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vous ne crussiez qu’il y eût deux dieux non engendrés, il se sert à dessein du mot de « Père », et il montre ainsi en plusieurs autres endroits qu’il est, et engendré du Père, et en même temps le Seigneur souverain de toutes choses. Mais il ajoute encore quelque chose de plus grand pour élever nos esprits plus haut. « Nul ne connaît le Fils que le Père, comme « nul ne connaît le Père que le Fils, et celui à qui le Fils l’aura voulu révéler (47). » Ces paroles paraîtront peut-être à ceux qui n’ont pas assez de lumière n’avoir aucune liaison avec ce qui les précède, mais cette liaison existe. Après avoir dit : « Mon Père m’a mis toutes choses entre les mains », il semble qu’il ajoute : Pourquoi vous étonnez-vous que, je sois le Maître souverain ? J’ai quelque chose encore de bien plus grand, savoir, de connaître parfaitement mon Père, et d’être de même substance que lui. Car c’est ce qu’il donne à entendre en disant qu’il est le seul qui connaît son Père.
Mais il ne leur parle ainsi, que lorsqu’il leur a donné par ses miracles une preuve de sa puissance, et que non seulement ils lui voyaient faire ces miracles à lui-même, mais qu’ils en faisaient eux-mêmes, par la vertu de son nom. Et comme il venait de dire en parlant à son Père : « Vous avez révélé ces choses aux petits », il montre que cette révélation venait aussi de lui-même en disant : « Nul ne connaît le Père que le Fils, et celui à qui le Fils l’aura voulu révéler ;» non celui à qui Dieu aura ordonné, ou à qui il aura commandé de révéler le Père, « mais à qui le Fils l’aura voulu révéler. » Que « s’il révèle son Père », il se révèle aussi lui-même ; mais il ne le dit pas expressément parce que c’est une chose qui s’entend assez d’elle-même. Mais il marque positivement qu’il révèle son Père, il le fait ici et ailleurs encore, comme lorsqu’il dit : « Nul ne peut venir à mon Père, sinon par moi. » (Jn. 14,8)
Il montre encore par ces paroles, qu’il n’a qu’une même volonté et qu’un même sentiment avec son Père : Je suis, dit-il, si éloigné d’avoir jamais de différend avec lui et de le combattre en rien, qu’il est au contraire impossible de venir à lui que par moi. Comme les Juifs étaient particulièrement scandalisés de ce que Jésus-Christ leur paraissait un adversaire de Dieu, un homme qui usurpait la Divinité, il s’efforce par tout, et par ses actions, et encore plus ici par ses paroles, de détruire cette pensée.
Quand il dit « que personne ne connaît le Père que le Fils », il ne veut pas dire que tout le reste des hommes l’ignore entièrement, mais seulement que les hommes n’ont pas la même connaissance du Père qu’en a le Fils, et que de même ils ne connaissent point le Fils, comme le connaît le Père. Car Jésus-Christ ne dit pas ces paroles comme l’impie Marcion le croit, de quelque Dieu inconnu dont jamais personne n’ait eu la moindre connaissance ; mais il marque ici une connaissance très-claire et très-parfaite ; et cette connaissance, nous ne la possédons ni du Père, ni du Fils, selon cette parole de saint Paul : « Ce que nous avons maintenant de connaissance et de prophétie est très-imparfait. » (1Cor. 13,12)
Le Fils de Dieu, après avoir excité par ces paroles l’ardeur de ses disciples, et leur avoir montré qu’il est tout-puissant, commence ensuite à les appeler à lui. « Venez à moi vous tous qui êtes fatigués et qui êtes chargés, et je vous soulagerai (28). » Il n’appelle point celui-ci ou celui-là en particulier, mais en général tous ceux qui sont accablés de soins, de tristesses, d’inquiétudes et de péchés. « Venez à moi », leur dit-il, non pas afin que je tire vengeance de vos crimes, mais afin que je vous en délivre. « Venez à moi », je vous invite, non que j’aie aucun besoin de vos louanges, mais parce que j’ai une ardente soif de votre salut. « Et je vous soulagerai. » Il ne dit pas seulement : Je vous sauverai, mais : Je vous établirai dans un très-parfait repos. « Prenez mon joug sur vous et apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur et vous trouverez le repos de vos âmes. Car mon joug est doux et mon fardeau est léger (29, 30). » Ne tremblez point quand vous entendez parler de « joug », car il est « doux. » Ne craignez point quand je vous parle d’un « fardeau », car il est « léger. » Comment donc, me direz-vous, Jésus-Christ dit-il ailleurs : « que la porte est petite et la voie « étroite ? » Elle est petite si vous êtes lâche, elle est étroite si vous êtes paresseux. Mais quand vous accomplirez ce que Jésus-Christ vous commande, son fardeau vous sera léger. C’est dans ce sens qu’il lui donne ici ce nom.
Mais comment, me direz-vous, pourrai-je accomplir ce que Jésus-Christ commande ? Vous l’accomplirez, si vous êtes doux, modeste et humble. Car l’humilité est la mère de toutes les vertus. C’est pour cette raison que lorsque