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PREMIÈRE ENNÉADE, LIVRE VIII.

d’après ses qualités distinctives. Mais il a laissé à la disposition de nos volontés les causes d’où dépendent les qualités de chacun de nous ; car chaque homme est ordinairement tel qu’il lui plaît d’être, suivant les inclinations auxquelles il s’abandonne et la nature de son âme[1]. Ainsi tous les êtres animés sont sujets à divers changements dont le principe est au dedans d’eux-mêmes ; et en conséquence de ces changements, chacun se trouve dans l’ordre et la place marqués par le destin. Ceux dont la conduite n’a subi que de légères altérations s’éloignent moins de la surface de la région intermédiaire ; pour ceux dont l’âme change davantage et devient plus méchante, ils s’enfoncent dans l’abîme et dans ces demeures souterraines appelées du nom d’enfer et autres semblables ; sans cesse ils sont troublés par des frayeurs et des songes funestes pendant leur vie et après qu’ils sont séparés de leur corps. Et lorsqu’une âme a fait des progrès marqués, soit dans le mal, soit dans le bien, par une volonté ferme et par des habitudes constantes, si elle s’est unie intimement à la vertu jusqu’à devenir divine comme elle à un degré supérieur, alors du lieu qu’elle occupait elle passe dans une autre demeure toute sainte et plus heureuse ; si elle a vécu dans le vice, elle va habiter une demeure conforme à son état[2]. » (Trad. de M. Cousin, t. VIII, p. 265-266.)


§ II. rapprochements entre la doctrine de plotin et celle de saint augustin, de bossuet et de leibnitz.

Pour apprécier la doctrine de Plotin sur l’origine du mal et la comparer à celle qu’ont professée saint Augustin, Bossuet et Leibnitz, il est nécessaire de distinguer trois espèces de Mal, comme ce dernier auteur le fait dans sa Théodicée (I, 21) :

« On peut prendre le mal métaphysiquement, physiquement et moralement. Le mal métaphysique consiste dans la simple imperfection, le mal physique dans la souffrance, et le mal moral dans le péché. »

1. Mal métaphysique.

Sur la question du mal métaphysique, la doctrine de Plotin[3], plus

  1. Voy. Enn. I, liv. viii, § 5, p. 125 ; Enn. II, liv. iii, § 6, 9, 13, 15 ; p. 173, 179, 183, 187, etc.
  2. Voy. Enn. I, liv. i, § 12, p. 48 ; Enn. II, liv. iii, § 8, p. 178 ; liv. ix, § 9, p. 281, et la Note sur livre i, p. 385-387.
  3. Voy. liv. viii, § 3, p. 120 ; § 7, p. 129, etc.