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pour cela que je me suis vu en butte à d’autres critiques. Ceux qui aiment la brièveté venaient me trouver et me priaient d’avoir pitié de leur faiblesse, et de resserrer des discours trop longs. Quand je vous vois pressés dans un étroit espace, j’ai envie de me taire : mais quand je vois que, malgré cette gêne, vous ne vous retirez pas ; que toujours suspendus à nos lèvres vous êtes tous disposés à nous suivre encore plus loin, je me sens le désir de laisser courir ma parole. Je ne vois que difficultés de toutes parts. (Dan. 13, 22) Que faire ? Celui qui ne sert qu’un maître, qui n’obéit qu’à une seule volonté, peut facilement plaire à son maître et ne pas se tromper ; mais moi j’ai bien des maîtres, et je suis forcé d’obéir à tout ce peuple, si partagé de sentiments. Si j’ai parlé ainsi, ce n’est pas que je supporte avec impatience mon esclavage, loin de là, ni que je veuille me soustraire à votre domination. Rien ne m’est plus honorable que cette servitude. Il n’y a pas de roi qui s’enorgueillisse de son diadème et de sa pourpre comme je me glorifie d’être l’esclave de votre charité. Cette première royauté périra par la mort ; mais mon esclavage, s’il est bien supporté, sera couronné par la royauté des cieux. Bienheureux le serviteur fidèle et prudent que le maître a établi sur tous ses compagnons pour leur distribuer leur mesure de froment. Je vous dis en vérité qu’il l’établira sur toits les biens qu’il possède. (Luc. 3, 42) Voyez-vous quelle est la récompense de cet esclavage ; quand il est bien supporté ? Ce serviteur est établi sur tous les biens du maître. Je ne fuis pas cette servitude, car je la partage avec Paul. Il dit en effet que nous ne nous prêchons pas nous-mêmes, mais Jésus-Christ Notre-Seigneur, nous déclarant vos serviteurs à cause de Jésus. (2Co. 4, 5) Et que dis-je, Paul ? si Celui qui était dans la forme de Dieu, s’est anéanti lui-même prenant la forme d’esclave dans l’intérêt des esclaves (Phi. 2, 6-7), qu’y a-t-il d’étonnant à ce que moi, esclave, je me fasse esclave de rues compagnons d’esclavage dans mon intérêt propre ? Ce n’est donc pas pour fuir votre domination que j’ai parlé de la sorte, mais pour obtenir grâce si la table que je vais dresser ne convient pas à tous. Ou plutôt faites ce que je vais vous dire. Vous qui ne ##Rem pouce ? jamais vous rassasier, mais qui avez faim et soit de la justice, qui désirez de longues instructions, prenez pitié de la faiblesse de vos frères et souffrez que je retranche un peu à la mesure habituelle de mes discours. Et vous qui désirez la brièveté parce que vous êtes plus faibles, considérez le désir de vos frères qui demandent une nourriture plus abondante, et pour eux, endurez une fatigue légère, portant les fardeaux les uns des autres et accomplissant la loi du Christ.
Ne voyez-vous pas qu’aux jeux olympiques les athlètes restant au milieu de l’arène, en plein midi, comme dans une fournaise ardente, reçoivent sur leur corps nu les rayons du soleil, comme s’ils étaient des statues d’airain, et luttent contre le soleil, contre la poussière, contre la chaleur, pour ceindre de lauriers une tête qui aura tant souffert ? Et pour vous, ce n’est pas une couronne de lauriers, mais une couronne de justice qui sera la récompense de votre docilité ; et encore, loin de vous retenir jusqu’en plein midi, votre faiblesse nous forcera à vous renvoyer presque dès le commencement du jour, quand l’air est encore assez frais, que les rayons du soleil ne l’ont pas encore échauffé ; et nous ne vous exposons pas tête mue aux ardeurs du soleil, mais nous vous rassemblons sous cette voûte admirable, nous vous prodiguons tous les secours imaginables, afin que vous puissiez écouter plus longtemps. Ne soyons pas plus délicats que nos enfants quand ils vont à l’école ; ils n’oseraient rentrer à la maison avant midi ; mais à peine sevrés, à peine séparés du sein de leur mère, avant même l’âge de cinq ans, ils supportent tout dans un corps tendre et jeune encore ; quelque chaleur, quelque soif, quelqu’incommodité qu’ils ressentent, ils restent assis dans l’école, supportant tout avec courage et patience. A défaut d’autres, imitons au moins nos enfants, nous hommes, nous parvenus à l’âge viril. Si nous n’avons pas le courage d’écouter parler de la vertu, qui pourra nous faire croire que nous supporterons au besoin les travaux qu’elle exige ? Si nous éprouvons tant de peine quand il s’agit d’écouter, qui nous montrera que nous serons plus vaillants pour agir ? Si nous abandonnons le devoir le plus facile, comment supporterons-nous le plus difficile ? Mais le lieu est resserré ! on y est gêné ! Écoutez : On n’emporte le royaume des cieux qu’avec violence. (Mat. 11, 12) Elle est étroite et resserrée la voie qui conduit à la vie. (Mat. 7, 14) Comment éviter d’être serrés et à l’étroit, quand on doit marcher par une voie étroite et resserrée ? Pour qui se met au large et à l’aise, une telle voix n’est pas