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  CHAPITRE XVIII. 235
    la terre nivelée comme une plaine ; nous rassemblerons tous les hommes, sans en oublier un seul.
  1. Ils paraîtront devant ton Seigneur rangés en ordre. Dieu leur dira : Vous voilà venus devant moi tels que je vous avais créés pour la première fois, et vous pensiez que je ne remplirais pas mes promesses.
  2. Le livre où sont inscrites les actions de chacun sera mis entre ses mains ; tu verras les coupables saisis de frayeur, à cause de ce qui y est écrit : Malheur à nous ! Que veut donc dire ce livre ? Il ne reste ni petite action ni grande ; il les a comptées toutes ; les hommes les retrouveront là présentes à leurs yeux. Ton Seigneur n’agira injustement envers qui que ce soit.
  3. Quand nous dîmes aux anges : Prosternez-vous devant Adam, ils se prosternèrent tous, à l’exception d’Éblis, qui était un des génies[1] ; il se révolta contre les ordres de Dieu. Prendrez-vous donc plutôt Éblis et sa race pour patrons que moi ? Ils sont vos ennemis. Quel détestable échange que celui des méchants !
  4. Je ne les ai point pris pour témoins quand le créais les cieux et la terre, et quand je les créais, et je n’ai pas pris pour mes aides ceux qui s’égarent.
  5. Un jour, Dieu dira aux infidèles : Appelez mes prétendus

  1. Ce passage embarrasse les commentateurs. Éblis est ici compté parmi les génies, eldjinn, race intermédiaire entre les hommes et les anges, et dont l’origine et la nature sont aussi vaguement définies dans le Koran que dans presque toutes les religions ; Éblis était d’abord un ange, ainsi que le dit le Koran en plusieurs endroits ; sa rébellion l’a fait précipiter du ciel, il devient Satan, echcheïtan, le tentateur, le diable, l’ennemi déclaré des humains. Les anges ne peuvent ni enfanter ni engendrer, et ne pèchent point, tandis que les génies se reproduisent, sont sujets au péché et passibles des châtiments de la vie future. Quelques commentateurs croient qu’il faut regarder Éblis comme le père de la race des génies ; mais le texte qui nous occupe dit : il était du nombre des génies. Quelle que soit l’affinité des êtres désignés par le nom de cheïtan, Satan (au pluriel cheïatin), avec cent de génies (djinn), tous deux représentant le principe de mal, il est nécessaire de les distinguer, d’en distinguer le caractère et l’apparition dans les différents cultes. Satan appartient au culte, sinon primitif, du moins fort ancien, des peuples sémitiques ; il se rattache au mythe de la chute de l’ange et de l’homme : les génies appartiennent plutôt aux mythes perses et indiens (div, deva). et n’auraient fait invasion dans les cultes des peuples sémitiques que plus tard. On voit par les passages du Koran, chap. II, 96, et chap. XIX, 69, que les mots génies et Satan sont identiques ; on peut le prouver encore par des passages analogues, chap. XXVII, 39-40, LXXII, 11. Pour mettre le lecteur français à même de s’éclairer sur cette question, nous traduisons partout le mot cheïatin par démons, cheïtan par Satan, et djinn par génies.