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PHÈDRE

frère (cf. p. 56 n. 1 et Notice, p. xv sq. et xx), et de lui consacrer son éloquence, en se proposant pour but de rendre hommage à l’Amour et de le prendre pour guide (cf. 265 c déb.).

II. Trois problèmes particuliers. — Le second discours de Socrate nous impose, je l’ai dit, l’examen de trois problèmes, aussi importants pour l’intelligence du Phèdre que pour celle du Platonisme tout entier. 1o Dans sa plus grande partie ce discours est un mythe : comment doit-on comprendre l’emploi du mythe par la philosophie ? 2o Il contient une doctrine de l’âme : en quoi cette doctrine diffère-t-elle de ce qu’on trouve ailleurs ? 3o L’amour en est enfin le sujet : par quels traits la conception de l’amour qui y est exposée diffère-t-elle de celle qu’on trouve dans le Banquet ?

1. Le mythe.

Un premier point auquel il convient d’être attentif, c’est que le second discours ne commence pas par être un mythe. Ce que nous y trouvons en effet tout d’abord, c’est une classification des différentes formes que revêt en fait le délire qui est reconnu pour être d’inspiration divine. Bien mieux, quand Platon veut ensuite démontrer que, de toutes ces formes, l’amour est la plus belle et qu’il pose la nécessité d’avoir, au préalable, une connaissance vraie de la nature de l’âme (245 c déb.), il donne tout d’abord à cette démonstration l’aspect d’un raisonnement très élaboré, par lequel il établit logiquement que l’âme est immortelle. C’est seulement après s’être satisfait sur ce premier point, qui sans nul doute, il l’a dit lui-même, concerne la nature de l’âme, que Platon, sans cesser de considérer cette nature (son ἰδέα 246 a 4), change cependant complètement de ton et donne alors à son exposé le tour mythique. C’est, nous dit-il, faute de pouvoir expliquer en quoi consiste essentiellement la nature de l’âme, qu’on doit se contenter de dire à quoi elle ressemble ; c’est parce que nous saisissons cette nature seulement dans ses effets sans en avoir aucune expérience, que nous sommes réduits à en donner une image sensible : celle de l’attelage ailé avec son cocher ailé. Ce sont donc les manifestations observables de la nature de l’âme qui sont au point de départ du « cheminement de la pensée » dans la recherche de l’image