Poëmes en prose (Louis de Lyvron)/La Chanson d’Arthur/V

Alphonse Lemerre (p. 72-74).
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En tête de l’armée, marchent Arthur et le barde gaulois. Derrière eux viennent messire Keu le sénéchal, Béduyer l’échanson et Gauvain le héraut. Ce sont trois bons guerriers.

Derrière ces trois guerriers fameux marchent trois guerriers non moins célèbres : Landlé, que les épées n’osent toucher tant il est beau ; Morvéan que personne n’ose regarder tant il est laid, et Glëouloued, que personne ne peut renverser tant il est fort. Les autres chevaliers sont tous égaux comme les épis d’un champ d’orge.

Lorsque l’armée s’était mise en marche, les femmes avaient poussé des sanglots ; mais le barde gaulois leur avait dit d’une voix rude : « Les femmes ne doivent pas pleurer quand les hommes vont se battre. »

Arthur monte un cheval couleur d’écume, dont un large bouclier garantit la croupe arrondie. Le barde monte un cheval couleur de brouillard qui s’est arrêté tout sellé devant lui. Le cœur du roi des Bretons bat sous une cuirasse d’argent ; ses cheveux blonds s’échappent d’un casque d’argent. Le barde a des braies écarlates et pour manteau une peau de loup. Un collier d’or résonne sur sa poitrine nue, un bracelet d’or serre le haut de son bras droit, de la poudre d’or tombe de sa moustache blonde. La harpe d’érable est pendue à l’arçon de sa selle.

Arthur a l’air d’un roi ; mais le barde a aussi l’air d’un roi.