ce n’était pas un de ces mariages en poste que l’on bâcle bien vite pour que les mariés vous échappent ensuite plus vite encore et aillent se cacher dans quelque trou ; non, non, nous avons en une noce à l’ancienne mode, dans toutes les formes… C’est moi qui ai arrangé cela : j’avais écrit à lady Laura que le temps est précieux, et que je n’en avais pas à perdre pour des fariboles ; qu’il fallait que tout marchât comme il faut. La chère petite, elle consentit à me laisser faire. Aussi comme tout fut bien ordonné ! nous avions cinq chevaliers pour la mariée. Derwent et Pendennyss, le marquis, William et moi ; puis cinq filles de noce : d’abord mes trois sœurs…, c’était assez triste, mais le moyen de faire autrement ?… ensuite lady Henriette Denbigh, et enfin une vieille fille, une de nos cousines. J’aurais donné tout au monde pour faire exclure la vieille cousine ; mais je n’y pus jamais réussir ; non, en honneur, mes représentations ne furent pas admises.

Il aurait pu parler encore longtemps sans que son ami l’eût interrompu ; John était occupé de pensées trop sérieuses pour prêter l’oreille à tout ce bavardage. Lord Henry prenait trop de plaisir à son récit pour remarquer le silence ou l’étonnement de son ami. Après s’être promené encore quelques minutes avec lui, il lui fit ses adieux, en lui disant qu’il partait le soir même pour aller rejoindre sa frégate à Yarmouth.

John continua sa route, abîmé dans les réflexions que lui suggérait la nouvelle qu’il venait d’apprendre. Il ne pouvait croire que Denbigh eût oublié si vite Émilie, et il craignit bien que le désespoir ne l’eût porté à une démarche dont il pourrait se repentir par la suite. L’affectation qu’il avait mise à l’éviter ne se trouvait que trop bien expliquée à présent. Mais comment lady Laura avait-elle pu se décider en si peu de temps à l’épouser, si Denbigh ne lui avait jamais fait la cour ? Et pour la première fois un soupçon vague et confus qu’il y avait quelque chose d’équivoque dans la conduite de Denbigh vint se mêler aux réflexions que lui inspirait le refus qu’Émilie avait fait de sa main.

Lord et lady Herriefield (car depuis huit jours Catherine était mariée) étaient à la veille de partir pour le continent, les médecins ayant conseillé l’air du midi à Sa Seigneurie ; tandis que Grace et sa mère devaient se rendre à l’une des résidences de lord Chatterton, près de Bath. Chatterton avait d’autres engagements, mais il promit d’aller les y rejoindre dans une quinzaine de jours avec son ami Derwent.

John avait continué à faire la cour la plus assidue pendant les fêtes qui avaient suivi le mariage de Catherine ; et comme la douairière, tout entière aux apprêts de ses bals et de ses soirées, n’avait pas le temps de s’occuper de lui, il trouvait Grace plus aimable que jamais ; Grace de son côté oubliait la peine que lui avait causée le mariage de sa sœur, qui lui semblait ne pouvoir pas être longtemps heureuse au sein d’une pareille union, pour ne songer qu’aux preuves réitérées de tendresse que lui donnait son amant.

Un jour que John venait voir lady Chatterton, il trouva la voiture de lord Herriefield à la porte ; en entrant dans le salon, il vit les nouveaux mariés près de sortir avec Grace et sa mère. Ils allaient faire quelques courses de boutique dans Bond-Street : il tardait à Catherine de dépenser l’argent de la jolie bourse que son mari lui avait donnée, à son mari de faire parade de sa jolie femme, à la mère de montrer le succès de ses entreprises matrimoniales. Quant à Grace, elle accompagnait sa sœur pour obéir aux ordres de sa mère.

L’arrivée de John, qui n’avait rien de surprenant, puisqu’il venait presque tous les jours à la même heure, bouleversa tous ces projets. La douairière changea aussitôt de batterie, et elle s’écria avec une satisfaction évidente :

— Voilà M. Moseley qui vient fort à propos pour vous tenir compagnie, ma chère Grace. En effet, avec le mal de tête que vous avez, il n’eût pas été prudent de sortir, et il vaut beaucoup mieux que vous gardiez la maison. Non, ma bonne amie, je ne saurais vous permettre de venir avec nous ; il faut absolument que vous restiez ce matin ; je le désire, et, s’il le faut, je vous l’ordonne.

Lord Herriefield, en entendant ces mots, regarda sa belle-mère avec quelque surprise ; puis il jeta sur Catherine un coup d’œil de défiance qui semblait dire assez clairement : — Serait-il possible que j’eusse été leur dupe après tout ?

Grace n’était pas habituée à résister aux ordres de sa mère, et, ôtant son châle et son chapeau, elle reprit son ouvrage avec plus de calme qu’elle ne l’aurait fait s’il lui était resté encore quelques doutes sur les sentiments de Moseley.

En passant devant la loge du portier, lady Chatterton lui dit d’un air de mystère : — S’il vient quelqu’un, vous direz qu’il n’y a personne. — Il suffit, Milady, reprit le concierge. Et quand lord Herriefield monta dans la voiture et prit place à côté de Catherine, elle lui parut moins jolie qu’à l’ordinaire.

Lady Chatterton, qui avait déjà jeté les fondements du malheur de sa fille aînée en se donnant tant de peine pour lui faire contracter une union mal assortie, acheva son ouvrage en soulevant prématurément le voile qui cachait encore à son gendre son véritable caractère, et en lui inspirant déjà des soupçons que le temps ne devait servir qu’à confirmer.

Lord Herriefield était répandu depuis trop longtemps dans le monde pour ne pas connaître tous les manèges ordinaires des mères qui ont des filles à marier, et des filles qui désirent un mari. Comme la plupart de ceux qui n’ont eu des relations qu’avec des femmes qui sont la honte de leur sexe, il n’avait pas une très-haute idée des vertus du sexe en général, et sa manière de voir sur ce sujet n’était rien moins que romanesque. Catherine lui avait paru jolie ; elle était jeune, d’une famille noble, et lorsqu’il la vit pour la première fois, elle était dans un de ses moments calmes, n’ayant alors personne en vue contre qui sa mère lui eût donné ordre de diriger ses batteries.

Catherine avait du goût, et lord Herriefield ne pouvait lui plaire ; aussi n’employa-t-elle pour le captiver aucun de ces manèges adroits qu’elle mettait parfois en usage, et que l’expérience du vicomte n’aurait pas manqué de découvrir. Il attribua sa froideur à son désintéressement ; et pendant que Catherine jetait les yeux sur un officier de retour de France depuis quelques jours, et que sa mère convoitait pour elle un certain duc qui pleurait la mort de sa troisième femme, le vicomte se prit d’une belle passion pour elle, et il était éperdument amoureux avant que la mère ou la fille en eussent eu le moindre soupçon. Son titre n’était pas très-brillant, mais il datait de loin ; son patrimoine n’était pas très-considérable, mais ses actions dans la compagnie des Indes étaient nombreuses ; il n’était pas très-jeune, il est vrai, mais il n’était pas non plus trop vieux. Enfin, toutes réflexions faites, attendu que le duc venait de mourir d’une nouvelle attaque de sa goutte, qui lui était remontée dans la poitrine, et que l’officier s’était enfui avec une jeune espiègle qu’il avait enlevée dans une pension, la douairière et Catherine furent d’avis que, faute de mieux, il fallait se rabattre sur le vicomte, et qu’après tout un vicomte, fût-il vieux et infirme, valait mieux que rien.

Il ne faut pas supposer cependant que la mère et la fille eussent pu oublier tout sentiment de délicatesse au point de se communiquer ouvertement leur projet ; ce serait leur faire injure, et elles se respectaient trop pour cela ; mais elles savaient s’entendre sans se parler, et leur intelligence était parfaite et tenait presque de la sympathie. Trompées toutes deux dans leurs espérances, elles virent au même instant que le vicomte était leur fait, et que, pour river plus sûrement ses chaînes, il fallait continuer à employer les mêmes moyens qui l’avaient captivé à leur insu.

Jamais coopération ne fut plus active ni plus heureuse, et les deux complices jouèrent si bien leur rôle que le vicomte avait toute la confiance d’un Corydon de campagne, et il ne commença à ouvrir les yeux que lorsqu’il entrevit les manèges auxquels la douairière avait recours pour prendre John à son tour dans ses filets, qu’il remarqua que sa femme ne faisait aucune attention à une chose qui lui semblait toute naturelle et à laquelle il pensait pour la première fois qu’elle avait été habituée elle-même.

Lorsque la douairière fut descendue, et pendant que Moseley était allé la conduire jusqu’à sa voiture, Grace prit sa guitare presque machinalement, et commença une romance qui était alors à la mode. Grace avait une voix charmante ; mais en présence de John elle était ordinairement si troublée que son émotions paralysait ses moyens. Pour le moment elle était seule ; ses sentiments étaient en harmonie avec les paroles, et jamais elle n’avait chanté avec plus d’expression.

John était appuyé sur le dos de sa chaise avant qu’elle se fût aperçue de son retour. Dès qu’elle le vit, il lui fut impossible de continuer ; elle se leva, et alla s’asseoir sur un sofa en reprenant son ouvrage. John s’assit à côté d’elle.

— Ô Grace ! lui dit-il (et le cœur de la jeune personne battit plus vite), votre chant est comme tout ce que vous faites… parfait !

— Vous trouvez, monsieur Moseley ? répondit la pauvre enfant fixant à terre ses yeux qu’elle n’osait lever sur lui.

John la regardait d’un air passionné ; elle était pâle et toute tremblante. John prit sa main ; elle la donna sans résistance. Un portrait frappant de lord Chatterton était suspendu auprès de la cheminée.

— Combien vous ressemblez à votre frère, ma chère Grace, lui dit-il, moins encore pour la figure que pour le caractère !

— Sous ce rapport, répondit-elle en se hasardant à lever les yeux, c’est à votre sœur Émilie que je voudrais ressembler.

— Et pourquoi ne deviendriez-vous pas sa sœur, ma chère Grace ? s’écria-t-il vivement ; vous êtes digne de l’être. Dites-moi, oh ! dites-moi que vous consentez à me rendre le plus heureux des hommes !

John s’arrêta ; Grace leva la tête ; il attendait impatiemment sa réponse ; mais elle continuait à garder le silence, et la pâleur de la mort était dans ses traits.

— J’espère que je ne vous ai pas offensée, ô ma bien-aimée ! vous qui m’êtes plus chère que la vie. Toutes mes espérances de bonheur se concentrent en vous ; dites, me refusez-vous ? Voulez-vous que je sois à jamais misérable ?

Grace, incapable de contenir plus longtemps son émotion, fondit en larmes ; et son amant, au comble de l’ivresse, l’attira doucement à lui ; elle pencha la tête sur son épaule, et murmura d’une voix presque éteinte quelques mots que John entendit à peine, mais qui ne lui permettaient pas de douter de son bonheur. Il était dans le ravissement. Il ne se mêlait plus aucun sentiment pénible à son ivresse ; Grace n’avait jamais pris part aux manœuvres de sa mère, il le savait ; mais il n’aurait pas voulu paraître se laisser prendre à un piège grossièrement tendu. Maintenant il ne cédait qu’à la douce influence de l’amour. Que de tendres aveux se firent les deux amants ! à quels doux épanchements ne se livrèrent-ils pas jusqu’au moment où la douairière rentra avec sa fille !

Un coup d’œil suffit à lady Chatterton pour découvrir ce qui s’était passé ; elle voyait des traces de larmes sur les joues et dans les yeux de Grace : c’en était assez pour elle, et lorsque celle-ci la suivit dans sa chambre, elle lui cria en entrant : — Eh bien ! ma chère, à quand la noce ? Savez-vous que vous me tuerez avec tous ces mariages coup sur coup ?

Grace ne craignit plus comme auparavant la redoutable entremise de sa mère, elle n’avait plus rien à redouter ; John lui avait ouvert son âme tout entière, et elle sentait que rien ne saurait plus l’empêcher d’être à elle, comme rien ne pourrait jamais l’empêcher d’être à lui.