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Voyelles : les deux qameṣ

en o (soit soit ) est un phénomène qui se retrouve dans beaucoup de langues et de dialectes (comp. p. ex. anglais what = u̯ho̦t, avec un comme dans no̦t).

Le passage de primitif à héb. a dû se faire probablement par un son intermédiaire [1].

Le ◌ָֽ provenant de a est prononcé par les Juifs du Yémen, de la Perse, du Daghestan. Les Juifs allemands le prononcent fautivement (qui est le son du ◌ֹ). Les Juifs des autres pays le prononcent a. Cf. Idelsohn, Die gegenwärtige Aussprache des Hebräischen bei Juden… dans Monatschrift für Gesch. und Wissensch. des Judentums, 1913 (75 Jahrgang), pp. 527-545 ; 697-721).

l Remarques pratiques sur les deux ◌ָ. Le ◌ָ provenant de u est normalement bref ; on l’appelle קָמֵץ חָטוּף qameṣ abrégé (littért : enlevé). Le ◌ָֽ provenant de a est ordinairement moyen, rarement long ; on l’appelle קָמֵץ רָחָב qameṣ large.

Le ◌ָ tonique est moyen, et donc provient de a, p. ex. עֵנָ֫ב ʿẹnǻb, וַיָּ֫קֶם u̯a̦i̯i̯ǻqe̦m. Le ◌ָ atone en syllabe ouverte est moyen, donc å, p. ex. קָֽטְל֫וּ qå-ṭelū́ ; en syll. fermée il est bref, donc , p. ex. אָכְלָ֫ה ʾo̦ḵ-lǻ(h) « nourriture », וַיָּ֫קָם u̯a̦i̯i̯ǻqo̦m, חָנֵּ֫נִי ḥo̦nnẹ́nī « aie pitié de moi ».

Donc ne se trouve normalement qu’en syllabe fermée atone ; å se trouve dans les autres espèces de syllabes, à savoir en syllabe fermée tonique et en syllabe ouverte (tonique et atone).

Les exceptions sont peu nombreuses. Voici les principales :

  1. 1) Auprès de la forme קֳדָשִׁים[2] qḏåšīm, on a קָֽדָשִׁים qo̦-ḏåšīm, avec en syllabe ouverte ; mais en réalité, ici, en syllabe ouverte, l’ a dû devenir moyen (cf. § 28 e). Cette graphie insolite suppose que le ◌ָ a le son unique . De même on a שָֽׁרָשִׁים[3] šo̦-råšīm, pour שֳׁרָשִׁים* ; cf. § 96 A g[4].
  1. L’ provenant de a a pu originairement être vélaire. L’ vélaire est la voyelle homogène de la vélaire ק, celle qu’on perçoit quand on veut prononcer ק sans voyelle déterminée.
  2. Pluriel de קֹ֫דֶשׁ qọ́ḏe̦š « sainteté ».
  3. Pluriel de שֹׁ֫רֶשׁ šọ́re̦š « racine ».
  4. Le mot דָּֽרְבוֹן* « aiguillon » est lu do̦-reḇọ̄n. Cependant Bauer et Leander, 1, p. 500, supposent . Malheureusement l’étymologie est obscure. C’est un des très rares cas où l’origine du qameṣ nous échappe.