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PHÈDRE

sont là des hypothèses auxquelles je ne veux pas m’aventurer et qu’il est aussi impossible de prouver que de réfuter. S’il y a dans le Phèdre, comme j’ai essayé de le montrer, l’harmonie d’une œuvre d’art, la façon dont cette harmonie découle de l’idée première est plus importante que la recherche conjecturale de prétendues sources, aussi bien d’ailleurs en ce qui concerne ce premier discours de Socrate qu’en ce qui concernait celui de Lysias.


V

LE SECOND DISCOURS DE SOCRATE

Notre premier soin doit être d’examiner la composition et le contenu du deuxième discours de Socrate. Ensuite il y aura lieu de considérer trois questions, à des titres divers pareillement importantes, qui se posent à son sujet : l’emploi qui y est fait du mythe ; la doctrine de l’âme qui y est exposée ; enfin sa conception de l’amour.

I. Structure et contenu du deuxième discours. — L’erreur du premier discours de Socrate était de dénier toute valeur à l’amour passionné sous prétexte que c’est un délire : folie nuisible à l’intérêt de l’aimé, avait déjà dit Lysias, et

    contre les Cyniques. — L’autre conjecture est de W. Thompson dans le premier appendice de son excellente édition du Phèdre. Il cherche à l’établir par un parallèle avec le langage de Socrate dans le Banquet de Xénophon, étant admis d’autre part que ce dernier, quoique incomplet et trop attaché au détail, n’a pas cherché du moins à transfigurer son maître. Assurément les passages des deux écrits que Thompson met en regard (ch. 8, § 13, 15, 21, 23 en face de 240 cd, 241 c ; comparer aussi 19 fin avec 239 e sq., 21 fin avec 240 de) se ressemblent étrangement. On ne s’arrêtera pas cependant à l’insoluble question de savoir qui des deux écrivains est l’emprunteur (cf. ma Notice du Banquet, IV). Il faudrait en effet pouvoir dater avec sûreté les deux ouvrages. Supposez qu’ils aient tous deux une source commune dans les propos du Socrate historique sur l’amour : propos d’une rare vulgarité de pensée chez Xénophon, d’une singulière étroitesse de vues chez Platon dans ce premier discours, ils seraient de toute façon surprenants de la part d’un homme dont l’action fut sans nul doute prodigieusement animatrice et fécondante.