Imprimerie l’Union (p. 136-138).


TUTOIEMENT


Le tutoiement ne s’emploie qu’entre intimes, et encore faut-il y faire bien des réserves.

L’absence du tutoiement maintient dans les rapports un plus grand respect, sans y être diminutif d’affection ; si bien, que l’on dit souvent de personnes qui ne se tutoient pas, « elles se portent respect » ; c’est assez significatif, n’est-ce pas ?

Ceux qu’on aime, on les porte bien haut dans sa pensée dans son cœur ! On les place sur un piédestal très élevé, entourés de vénération ; il est donc juste d’employer, en leur parlant, les formules les plus respectueuses.

Mari et femme emploient le tutoiement entre eux ; mais on ne tutoie jamais son père et sa mère à moins qu’ils ne l’exigent.

On se tutoie entre frères et sœurs ; on le fait aussi d’ordinaire entre camarades de collège, compagnes de pension ; et encore, peut-être vaudrait-il mieux s’en abstenir, en prévision de l’avenir.

Il n’est pas d’usage que des fiancés se tutoient, bien que cela puisse se faire quelquefois.

Parvenu à un certain âge, un jeune homme cesse de tutoyer une jeune fille, qui aurait été la compagne de ses jeux, aux jours de son enfance. Ce changement se fait, disait-on autrefois, quand Mademoiselle porte sa première robe longue. Impossible aujourd’hui de se fixer sur ce détail ; disons alors vers la dix-septième année. Ce tutoiement ne pourrait être continué, que sur autorisation des parents.

Entre cousins et cousines, tout dépend du degré d’intimité ; ainsi, un tout jeune homme se garde bien de tutoyer une cousine d’un certain âge, dont il a toujours vécu éloigné ; à moins que cette parente ne l’engage à le faire. Les jeunes filles ne tutoient pas, non plus, leurs cousins plus âgés qu’elles, à moins de raisons spéciales, dont chacun reste juge.

Les études étant terminées, ceux ou celles, qui jusque là, vivaient sur un pied d’égalité, se trouvent dispersés dans le monde, dans des milieux parfois bien différents ; c’est alors qu’il faudra bien s’observer à ne pas manquer d’égards ! Ayez du tact et de la délicatesse ! Soyez bienveillants, à ceux dont la condition sociale est inférieure à la vôtre ; mais ne cherchez pas à vous imposer, à ceux qui sont au-dessus de vous, par une trop grande familiarité.

Il serait inconvenant de tutoyer le camarade d’autrefois, devenu un personnage de marque, non seulement par son rang social, mais encore par la dignité de sa charge ou de sa profession. Jamais on ne doit tutoyer un prêtre ou un religieux, eut-il été son compagnon d’étude ou un ami très intime, son caractère sacerdotal impose un respect que les convenances exigent.