UNE MESURE DE SALUBRITÉ PUBLIQUE

le nom des rues. — souvenir indécent des nonnes, les nonnais et des nonnettes. — un coup de balai, S. V. P.


Il y a encore dans Paris une foule de rues qui portent des noms vraiment par trop grotesques ou trop indécents, comme les rues des Abbesses, des Bernardins, des Capucins, Cardinal, du cloître-Notre-Dame, Saint-Merri, Saint-Honoré, du Grand-Prieuré, des Grands-Augustins, de la Madone, de la Nativité, et sept ou huit portent le nom d’une N.-D. quelconque, de Lorette, de Nazareth et toujours de la bonne galette des gogos ; voulons-nous des saints plus ou moins excentriques, depuis Ouen, en passant par Eleuthère, jusqu’à Rustique, ainsi nommé parce qu’il ne portait jamais de parapluie, jusqu’à Spire, Bon, Eustache, Romain et Fiacre — voilà, patron ! — il y en a au moins 180 de cet acabit, et c’est vraiment trop de patrons pour une seule ville.

Je pourrais continuer en citant les Haudriettes et maintes nonnettes qui remplissaient Paris autrefois de leurs orgies et de leurs débauches. Aujourd’hui il y a encore beaucoup plus de communautés, mais elles ont changé de nom tout simplement ; mais à quoi bon ? Tous les vieux Parisiens connaissent ces voies publiques aussi bien que moi, et je pense qu’il est inutile d’insister.

Il y a un vieux proverbe qui dit : ça n’est pas que ça soit sale, mais ça tient de la place.

Là, malheureusement, dans le cas qui nous occupe, il faut renverser le problème. Évidemment la plaque bleue de la Ville, au coin des rues, ne tient pas beaucoup de place, mais ça rappelle toute la sanglante horreur, toutes les noires débauches des moines et des religieuses pendant tout le moyen-âge.

Et il semble que les Nonnains-d’Hyères, les Haudriettes et bien d’autres soient un véritable défi jeté aux bonnes mœurs et à la pudeur publique au commencement de ce siècle.

Il est temps vraiment, par respect pour nos enfants, de jeter un voile sur toutes les turpitudes anciennes et nouvelles du monachisme.

Séquestrations, tortures, sadisme, vices contre nature, horreurs d’un fanatisme tout à la fois cruel et bestial, rien n’a manqué à ces couvents d’autrefois, et il est temps que l’on en efface jusqu’au souvenir qui déshonore le coin de nos rues comme une tache de sang — le sang des martyrs de l’Inquisition, de tous les crimes de notre sainte mère l’Églîse catholique.

Qui n’a vu encore dans la plupart des villes de France des noms de rues pornographiques comme celui de Retrousse-Pénil, en pleine ville de Blois, par exemple, parce qu’il y avait là un couvent de femmes hystérîques et libidineuses qui se jetaient le soir sur les passants attardés pour les violer et les prendre de force !

Chose étrange, il faut croire que ces dames n’aimaient pas la calotte !

Joli temps, jolies mœurs !

Mais il ne faut plus que de pareilles inscriptions viennent souiller les yeux et les oreilles de nos femmes et de nos filles dans les rues, il faut un beau coup de balai pour enlever jusqu’au souvenir de toutes les épouvantables débauches des couvents pendant le moyen âge.

Je sais bien qu’un ami me fait remarquer que depuis ça n’a pas changé.

C’est très vrai, mais au moins ça se passe derrière un mur et ça ne s’étale plus sur les murailles, et s’il y a encore trop de pauvres petites orphelines livrées à la débauche dans les congrégations et chez les Flamidiens, en attendant que tout ce monde soit chassé, nous voulons, au moins, la salubrité de nos rues, et c’est pourquoi nous demandons la suppression de toutes ces bondieuseries qui constituent un véritable attentat public et permanent à la pudeur !