Page:Léouzon le Duc - Le Kalevala, 1867.djvu/291

Cette page a été validée par deux contributeurs.
233
vingt-quatrième runo

« Ô beau fiancé, garde-toi aussi d’attacher cette belle colombe au mortier de misère[1] afin qu’elle pile l’écorce de bouleau, qu’elle prépare le pain de paille, le gâteau de sapin. Jamais, tandis qu’elle habitait la maison de son père, la demeure de sa douce mère, la jeune fille n’a été attachée au mortier de misère, jamais elle n’a pilé l’écorce de bouleau, elle n’a préparé le pain de paille, le gâteau de sapin.

« Conduis-la, au contraire, dans un grenier bien approvisionné, afin qu’elle puise dans les coffres de froment et de seigle, dans les coffres d’orge, pour pétrir le pain, pour brasser la bière.

« Ô fiancé, mon cher frère, ne souffre pas que cette jeune colombe, que cette belle oie soit accablée par la douleur ! S’il survient un moment difficile, si la jeune fille s’ennuie, attèle aussitôt ton cheval brun ou ton blanc poulain, et ramène-la dans la maison de son père, dans la demeure de sa douce mère !

« Garde-toi aussi de la traiter en esclave, en servante mercenaire ! Ne l’empêche point de descendre à la cave, de fréquenter l’aitta[2] ! Jamais, tandis qu’elle habitait la maison de son père, la demeure de sa douce mère, on ne l’a traitée en esclave, en servante mercenaire, on ne l’a empêchée de descendre à la cave, de fréquenter l’aitta ; elle se coupait toujours des tranches de pain de froment, elle veillait sur les œufs des poules, sur les jattes de lait, les tonnes de bière, et, tous les matins et tous les soirs, elle allait aux provisions dans l’aitta.

« Ô charmant jeune homme, beau fiancé, mon cher frère, si tu traites la jeune fille avec bonté, on te fera un gracieux accueil lorsque tu viendras dans la maison de ton beau-père, lorsque tu visiteras ta belle-mère ; on te servira à manger et à boire ; on détellera ton cheval, on le conduira à l’écurie, on l’abreuvera, on lui donnera de l’orge en abondance.

  1. Voir page 215, note 1.
  2. Voir page 3, note 5.