Page:Léouzon le Duc - Le Kalevala, 1867.djvu/227

Cette page a été validée par deux contributeurs.
169
dix-neuvième runo

partit pour aller labourer le champ, pour aller le retourner de fond en comble.

Il vit des têtes qui fourmillaient, des crânes qui sifflaient, et il dit : « Écoute, ô serpent créé par Jumala, qui te fait ainsi dresser la tête ; qui t’a invité, qui t’a exhorté à tenir ton crâne haut, à allonger et à roidir ton cou ? Disparais de mon chemin, glisse-toi, être monstrueux, dans l’herbe sèche, cache-toi dans les broussailles, au sein de l’épais gazon ! Et si là, encore, tu redresses la tête, qu’Ukko[1] la brise avec ses flèches armées de pointes de fer, avec sa grêle de fer ! »

Et Ilmarinen laboura le champ de vipères, creusa des sillons dans le champ de serpents ; il souleva les vipères sur le champ labouré, les serpents sur le champ retourné de fond en comble par le soc. Puis il revint et il dit : « J’ai labouré le champ de vipères, J’ai retourné de fond en comble le champ rempli de serpents, me donnera-t-on maintenant la jeune fille, emmènerai-je avec moi ma chère bien-aimée ? »

La mère de famille de Pohjola lui répondit : « La jeune fille te sera donnée, tu pourras emmener la jeune vierge, lorsque tu auras enchaîné l’ours de Tuoni[2], bridé le loup de Manala[3], lorsque tu les auras conduits ici du fond des bruyères de Tuonela[4], des demeures de Manala. Cent hommes y sont allés pour le tenter, mais aucun d’eux n’en est revenu. »

Le forgeron Ilmarinen se rendit dans la chambre de la jeune fille, et il lui dit : « Maintenant, une nouvelle tâche m’est imposée ; il faut que je bride les loups de Manala, que je dompte les ours de Tuoni, et que je les conduise ici du fond des bruyères de Tuonela, des demeures de Manala. »

La jeune fiancée vint à son secours ; elle lui donna ce

  1. Voir page 5, note 2.
  2. Voir page 120, note 1.
  3. Voir page 120, note 2.
  4. Demeure de Tuoni.