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septième runo

fait froid, pour moi, à la cime des flots, il est douloureux d’être continuellement suspendu sur la croupe des vagues.

« Comment donc pourrai-je exister, comment pourrai-je me soutenir dans cette triste vie, sur ce globe périssable ?

« Bâtirai-je ma demeure dans l’air, ou l’établirai-je dans l’eau ?

« Si je veux bâtir ma demeure dans l’air, je n’y trouverai ancun point d’appui, si je veux l’établir dans l’eau, elle sera emportée par les vagues. »

Soudain, des hanteurs de la Laponie, des régions du nord-est, un aigle prit son essor. Il n’était ni des plus grands, ni des plus petits[1]. D’une aile, il effleurait la mer, de l’autre, il balayait le ciel ; sa queue traînait sur les flots, son bec rasait les îles.

Tantôt il vole, tantôt il s’arrête. Il regarde au loin autour de lui, et il voit le vieux Wäinämöinen errant sur la surface bleue de la mer.

« Que fais-tu donc là au milieu des vagues, que fais-tu donc, ô héros, au milieu des flots ? »

Le vieux, l’imperturbable Wäinämöinen répondit :

« Je me trouve ainsi au milieu des vagues, j’erre au milieu des flots, parce que je suis allé à la recherche de la jeune fille de Pohjola, de la vierge de Pimentola.

« Je longeais rapidement la mer libre de glaces, et voici qu’un jour, un matin, je touchais déjà au golfe de Luotola[2], au fleuve de Joukola[3], lorsque tout à coup mon cheval a été frappé d’une flèche, que l’on dirigeait contre moi-même.

« Alors, j’ai roulé dans la mer, je suis tombé au milieu des vagues, pour y être bercé, pour y être ballotté par les vents.

  1. V. page 12, note 3.
  2. Région des îles, de Luoto, île. Même pays que Joukola.
  3. V. page 47, note 1.