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fatigues présentes lui assuraient les plus glorieuses récompenses ; que ses périls lui valaient des couronnes. Si Jacob, dans son amour pour Rachel, regardait comme le court espace de quelques jours une durée de sept années, à bien plus forte raison, ce bienheureux méprisait-il toutes les choses présentes, embrasé qu’il était de son amour pour Dieu, supportant tout, pour son Christ bien-aimé. Appliquons-nous donc, nous aussi, je vous en conjure, à aimer le Christ, car, Que demande-t-il de vous, dit l’Évangéliste ? rien autre chose, que de l’aimer de tout votre cœur, et d’accomplir ses commandements. (Mc. 12,30). Il est évident que celui qui aime Dieu, comme il convient, fera tous ses efforts pour accomplir ses préceptes ; l’amour fraternel fait tout avec ardeur, pour s’attirer l’amour du bien-aimé ; et nous aussi, si notre cœur chérit sincèrement le Seigneur, nous nous empresserons d’accomplir ses commandements ; nous ne ferons rien qui puisse aigrir contre nous le bien-aimé. Voilà la royauté du ciel ; voilà, des vrais biens la vraie jouissance ; voilà ce qui renferme les biens infinis, la sincérité, la perfection de l’amour. Et notre amour pour Dieu est sincère, quand l’affection que nous lui portons, nous excite à montrer, à nos compagnons d’esclavage, la tendresse d’un ardent amour. Toute la loi des prophètes, dit l’Évangéliste, sont renfermés dans ces deux commandements (Mt. 22,40), à savoir : Que vous aimiez le Seigneur, votre Dieu, de tout votre cœur, de toute votre âme et de toutes vos forces, et votre prochain comme vous-même. (Mc. 12,30-31) Voilà la somme, voilà le fondement de toutes les vertus. En même temps que l’amour de Dieu fait son entrée dans les âmes, y entre aussi l’amour du prochain ; qui aime Dieu, ne méprise pas son frère, ne préfère pas les richesses à celui qui est un de ses membres ; au contraire, c’est l’amour, c’est la bonté qui se manifeste au souvenir de cette parole : Autant de fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi-même que vous l’avez fait. (Mt. 25,40) Cette pensée que ce que l’on fait au prochain, est fait à Dieu même, qui nous l’attribue comme un bienfait, qu’il a reçu de nous, donne au vrai fidèle l’allégresse de la charité. Dès lors, d’une main généreuse, il répand autour de lui l’aumône ; il ne s’arrête pas à l’extérieur méprisable du pauvre ; il ne considère que la grandeur de Celui qui a pro mis qu’il regarderait comme fait à lui-même tout ce qui aurait été fait aux pauvres. Gardons-nous donc de dédaigner, je vous en conjure, ce profit de nos âmes, ce remède de nos blessures, Voilà, en effet, voilà, par excellence, le remède salutaire, qui fera disparaître les ulcères de nos âmes, jusqu’aux vestiges de toutes les cicatrices ; qui produira une cure, impossible pour le corps. Vous avez beau, d’après les conseils des médecins, mettre cataplasmes sur cataplasmes ; il faut que, sur le corps, la cicatrice demeure, et cela se comprend ; c’est le corps en effet qu’il s’agit de guérir ; au contraire, quand il s’agit de guérir l’âme, la bonne volonté produit une amélioration merveilleuse ; les plaies disparaissent, comme la poussière que dissipe la violence des vents. Les Écritures sont pleines d’exemples qui le prouvent. Ainsi Paul est devenu, de persécuteur, apôtre ; et celui qui d’abord combattait l’Église, est devenu fiancé de la divine grâce.
4. Comprenez-vous le changement ? comprenez-vous la transformation ? C’est ainsi que le larron, qui avait commis tant de meurtres, a pu, pour quelques paroles que vous connaissez, en moins d’un instant, si bien laver toutes ses fautes, qu’il a entendu, de la bouche du Seigneur : Aujourd’hui, vous serez avec moi dans le paradis. (Lc. 23,43) C’est ainsi que ; le publicain, pour s’être frappé la poitrine, pour avoir confessé ses fautes, est descendu du temple plus justifié que le pharisien. (Lc. 18,13) C’est que tous ces pécheurs manifestèrent la bonne disposition de leur âme ; ils confessèrent leurs péchés, ils en obtinrent la rémission. Eh bien ! maintenant, voyons la force de ce précepte, l’abondance qui accompagne les largesses de l’aumône ; apprenons quel profit en résulte pour nous, afin de la pratiquer avec ardeur. Peut-être son pouvoir est-il si grand que, non seulement elle purifie les péchés, mais déconcerte la mort. Comment cela ? je vais le dire : Et qui donc, m’objectera-t-on, pour avoir fait l’aumône, a triomphé de la mort ? À coup sûr, on voit bien que nous sommes tous asservis à la mort. Cessez de vous troubler, mes bien-aimés ; apprenez, par la réalité môme des choses, comment l’aumône triomphe de la tyrannie de la mort. Il y avait une femme, appelée Tabitha, nom qui correspond au grec Dorcas ; chaque jour cette femme