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PHÈDRE

dans cette forme on n’aperçoit plus de contrariété, donc plus de différence pouvant donner lieu à un sectionnement. Elle est le dernier échelon de la descente.

Ainsi les deux démarches seraient liées comme la montée et la descente. Mais, comme la montée s’est souvent faite d’un bond dans la direction de l’unité qu’on suppose être au sommet et sans tenir compte de tous les degrés qu’il doit y avoir entre ce sommet et la base à laquelle est accoutumée notre expérience, rien n’assure que nous ne nous sommes pas lancés dans une fausse direction. Il faut donc que, à partir de notre point d’arrivée, nous cherchions maintenant sous nos pieds un premier appui, puis un autre après celui-là, et ainsi de suite jusqu’à ce que nous retrouvions notre base initiale. C’est à la solidarité même de ces deux démarches que Platon se dit fermement attaché, à la solidarité du « rassemblement » qui unifie et de la « division » qui détaille (266 b ; cf. 273 e déb.). Ceux qui sont capables de faire l’une et l’autre sans les séparer, ceux-là, dit-il (266 c fin et 269 b), à tort ou à raison jusqu’ici je les appelle des « dialecticiens ». La raison de cette dénomination est supposée déjà connue : c’est qu’elle se fonde essentiellement sur l’emploi du dialogue ; on le voit dans le Phédon (73 a, 75 d, 78 d ; cf. p. 12, n. 1 et p. 31, n. 1) quoique le mot « dialectique » ne soit pas prononcé, mais plus clairement encore dans le Cratyle (390 c ; cf. aussi Ménon 75 d) où c’est par là qu’il est explicitement défini. Que le dialogue soit indispensable à la première des deux démarches, les dialogues de jeunesse, avec les inductions qui y sont le but d’une recherche en commun, suffiraient à le prouver. Pour se convaincre d’autre part qu’il n’est pas moins nécessaire à

    nature essentielle de la chose, « forme » ou « Idée », à εἶδος « l’espèce », qui signifie également une détermination formelle, mais conçue comme dépendant d’une autre forme, moins différenciée et, par conséquent, plus élevée, le genre. Ajoutons d’ailleurs que, dans la langue de Platon, le rapport logique de γένος ; et de εἶδος n’est pas constamment le même que celui, dans nos langues modernes, des termes genre et espèce : ainsi, dans le Timée (57 cd), il est question de γένη (genres) qui sont des subdivisions de certaines εἶδη (espèces); langage très naturel si l’on se reporte au sens originaire, car ce sont proprement des familles qui sont issues d’une souche commune, laquelle est la forme initiale, le type de la race. Cf. Zeller, Ph. d. Gr., II 1⁴, p. 626 n. 1.