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112 de
Forme qatal (parfait)

אָחוֹר 2 S 1, 22 « l’arc de Jonathan n’a jamais reculé en arrière » (P. Dhorme)[1]. Ainsi s’explique l’emploi de qatal pour exprimer une vérité constante : לֹא עָזַ֫בְתָּ Ps 9, 11 « tu n’as jamais abandonné ceux qui te recherchent, ô Jéhovah », ce qui équivaut à peu près à tu n’abandonnes pas.

D’autre part, toutes les actions d’une série ou d’une catégorie peuvent être envisagées d’une façon globale (cf. § 111 e)[2] ; ainsi s’explique l’emploi de qatal dans certains cas, notamment dans les vérités d’expérience : שָֽׁמְרוּ Jér 8, 7 elles observent (après יָֽדְעָה elle connaît) ; מָֽצְאָה Ps 84, 4 elle trouve ; כָּלָה Job 7, 9 (le nuage) se dissipe (cf. § 113 c).

Mais certains exemples cités par les grammairiens s’expliquent plutôt en disant que l’auteur a en vue un cas typique, p. ex. אָמַר Pr 26, 13 « Le paresseux a dit : un lion sur le chemin ! », ou un cas particulier et représentatif, p. ex. Is 40, 7, 8.

e Parfois l’action, posée dans le passé, est censée continuer d’une certaine façon jusqu’au moment présent : עָֽזְבוּ « ils ont abandonné Jéhovah » (et continuent dans leur abandon) Is 1, 4 ; נָֽפְלוּ « pourquoi ton visage est-il abattu ? » (littt concidit facies tua, Vulg. ; cf. § a N) Gn 4, 6 ; פֵּרַ֫שְׂתִּי « j’ai étendu mes mains vers toi » (et je continue à les étendre), donc à peu près : « je tiens mes mains étendues » Ps 143, 6 ; 123, 1[3]. Dans quelques cas, p. ex. dans une interrogation, l’action est censée continuer jusqu’à un certain moment de l’avenir : עַד־מָתַי מֵאַ֫נְתָּ « jusques à quand as-tu refusé » (et continueras-tu de refuser ?), donc « refuseras-tu ? » Ex 10, 3 ; de même מֵֽאַנְתֶּם 16, 28[4].

  1. On remarquera qu’entre les deux phrases nunquam fecit et non faciebat (non solebat facere) la différence peut être, dans certains contextes, de médiocre importance, de sorte qu’on peut passer facilement de l’une à l’autre. Ainsi l’on pourrait traduire ici ne reculait pas, d’autant qu’au stique suivant on a le yiqtol לֹא תָשׁוּב ne revenait pas. On a la même alternance du qatal et du yiqtol Éz 18, 6-9 ; Ps 1, 1-2 ; Gn 31, 39 ; Job 22, 9 (Driver-Gray in h. l., le parfait pour la variété). Le qatal a l’avantage de situer l’action dans le passé.
  2. Cf. Job 4, 3 יִסַּ֫רְתָּ רַבִּים « docuisti multos » (ce qui implique des actes multiples), parfait global suivi d’un yiqtol fréquentatif ; Éz 27, 12 et sqq. (dans la description du commerce de Tyr) נָֽתְנוּ ils te donnaient (constamment).
  3. Dans certains cas le yiqtol serait équivoque ; il pourrait signifier le futur. Dans les deux derniers exemples le qatal peut se traduire par un présent français.
  4. Opposer Ex 10, 7 עַד־מָתַי יִֽהְיֶה.