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PHÈDRE

une connaissance réelle des genres d’âme et des genres de discours qui y correspondent (271 c-272 a, 278 e). — Les trois conditions qui, d’après le Phèdre (269 d), sont nécessaires pour devenir un orateur accompli se retrouvent chez Isocrate (C. Soph. 17 et cf. 14 sq. ; Antidosis 186-189). Mais ce n’est là qu’un lieu commun, et il n’y a pas matière à parler d’emprunt, de l’un quelconque des deux à l’autre. Au surplus ces trois conditions, Platon les a remplacées, on l’a vu (p. cxlvii sqq.), par trois autres, dont le caractère est nettement technique. — De même, la « logographie » est condamnée par Platon (257 c-258 d), par Isocrate (Antidosis 2, 40-42, 48 fin ; cf. C. Soph. 20) et par Alcidamas (Soph. 13). Mais ce n’est pas dans le même esprit : Alcidamas cherche à atteindre Isocrate où le bât le blesse ; celui-ci proteste que, ruiné, il n’avait pas d’autre moyen d’existence ; Platon enfin estime qu’en soi l’acte d’écrire des discours n’aurait rien de blâmable s’il ne se faisait avec une telle malhonnêteté (272 de, 273 bc). Beaucoup d’autres exemples encore pourraient être cités[1], qui feraient apparaître, sinon la fragilité,

  1. Rapprochement entre la politique et la rhétorique : Phèdre 258 bc, 277 d, 278 c, e ; Antidosis 79-83. — Platon dit que les choses dont il parle sont grandes et sérieuses, et, d’un autre côté, que ses écrits ne sont qu’un jeu, et il n’attend pas la fin du Phèdre pour le dire (262 d 2, 265 c 1, 8 sq.). Or Isocrate observe (Hélène 11-13) qu’il est bien plus facile de jouer avec les grands sujets que de les traiter avec le sérieux qui leur convient. — Isocrate (Hélène 64) parle dans les mêmes termes que Platon de la « palinodie » par laquelle Stésichore, insulteur d’Hélène, a obtenu que fût levée sa peine. — Il fait remonter (Hél. 67) à la guerre de Troie l’origine des arts et des « philosophies » (entendez : de la rhétorique). Platon évoque (261 b) ces « Arts oratoires » que Nestor et Ulysse ont composés sous les murs de Troie pendant leurs heures de loisir. — Le reproche d’être simplement propédeutique, que Platon adresse à un enseignement de la rhétorique auquel fait défaut la pratique (269 a-c), peut être retrouvé chez Alcidamas (25 sq.), sans doute contre Isocrate. — Lysias, dit Phèdre (228 a 1), a pris tout son temps pour écrire son discours. Alcidamas (4, 10) le dit, exactement dans les mêmes termes, de tout discours écrit. — Quand une partie d’un écrit, dit encore ce dernier (14), a été très soignée, elle fait l’effet d’une déclamation d’acteur ou de rhapsode. Et Platon de son côté dit qu’il ne vaut pas la peine, ni qu’on l’écrive, ni qu’on le récite à la façon