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PLANÇON ou PLANTARD. On appelle ainsi les branches de saule, de peuplier, d’osier, &c. qu’on a séparées du tronc & que l’on plante ensuite dans un trou profond, fait avec un instrument de fer que l’on nomme vulgairement aiguille, pal ou barre. C’est un morceau de fer de quinze à vingt lignes d’épaisseur, sur une longueur de quatre pieds, terminé en pointe taillée quarrément du côté qui doit pénétrer en terre. L’ouvrier l’enfonce à force de bras en le retirant de temps à autre. Si le haut de cette barre est terminé par un manche semblable à celui d’une tarière, on le nomme alors improprement tarière, puisqu’il n’est pas vissé ou creusé en cuillier par le bout inférieur. L’ouvrier ne retire point de terre ce dernier instrument ; il l’enfonce en le faisant rouler autour de la circonférence du tronc qu’il pratique. Par ce procédé, le tronc a une forme conique ; on y met le plançon, en observant qu’il touche le fond ; & ensuite, on fait tomber tout autour la terre des bords que l’on serre le plus que l’on peut, & dans tous les points contre le plançon ; moins il reste de vide, plus cette terre est serrée, & plus la reprise du plançon est certaine.

Doit-on couper la tête des plançons ? Quelques auteurs sont pour la négative & sur-tout pour les peupliers noirs ; mais l’expérience prouve qu’ils reprennent aussi-bien de quelque manière qu’on les plante. Si on supprimoit la tête du peuplier d’Italie, il perdroit un de ses beaux ornemens, celui de la perpendicularité & uniformité de sa tige ; mais si les arbres qui résulteront des plançons, sont destinés à fournir des échalas, (voyez ce mot) il vaut beaucoup mieux retrancher leur tête, afin que le nombre des échalas soit plus considérable, & qu’ils soient mieux nourris ; les arbres, au contraire, destinés au fagotage pour la nourriture des troupeaux, rendront davantage si on laisse leur tête s’élever dans les airs.

La pratique ordinaire est de couper triangulairement & en pointe la base des plançons, en observant cependant qu’un des côtés du triangle soit recouvert de son écorce. C’est par ce point-là que les premières racines commenceront à pousser ; d’ailleurs, la forme triangulaire & pointue permet qu’on enfonce d’avantage le plançon en terre.

Pendant la première année, on ne doit supprimer aucun des bourgeons qui percent à travers l’écorce ou plançon ; les plantes, les arbres, se nourrissent plus par leurs feuilles que par leurs racines ; les feuilles absorbent l’humidité de l’air, (consultez ce mot) ainsi que les différens sucs nutritifs qu’il contient ; & la naissance & les progrès de ces bourgeons facilitent ceux des racines, si toute fois le terrain convient à leur manière de végéter.

Il n’y a qu’un seul cas où l’on doive ébourgeonner ; c’est lorsque l’un des bourgeons qui poussent par le bas, devient trop fort & absorbe une trop grande partie de la séve qui devoit se porter aux bourgeons du sommet ; mais tant que la séve se distribue d’une manière à peu près uniforme, il est inutile, & même nuisible de bourgeonner les plançons. À la chute des feuilles, on sera à temps de commencer & de prati-