Page:Léouzon le Duc - Le Kalevala, 1867.djvu/238

Cette page a été validée par deux contributeurs.
180
LE KALEVALA

la bête monstrueuse, on le chercha dans la belle Karjala, dans les vastes demeures de Suomi, dans la paisible Wänäja[1], dans la fière Ruotsi[2], dans les immenses plaines de Lappi[3], dans la puissante Turja[4], on le chercha jusque dans Tuoni[5], jusque dans l’empire souterrain de Manaia[6], mais on ne le trouva, on ne le découvrit nulle part.

On chercha un autre boucher, un homme qui pût abattre la bête monstrueuse, sur la blanche surface de la mer, au milieu des vastes flots.

Un homme noir surgit du fond de la mer, un héros se leva du sein des flots, du golfe pleinement ouvert, de l’immense surface humide. Il n’était ni des plus grands, ni des plus petits. Il pouvait rester couché sous une coupe, il pouvait se tenir debout sous un tamis.

C’était un vieillard aux poignets de fer, à la face couleur de fer. Il portait sur la tête un bonnet de pierre, aux pieds des souliers de pierre, et, dans sa main, brillait un couteau d’or, au manche orné de cuivre étincelant.

Ainsi, le taureau avait trouvé son boucher ; il avait rencontré son exécuteur ; le taureau de Suomi avait trouvé celui qui devait le renverser ; le monstre de la terre avait rencontré celui qui devait l’abattre.

Dès que l’homme eut aperçu la bête, il l’étreignit vivement par le cou, la força de plier les genoux et l’abattit de flanc dans la poussière.

Retira-t-il de là un riche butin ? Non, il n’en retira qu’un butin de peu de valeur[7]. Le taureau fournit cent cuves de chair, cent brasses de boyaux, six bateaux de sang, six tonnes de graisse, pour les noces de Pohjola, pour le festin solennel de Sariola.

  1. La Russie.
  2. La Suède.
  3. La Laponie.
  4. Voir page 74, note 1.
  5. Voir page 120, note 1.
  6. Voir page 120, note 2.
  7. Forme ironique familière aux Finnois.