Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 4, 1864.djvu/251

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il faut de toute nécessité que les fidèles soient éprouvés : Tous ceux qui voudront vivre dans la religion du Christ souffriront la persécution. (1Ti. 3,12) Ailleurs il est écrit Mon fils, si tu veux servir Dieu, prépare ton âme à la tentation ; sois juste et fort. (Ecc. 2,4) – Voilà d’encourageantes promesses ! Tout d’abord les tentations ! Est-ce donc une puissante exhortation, une sensible consolation, pour qui se consacre au service de Dieu, de trouver des dangers dès les premiers pas ? Oui, c’en est une puissante, admirable, féconde. Et comment ? Écoutez la suite : Comme on éprouve l’or dans le feu, de même Dieu éprouve ses élus au creuset de la tentation. (Ecc. 2,5) Voici le sens de ces paroles : de même que l’or soumis au feu devient plus pur, de même l’âme éprouvée par les afflictions et les traverses du sort plus brillante et plus belle, et se purifie de toutes ces souillures du péché. C’est pourquoi Abraham disait au riche : Lazare a souffert, et ici il est consolé. (Luc. 16,25) Et Paul écrit aux Corinthiens : C’est pour celte raison qu’il y a parmi vous beaucoup de faibles et de malades, beaucoup d’autres qui sommeillent. Car il est certain que si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas ainsi jugés de Dieu, et même lorsque nous sommes jugés de la sorte, c’est le Seigneur qui nous châtie, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde. (1Co. 11,30-32) Et s’il livre le fornicateur à la mortification de la chair, c’est afin que son âme soit sauvée (1Co. 5,5) ; montrant ainsi que la tentation présente fait notre salut, et que les traverses, pour qui les supporte en rendant grâces à Dieu, sont la plus efficace purification de l’âme. Ainsi les fidèles étaient éprouvés ; maîtres et disciples étaient exposés à mille dangers ; ils n’avaient point de trêve dans les guerres de toute espèce qu’ils soutenaient de tous côtés. – Mon discours l’a suffisamment montré ; et après ce que j’ai dit, ceux qui se plaisent à l’étude des saintes Écritures y pourront trouver de nouvelles preuves.
8. Revenons enfin à notre sujet. Quel était-il ? Pourquoi Paul a-t-il dit : ayant le même esprit de foi ? C’est que les fidèles de ces temps étaient troublés de ne trouver que des maux dans la vie présente, et de ne voir de bonheur qu’en espérance ; des maux actuels, des espérances éloignées ; d’un côté la réalité, de l’autre l’attente. Se faut-il étonner qu’au commencement de la prédication quelques âmes fussent découragées, lorsqu’aujourd’hui que la prédication s’est étendue sur toute la terre, qu’on a vu tant de preuves de la vérité des promesses de l’Évangile, tant de fidèles tombent néanmoins dans le découragement ? Et ce n’était point cette seule cause qui les jetait dans le trouble ; il en était une autre tout aussi puissante. Laquelle ? Ils faisaient réflexion que dans l’Ancien Testament les choses n’étaient point ainsi réglées, mais que les prix et les récompenses de la vertu ne se faisaient point attendre à ceux qui vivaient dans la justice et la sagesse. Ce n’était point après la résurrection, ni dans la vie future, mais dans la vie présente qu’ils voyaient s’accomplir les promesses de Dieu. Si vous aimez le Seigneur votre Dieu, dit l’Écriture ; vous serez heureux. Dieu fera prospérer vos troupeaux de bœufs et de brebis ; il n’y en aura point d’infécondes ni de stériles, vous n’aurez à craindre ni langueur, ni maladie. (Deu. 7,13-15) Dieu enverra sa bénédiction sur vos greniers. (Deu. 28,8, 12) Il ouvrira le ciel et vous enverra la pluie le matin et le soir. (Id. 11,14) Il y aura abondance de blé sur votre aire et de semence dans vos sillons. (Lev. 26,4-5) Et bien d’autres promesses encore, qu’il accomplissait dans la vie présente. Ceux qui ont quelque perspicacité peuvent déjà voir la solution. Ainsi la santé du corps, la fertilité de la terre, une nombreuse et sainte postérité, une vieillesse heureuse, des saisons bien réglées, l’abondance des moissons, l’opportunité des pluies, la fécondité des troupeaux de bœufs et de brebis, tous les biens enfin leur arrivaient en cette vie, ils n’avaient point à les espérer, à attendre le jour qu’ils quitteraient la terre. Les fidèles, songeant que leurs pères voyaient les biens naître sous leurs pas et qu’eux-mêmes devaient attendre la vie future pour recevoir les prix et les couronnes promises à leur foi, ils souffraient et se laissaient abattre par les maux où ils devaient passer leur vie tout entière.
Paul voyant leur découragement et les maux terribles qui le devaient suivre, qu’aux uns Dieu avait promis après la mort le prix de leurs travaux, et qu’aux autres il avait accordé leur récompense dans la vie présente ; prévoyant que ces pensées les jetteraient dans le relâchement, il veut ranimer leur zèle et leur enseigner qu’au temps de leurs pères les choses étaient réglées comme elles sont aujourd’hui,