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NOTICE

partie divine de notre âme, celle que le Timée appelle notre « démon » et par laquelle nous sommes capables d’entrer en rapport avec les Idées (90 a-d), serait elle-même tripartite, étant constituée par l’introduction du Même et de l’Autre dans l’essence mixte déjà formée. L’autre tripartition, celle qui résulte de l’existence d’une espèce mortelle de l’âme, serait une image dégradée de la tripartition essentielle, et toutes les deux se retrouveraient dans le Phèdre, séparées par la chute. C’est en substance l’interprétation néoplatonicienne d’Hermias (123, 14-19). Peut-être celle-ci aurait-elle pourtant besoin d’être corrigée. Le Même, dont l’essence est pour Platon d’être l’Uniforme, ne peut en effet être symbolisé en toute rigueur par celui des deux chevaux qui, après la chute, cédera à des entraînements passagers. Celui-ci symboliserait bien plus cette docilité de l’Autre au pouvoir légitime du Même sans laquelle, d’après le Timée (42 cd, 43 a-44 c), il ne peut y avoir que désordre en tout ce qui agit, se meut ou est mû. De même donc que obéissance ou rébellion sont des contraires d’un genre unique, celui de l’ordre et de la règle[1], les deux forces qui tirent le char de l’âme humaine sont, d’après le Phèdre (253 c 9), des contraires dans le genre cheval. En résumé, de part et d’autre, l’âme apparaît triple. Mais le Phèdre se borne à distinguer les âmes des dieux et des hommes, des immortels et des mortels par la qualité des forces qui les meuvent ou par la possession, pleine dans un cas, latente dans l’autre, de l’usage de leurs ailes (246 a-d) ; le Timée, lui, qualifie immédiatement de parties mortelles de l’âme les forces en question, quand elles ne sont pas celles qui meuvent des âmes divines.


Immortalité.

Passons maintenant au problème de l’immortalité de l’âme. Il n’y a pas lieu de rappeler ce qu’on appelle improprement les « preuves » du Phédon (cf. ma Notice, p. xxvii, p. xxxv sqq., p. lxiv sq.). Un seul argument, le dernier, pourrait être considéré comme philosophiquement valable aux yeux de Platon, en raison de son caractère purement dialectique (ibid. p. lv-lx). Mais toujours, et même sur ce point, il y a une nécessité qui transparaît (par ex. 79 b, 106 d) : c’est de déterminer

  1. Le cercle de l’Autre est intérieur au cercle du Même, Timée 43 a.